DANS L’INTIMITE DES SOIREES «BOMBASS»
LES JEUNES FILLES S’EMPARENT DU DAKAR BY NIGHT
C’est un milieu où on cherche un tableau où c’est écrit : «Interdit aux moins de 18 ans». Impossible de le voir. Simplement parce que dans le Dakar by night de ce torride été 2014, c’est les moins de 18 ans qui assurent le spectacle. Virée aux Almadies au premier samedi soir du mois. Alcool, tenues extravagantes et «bombass» à volonté !
Le quartier des Almadies, c’est un véritable «Las Vegas» à la sénégalaise. Sur un tronçon de moins de deux kilomètres des «nights clubs», des salles de jeux et des bars attirent un monde fou. En cette soirée du samedi 6 septembre, l’ambiance ne déroge pas à la règle. Il y a une foule monstre des deux côtés de la route des Almadies. Un interminable embouteillage explique le concert de klaxons des automobilistes. On se croirait au rond point Sandaga en plein milieu de journée. Toutes les boîtes de nuit semblent afficher le plein, car devant chacune d’elles, il y a une horde de jeunes qui attendent le sésame pour s’introduire dedans. Deux choses se font remarquer, la jeunesse de la population qui vient danser et leur habillement.
En effet, il n’y a que des jeunes, et même des très jeunes personnes qui n’ont pas 18 ans. Les jeunes garçons portent des pantalons «pinws» et des T-shirts décolletés, sans parler de leur coiffure «Davala». Quant aux filles, elles semblent s’être passé le mot : elles portent toutes des minijupes et laissent découvrir des cuisses et des jambes aux formes variées. Les filles sont les reines du Dakar by night. On les suit comme des abeilles le feraient pour du miel.
C’est ainsi que nous en avons suivi un groupe d’une dizaine de jeunes demoiselles avec un accoutrement des plus «sexy». Toutes sont en minijupes utra-courtes. Et ici, il semble que les bas sont prohibés. Il est 2 heures 30 minutes quand nous arrivons devant une célèbre boîte de nuit dont nous tairons le nom, mais qui se trouve derrière le Nirvana. Il n’y a même pas d’enseigne pouvant indiquer un quelconque nom de ce lieu. Il faut débourser 5 000 francs Cfa pour avoir accès. Pour les femmes, c’est accès libre et gratuit. Ticket d’entrée à la main, on subit une fouille corporelle exécutée par deux gros bras d'un mastodonte qui n’a rien à envier à Bombardier. Un couloir de dix mètres mène à l’intérieur du dancing. Un autre monde s’offre au nouveau venu. La lumière est feutrée et on se laisse aisément envoûter par un flot de décibels.
Filles et garçons rivalisent d’ardeur sur la piste. Chacun y va de ses déhanchements, au rythme de la musique. Tout à coup, tout le monde crie de joie, comme une «Ola» dans un stade. Le Dj venait de mettre du «reggaeton». De la musique jamaïcaine. On fait un grand cercle à l‘intérieur duquel un jeune homme et une fille de son âge se livraient à une danse qui laisse sans voix. La demoiselle se courbe et offre son postérieur au garçon qui suit la musique en accompagnant les mouvements de la fille avec son bassin et ses mains sur la taille de la demoiselle. C’est presque une réplique de l’acte sexuel, même s’ils ont encore leurs vêtements. «C’est du Bombass», souffle un jeune visiblement surexcité. Les cris fusent de partout. L’ambiance est électrique autour de ce couple, mais tout le monde ne danse pas.
Au fond de la salle, des bouffées de chaleur attirent notre attention. Dans un salon un peu à l’écart de la piste, six filles et deux garçons tirent allégrement sur des cigarettes à vapeur. Des fumoirs qui ressemblent à ceux qu’on voit dans les pays arabes. Ici on l’appelle «Sisha», les jeunes se passent le mégot en fer lié à un tube en verre par un tuyau en plastique de couleur noire. Le petit groupe semble prendre du bon temps et ne s’aperçoit même pas de notre intrusion. Ils étaient déjà ailleurs.
ACCOUTREMENTS DES JEUNES FILLES DANS LE DAKAR BY NIGHT : Tenue incorrecte exigée !
«Toutes cuisses dehors». Ce n’est ni le titre d’un livre ou d’un film, mais plutôt ce qui se fait de mieux en habillement dans les soirées du Dakar by Night. L’accoutrement remarqué chez les jeunes filles est à la limite de la décence. Même les pantalons moulants appelées «Dangal» sont d’un autre âge. Pour être désormais «in», il faut mettre une minijupe. Plus elle est courte, plus elle semble plaire aux jeunes demoiselles. Elles sont courtes, mais surtout bien près du corps. Elles enveloppent difficilement une masse de chair qu’on peut deviner aisément. D’autres préfèrent les culottes. De toutes petites culottes, qui dépassent à peine le début des cuisses. Cet accoutrement qui peut choquer plus d’un père de famille ne dérange pas celles qui les portent. Zeyna, 17 ans, est de celles-là. Pour elle, venir en soirée impose un mode d’habillement spécifique. «On ne va ni en classe ni en ville.
