‘’RIEN NE DIT QUE LE SENAT NE SERA PAS REINSTAURE AU SENEGAL ’’
MACKY SALL SUR LA MISE EN PLACE DU SENAT AU BURKINA FASO
Sans nul doute que l’opposition et la société civile burkinabé ne gardent pas un bon souvenir de la visite de Macky Sall. Les déclarations qu’il a faites là-bas sur la mise en place d’un Sénat ont été interprétées comme un soutien à Blaise Compaoré pour une éventuelle modification de la Constitution.
En quittant le Burkina Faso au terme de sa visite de 72h, le Président Macky Sall n’imaginait pas qu’il a rallumé la polémique au pays des hommes intègres où la mise en place d’un Sénat divise la classe politique. Invité par nos confrères Burkinabé à se prononcer sur la mise en place du Sénat dans ce pays, Macky Sall s’est livré à un jeu clair-obscur, histoire de ne pas froisser son hôte. «Le Sénégal a supprimé son Sénat, et ce n’est pas la première fois d’ailleurs, puisque l’institution a été créée deux fois, supprimée deux fois et rien ne dit qu’elle ne sera pas réinstaurée. Au moment même où je vous parle, j’ai institué une Commission nationale de réforme des institutions, qui doit voir quelles sont les institutions les plus appropriées, sous quelle forme et comment revoir notre Constitution pour la stabiliser». Et d’ajouter : «la démocratie, c’est un processus continu et dynamique. On ne peut, de notre point de vue, avoir un schéma classique qui peut s’appliquer à l’ensemble des pays.
Chaque pays, selon les situations du moment, ou selon la réalité, doit pouvoir décider, en toute souveraineté, de ce qu’il considère comme étant le plus approprié. Un Sénat dans une démocratie peut parfaitement se comprendre. Dans les plus grandes démocraties comme la France ou les Etats-Unis, cette chambre parlementaire existe. Ailleurs, cette chambre n’existe pas et on parle de Parlement monocaméral. Nous allons voir, lorsque la Commission nationale va soumettre ses réflexions, ce que nous allons retenir».
Le journal «L’observateur Paalga» enfonce le clou : «M’enfin, de qui se moque Macky Sall ?»
Les propos plus qu’ambigües tenus par le Président sénégalais ont complètement mis le feu aux poudres. Et certains éditorialistes n’ont pas raté le successeur de Wade. C’est le cas du quotidien «L’observateur Paalga» qui assène : «Alors, foulant pour la première fois la terre du pays des hommes intègres dans une telle ambiance à couper au couteau, le Président sénégalais pouvait-il éviter de mettre sa bouche dans cette polémique nationale ? Assurément que non». Les internautes non plus. Ils se sont déchaînés sur Macky Sall, coupable à leurs yeux de complaisance à l’endroit d’un chef d’Etat qui veut réviser la charte fondamentale pour un énième mandat.
L’opposition et la société civile dans la rue le 28 juillet
En effet, si les Burkinabé sont hostiles à la mise en place du Sénat, c’est presque pour les mêmes raisons (économiques) qui ont poussé Macky Sall à le supprimer le 19 septembre dernier. Au Burkina Faso, le Sénat risque de coûter entre 3 et 5 milliards de F CFA. Mais au-delà de cette question du coût, l’opposition est convaincue que l’entourage du chef de l’État cherche à faire modifier l’article 37 de la Constitution qui limite à deux le nombre de mandat présidentiel en créant une Chambre qui lui sera acquise.
De toute façon, les propos de Macky Sall n’ont pas refroidi l’opposition. Celle-ci emmenée par l’Upc, le parti de Zéphirin Diabré, compte mener la bataille de la rue pour faire plier Balise Compaoré. Reste à savoir si dans cette affaire, le Président sénégalais n’a pas été maladroit en s’immisçant dans les affaires internes d’un pays voisin. Ou bien ses services diplomatiques n’ont pas été assez alertes pour lui éviter cette sortie qui peut être interprétée comme un soutien tacite à Blaise Compaoré.