JUPITER NIE, KEBA NAR SY SE CONTREDIT, LE PROCUREUR REQUIERT 5 ANS
DELIBERE FIXE AU 31 JUILLET
Le célèbre chroniqueur Birame Tamsir Ndiaye dit Jupiter, qui était jugé, hier, devant le tribunal des flagrants délits de Dakar pour actes contre nature, conduite en état d’ébriété et enlèvement de mineur a nié catégoriquement les faits. La partie civile, Kéba Nar Sy, a tergiversé dans ses déclarations. Le procureur a requis la peine maximale de 5 ans. Délibéré, vendredi 31 juillet.
Vêtu d’un ensemble gris manche trois quarts, Birame Tamsir Ndiaye, dont le dossier a fait l’objet de 5 renvois est apparu fatigué à la barre du tribunal des flagrants délits. Il y était jugé, hier, pour actes contre nature, conduite en état d’ébriété et enlèvement de mineur. Amaigri, le teint noirci, il a nié catégoriquement les faits. Le procès a duré de 12 h 45 mn à 15 h 09 mn et le délibéré sera rendu le 31 juillet. Pourtant, l’affaire a failli être renvoyée parce que la partie civile Kéba Nar Sy a encore une fois soutenu qu’il était mineur et aucun de ses proches ne pouvait attester la véracité de ses propos.
Considérant qu’il est majeur, le Président a retenu l’affaire. Hésitant, Jupiter a émis le souhait de s’exprimer en français. Finalement, le tribunal l’a convaincu de s’exprimer dans la langue de Kocc Barma, à moins qu’il ne veuille pas être jugé… Narrant sa version des faits, Kéba Nar Sy a soutenu que le chroniqueur l’a trouvé en compagnie d’amis qui se bagarraient. Il l’a convaincu de monter dans son véhicule, soi-disant pour lui indiquer son chemin. L’automobiliste s’en engagé à lui remettre de l’argent pour son retour. Le prévenu aurait glissé sa main dans son pantalon, en le caressant avant de lui demander si c’est bon. Il a ensuite touché ses parties intimes. «Je lui ai balancé à la figure que ce n’était pas ce qu’il m’avait dit et je suis descendu de la voiture en criant thiaga», déclare Kéba Nar Sy. C’est lorsque Jupiter était occupé à se débarrasser de son compagnon Mamadou Sy qui les poursuivait, qu’il en a profité pour voler son téléphoneportable.
«C’EST COMME SI LE CIEL S’ETAIT ECROULE SUR MOI»
Tamsir Jupiter Ndiaye soutient que sorti voir un ami Asp en service au commissariat de Dieuppeul qui le sollicitait pour un coup de main, il est tombé sur la bagarre des amis de la partie civile et a invité cette dernière à s’éloigner «du gang». Mais au bout de quelques mètres, roulant doucement à cause d’un problème de chauffage, il s’est rendu compte qu’il était poursuivi par des individus qui scandaient son nom. C’est alors qu’il s’est réfugié au commissariat de Dieuppeul. Dès qu’il est sorti de sa voiture, la foule l’a encerclé et il a entendu quelqu’un crier : «C’est Jupiter, je le déteste… Ce qui me laisse penser qu’on l’a monté contre moi. J’étais choqué d’entendre ces accusations. C’est comme si le ciel s’était écroulé sur moi. J’ai demandé au policier de vérifier avec mon portable pour voir que j’avais bien appelé mon ami Asp. C’est là qu’on s’est rendu compte que l’appareil était en possession de Kéba Nar Sy.
Dans le violon, Kéba Nar Sy m’a regardé dans les yeux et m’a dit qu’il donnera la version qu’on lui a soufflée. Je ne peux pas faire le Nafila pour jeûner et faire ce qu’il me reproche. J’ai vécu des moments terribles. Ma famille est disloquée. Dans ce pays, si on vous accuse d’anthropophagie, cela vous poursuit toute la vie. En plus, j’étais devant une mosquée, je ne pouvais pas… »
Justement, à cause de son passé pénal et de son vécu, l’assesseur de droite lui demande si ce n’était pas plus réfléchi de sa part de passer son chemin et de ne pas se mêler de la bagarre, surtout vu l’heure tardive. Tamsir Jupiter Ndiaye concède à l’assesseur qu’il a raison. Mais tous ses proches savent qu’il aime les enfants. Il a l’habitude d’aider. Il lui arrive souvent de s’arrêter à un arrêt de bus et de proposer à ceux qui vont vers sa direction de les déposer.
