CHUTE DE BLAISE COMPAORÉ
L’Afrique de l’Ouest a perdu son médiateur. La déchéance de Blaise Compaoré et son éjection de la présidence du Burkina Faso contraignent ses pairs de la sous-région à se choisir rapidement un nouveau leader pour gérer les conflits latents dans la zone.
La Guinée, la Mauritanie, demain la Gambie où Yayah Diamé va s’autoproclamer roi, le terrorisme dans la bande du Sahel, sont autant de chantiers qui interpellent les dirigeants de la CEDEAO. L’ex président du Burkina Faso qui a passé 27 ans au pouvoir apparaissait comme la personnalité la plus indiquée dans la zone pour prendre les choses en mains.
C’est cette stature qui semble l’avoir perdu. Blaise Compaoré, pour avoir trop goûté au pouvoir, ne s’est plus senti. Il ne pouvait comme Yayah Diamé demander aux peuples ouest africains de le nommer roi mais il voulait encore rester au pouvoir au Burkina Faso, le Pays des hommes intègres.
A force de traverser les frontières de son pays pour aller prêcher la bonne parole chez les voisins, Blaise s’est vu trop beau. Oubliant qu’on peut être utile mais jamais indispensable et qu’on ne dompte pas une nation.
Ayant exercé un pouvoir sans partage, muselant rudement l’opposition et s’appuyant habilement sur la chefferie traditionnelle, l’ex président, fort de l’appui de l’armée du Faso, a méconnu cette irréversible réalité : l’Afrique a bougé. Le printemps arabe et le 23 juin au Sénégal ont été des lames de fond pour les peuples opprimés.
Ces événements qui sont des classiques pour la citoyenneté revendicative, Blaise Compaoré n’a pas su les lire, les analyser et en tirer tous les enseignements. L’homme s’est arc-bouté dans son désir de rester au pouvoir, en pensant qu’il était encore le bien-aimé, le sauveur, l’incontournable…
Le nom de Blaise Compaoré ne sera pas inscrit au panthéon africain. Le président déchu du Burkina Faso quitte la scène politique africaine, la tête basse. Il sera estampillé non démocrate et suceur de sang. La trentaine de morts enregistrée lors des émeutes qui l’ont chassé du pouvoir, la mort du journaliste Norbert Zongo et l’assassinat de son prédécesseur, pourraient lui valoir d’être traîné à la Cour Pénale Internationale et ses proches invités à rendre compte au peuple du Faso.
Blaise Compaoré est désormais dans le fourgon des dirigeants africains qui n’ont pas su partir. C’est le peuple du Faso, debout, qui l’a obligé à se réfugier à Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire chez son ami Alassane Ouattara. Son séjour pourrait être difficile dans ce pays car il a eu maille à partir avec une partie du peuple ivoirien, notamment les hommes de l’ancien régime de Laurent Gbagbo.
Les dérives de Blaise Compaoré auront un impact négatif sur la situation économique et sociale de l’Afrique de l’Ouest. Au moment où le Tarif Economique Commun (TEC) va entrer en jeu le 1er janvier 2015 et la monnaie communautaire unique en 2020. La stabilité doit être de mise pour que ces grandes réformes puissent s’appliquer dans la sérénité et impactent positivement. Aucun pays de l’Afrique de l’Ouest n’a un taux de croissance atteignant les 2 chiffres.
Les pays les plus pauvres de la planète se trouvent dans cette sphère. Des défis qui nécessitent une lecture apaisée des dirigeants de nos différents pays ; pour les relever, ils ne doivent mettre en avant que les attentes des citoyens. La démocratie apaisée, la bonne gouvernance, la sécurité, innervent les attentes des citoyens.
La leçon de Mandela doit servir à ce propos car Madiba a su tracer une belle, une sublime, voie, touchante d’exemplarité et de grandeur. Servir son peuple, c’est s’inscrire dans cette dynamique car diriger c’est faire don de soi. Blaise Compaoré ne l’a pas compris. A qui le tour pour le malheur de l’Afrique ?