LA GRANDE MURAILLE VERTE FIXE LES POPULATIONS
IMPACT POSITIF DES PARCELLES REBOISÉES ET CLÔTURÉES
Les autorités devront faire de la culture fourragère une priorité si elles veulent développer le secteur de l’Elevage. L’Administration des eaux et forêts a montré la voie à suivre dans la commune rurale de Tessékéré, dans le département de Linguère, où l’on est en train de mettre en œuvre la Grande muraille verte. Les éleveurs de cette localité ne transhument plus depuis deux ans grâce à la disponibilité du fourrage dans les parcelles reboisées.
Des villages du département de Linguère sont libérés de la hantise de l’alimentation du bétail. Mieux, l’éducation des enfants à l’école française est amorcée. Pour la deuxième année consécutive, les élèves du village de Mbar Toubab, bourgade située dans le site du projet de la Grande muraille verte, vont à l’école.
Une seule salle de classe les accueille. Elle est construite il y a 18 ans, renseigne-t-on. Mais n’a jamais servi. Et pour cause, la transhumance était le quotidien des éleveurs du Djolof durant la saison sèche qui coïncide avec l’année scolaire. L’inexistence de l’aliment de bétail et de pâturage poussait au nomadisme.
Ce faisant, on évitait de construire en dur ou de se lancer dans des activités qui exigent un sédentarisme. C’est maintenant possible grâce à la disponibilité du fourrage en période de vaches maigres.
En effet, malgré la faiblesse des pluies dans cette zone du pays, les parcelles clôturées avec du grillage réalisées pour le reboisement des plantes dans le cadre de la Grande muraille laissent croître du pâturage tendre, à l’abri du cheptel errant et des bergers de ruminants.
Mieux, elles sont surveillées par les agents des Eaux et Forêts. «Cela a fait deux ans que je n’ai pas transhumé. Auparavant, j’étais obligé d’aller au Saloum (centre du pays) ou jusqu’à Tambacounda pour nourrir mon troupeau durant toute la saison sèche. Depuis qu’on nous autorise à couper du fourrage dans les parcelles de la Grande muraille, les éleveurs des six villages riverains ne transhument plus», se réjouit Hamet Birame Sow.
Incompréhensions levées
En ce jour de marché hebdomadaire à Mbar Toubab, ce chef du village de Bély Gawdi Chérif, est venu réitérer le message de ses administrés aux agents des Eaux et forêts. Ces derniers sont suffisamment dotés en rouleaux de barbelés et de grillage grâce au Programme de renforcement et de consolidation des acquis (Prca) financé par les Pays-Bas pour sécuriser d’autres parcelles à reboiser où l’herbe pourra grandir et être protégée jusqu’à maturité.
Un important stock de rouleaux attend d’être utilisé, car il n’y a pas de campagne de reboisement cette année du fait de la rareté des pluies dans la commune rurale de Tessékéré.
Autour de Mbar Toubab, huit parcelles d’une superficie minimale de 250 ha ont vu le jour, et ce depuis 2008, année du premier reboisement de la Grande muraille verte. Il en est presque de même à Tessékéré et à Widou Thingoly.
Le chef du village Hamet Birame Sow d’inviter l’Administration des eaux et forêts à ne ménager aucun effort pour aménager une parcelle près de son village. «Il faut qu’on augmente le nombre des parcelles clôturées. On va créer un comité de gestion pour la surveillance», s’engage-t-il.
Cette disponibilité du fourrage a contribué à lever les incompréhensions entre les éleveurs et les agents des Eaux et Forêts impliqués dans la réalisation de la Grande muraille verte.
«Au début, c’était très difficile, car les populations pensaient qu’on allait leur priver de zones de pâturage pour mettre en œuvre la Grande muraille verte. Elles ne comprenaient pas du tout», avoue le sergent El hadji Goudiaby, agent en service à la station de Mbar Toubab.
Cheptel préservé
Le sous-officier souligne que ce sont les éleveurs eux-mêmes qui viennent maintenant solliciter l’aménagement d’une parcelle à reboiser dans leur village. «Au début, on clôturait des parcelles de 1 000 ha. Mais on les a réduites jusqu’à 250 ha pour faciliter la gestion. Le Prca nous a permis d’être plus opérationnels», assure le sergent Goudiaby. Pour éviter des abus, l’autorisation des services des Eaux et Forêts est requise.
C’est ainsi que le nombre de chargements de charrette de fourrage est déterminée pour chaque demandeur. Les populations créent des comités de gestion.
«Il n’a pas eu de mort du cheptel cette année, malgré un hivernage tardif. L’herbe n’a pas été abondante, mais grâce aux parcelles, on a eu du fourrage. A l’époque, une charrette de fourrage nous coûtait entre 15 mille et 20 mille francs Cfa», salut le chef du village Sow.
La sédentarisation est enclenchée grâce à cette culture fourragère. Une expérience à démultiplier dans les autres villages de la bande sahélienne habitée par des éleveurs contraints au nomadisme pour préserver leurs troupeaux.
Et cela a un effet négatif sur la production nationale de lait et de viande.