Se tournant vers la partie civile, l’assesseur lui demande s’il a sucé le sexe de Jupiter. Nar Sy ne comprend pas le sens de la question. Le Président l’appelle et lui souffle la question en d’autres termes. Revenu à la barre, le vendeur de café Touba déclare : «Non, j’ai refusé de le sucer. Avant de sortir, j’ai pris son sexe dans la main et j’ai tiré pour lui faire mal». Et de répéter en wolof en riant : «Deedet, matiou mako».
«C’EST DUR À ENTENDRE, CELA FAIT MAL AU COEUR»
L’air outré, Birame Tamsir Ndiaye rétorque que tout ce que la partie civile vient de déclarer est faux.«C’est dur à entendre, cela fait mal au coeur. Je ne l’ai fait ni hier, ni aujourd’hui, surtout qu’on était au mois de Ramadan. Talna lénen. Natou bou djoté djoulitt… » Le Président l’interrompt et lui suggère de laisser ses conseils plaider. Insistant sur la minorité de la partie civile dont le délibéré dans l’affaire de vol sera rendu vendredi, le Procureur a requis cinq ans contre Jupiter, coupable à ses yeux des trois délits. En l’espèce, les attouchements étaient des préludes entre deux individus de même sexe et il s’agit d’actes impudiques, puisqu’il n’a pas eu de pénétration. «Jusqu’à l’extinction du soleil, notre société ne permettra jamais certaines pratiques, au-delà de toute considération religieuse. Il a crié au loup alors qu’il est le loup. La théorie selon laquelle il est victime d’une cabale ne saurait tenir. Pas plus que celle de se faire passer pour un bienfaiteur. Un comportement bien connu par les psychologues», argumente le procureur.
«CEUX QUI ONT INJUSTEMENT ACCUSE JUPITER ONT TUE UN JEUNE À GRAND YOFF»
«Le dossier pose les concepts de la présomption d’innocence et du cliché», plaide Me Soulèye Mbaye. L’avocat a du mal à comprendre comment les actes contre nature ont atterri dans cette affaire. Son client a subi une décharge médiatique extraordinaire. «Aujourd’hui, on le poursuit pour des faits similaires mais le Droit pénal doit se baser sur des certitudes. Ni les circonstances, ni le temps ne lui permettaient de s’adonner à des actes contre nature. S’il y a un moindre doute, il doit profiter au prévenu», ajoute-t-il. Me Khoureychi Ba préfère qu’aucun doute ne plane dans l’esprit du tribunal puisqu’à l’analyse des faits, il n’y en a point sur l’innocence de son client.
«LES GAYS NE SONT PAS DES PEDOPHILES»
Le téléphone de Tamsir Jupiter Ndiaye a été trouvé dans la culotte de la partie civile. L’ami Asp de Jupiter a confirmé avoir tenté en vain de le joindre le soir de faits, pour lui dire qu’il n’était plus de service et avait bougé du commissariat. Rien qu’avec ce témoignage, s’il s’agissait de n’importe quel autre citoyen, on l’aurait laissé partir avec des excuses. «Ce dossier est une offense à la présomption d’innocence, un défi au droit et un outrage à la justice. Dans les laboratoires de la police, on a fabriqué un coupable. Nous sommes tous en liberté provisoire (…) Le parquet a fait fausse route pour ne pas dire hors sujet. Les actes contre nature étaient une marchandise destinée à l’opinion. L’acte contre nature serait la sodomie. Le récit fait par Kéba Nar Sy a été dicté par un esprit fâché contre la logique. C’est à croire que Tamsir Jupiter Ndiaye a plusieurs mains. Avec une main, Tamsir tenait le volant pour rouler lentement, sirote une bière, tripote le passager, explore sa culotte, sort son sexe pour le confier au gosse et lui demande de lui faire une pipe… C’est une injure à l’intelligence, une cartouche mouillée». Lorsqu’il a vu son client, blessé au bras, les menottes lui déchirant la chair, il lui a dit que s’il dit la vérité, ceux qui l’accusent injustement vont payer. «Cela n’a pas tardé. C’est le commissariat le plus médiatisé, ils ont tué un jeune à Grand Yoff». Demandant la relaxe pure et simple, Me Bâ insiste sur le fait que les gays ne sont pas des pédophiles.