On vient en boîte pour s’éclater, alors on ne va pas s’habiller comme des choux. En plus, il fait chaud, on est en été», expliquet- elle, juchée sur ses hauts talons. Pour cette autre fille au visage de gamine à peine sortie de la puberté, rencontrée dans une autre boîte, il faut être sexy pour venir en boîte, sinon on n’est pas dans le bain. «On sort pour être regardé par les mecs. Et ces derniers ce qu’ils aiment, c’est les ‘toqal’ et les minis. Alors qu’on ne nous rejette pas la faute. On ne fait que suivre les tendances», déclare Fifi qui se dit étudiante.
Le buste de ces filles est aussi nu. On croirait une renaissance du fameux «jumbax out».
D’antan, on se faisait souvent rejeter à l’entrée des boîtes de nuit qui exigeaient le port d’une tenue correcte. Mais cette chose tend à disparaître. De l’avis de ce videur de boîte au Duplex, la règle s’applique toujours, mais en particulier pour les hommes. «Bien sûr, quand des hommes portent des tenues de sport, on ne les laisse pas entrer. Mais chez les filles, on ne peut pas parce qu’elles ne portent jamais ces genres de trucs», rapporte le gros bras du nom d’Ismail qui ajoute : «C’est les filles qui font venir les garçons, alors si on les renvoient, on a une perte sèche. Les garçons ne dansent jamais là où il n’y a pas de femmes sexy. C’est d’ailleurs pourquoi l’entrée est souvent libre pour les femmes». Dans ce spectacle, c’est les voyeurs qui se rincent les yeux et ne s'en plaignent pas. Ils s’en donnent à coeur joie au grand plaisir des filles pour qui, tous les moyens sont bons pour être la plus belle
LES JEUNES DE MOINS DE 18 ANS, UNIQUE CLIENTELE DES BOITES POUR SOIREE «BOMBASS»
Jadis, les boîtes de nuit étaient réservées aux personnes de plus de 18 ans. Cependant, cette règle semble être devenue obsolète. Il y a plus de mineurs dans certains dancings de Dakar que de personnes majeures. Et le pire, c’est que ça ne semble plus choquer personne. Aux Almadies, il y a deux types de boîte de nuit. Il y en a qui reçoivent un public adulte. Mais elles sont très peu. Les dancings reçoivent essentiellement des mineurs, du moins durant cet été. C’est le cas au Duplex. Ici pas de contrôle d’identité. Les jeunes entrent sans aucun souci, pourvu qu’ils s’acquittent des droits d’entrée qui varient entre 5 000 francs Cfa et 10 000 francs Cfa. Devant notre impossibilité à rencontrer le gérant, les deux videurs refusent de se prononcer sur le sujet. Matar, un garçon de 16 ans, dit n’avoir jamais eu à faire face à un contrôle d’identité. «Non ! Jamais, si je viens en tenue de sport peut-être qu’on va me refuser l’entrée, mais jamais parce que je n’ai pas 18 ans», confie, cigarette au coin de la bouche, ce gamin qui reconnaît que ses 17 hivernages ne sont pas encore consommés. Dans une autre boîte de nuit située derrière la célèbre Nirvana, il y a aussi plus de jeunes. Làbas, nous avons pu rencontrer l’un des gestionnaires de la boîte. Selon lui, s’ils ne permettent pas aux jeunes d’entrer, ils vont devoir fermer boutique. «Mais attendez, c’est aussi parce qu’il n’y a que les jeunes qui viennent dans les soirées ‘Bombass’. Je suis désolé, mais c’est eux qui remplissent la boîte. Si je me mettais là à exiger 18 ans, je ne verrais plus personne, car ils ont presque tous moins de 18 ans», a-til fait savoir.
Pour lui, la forte concurrence du milieu ne permet plus d’exiger un quelconque âge aux entrants. «Vous interdisez à un jeune d’entrer, vous perdez son billet d’entrée et la consommation qu’il devait acheter. Et pire, vous enrichissez votre concurrent qui, lui, va l’accepter, malgré ses moins de 18 ans», a-t-il ajouté. Les adultes qui fréquentent les boîtes non plus ne semblent pas être dérangés outre mesure par cette situation. Car, pour eux, les jeunes ne fréquentent pas les mêmes milieux qu’eux. «Les jeunes n’attendent plus 18 ans pour découvrir des danses à travers l’internet et la télé, alors autant les laisser s’exprimer quand ils le souhaitent », lance un monsieur qui vient de sortir du club «Baramundi» où se produisait ce soir là le chanteur El Hadji Diouf. Pour cet autre monsieur trouvé sur la terrasse d’un glacier, les plus jeunes ont le droit de s’amuser. Car les fréquentations ne sont pas les mêmes. «De toute façon, ils ne viennent jamais dans les dancings où il y a des adultes. Car ils n’aiment pas ce qui se fait là bas», a-t-il confie