LA PRODUCTION AGRICOLE ET L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE EN PÉRIL
EBOLA
La menace Ebola est tout grande pour l’agriculture ouest-africaine, la principale conséquence d’une baisse de la production pouvant être une insécurité alimentaire. La maladie a semé la panique dans le monde rural des pays affectés.
« Les plantations sont stoppées, les fermiers arrêtent de cultiver et quittent leurs terres. Ce sont trois pays (Guinée, Liberia et Sierra Leone) très agricoles dans la production céréalière d’aliments courants, riz, huile de palme, cacao... », confie Clémence Vergne de l’Agence française de développement au figaro.fr.
Selon la Fao, les restrictions sur les déplacements des personnes sont une source d’inquiétude quant à la sécurité alimentaire. L’épidémie compromet les récoltes de maïs, de riz, de sorgho, céréales constituant l’aliment de base en Afrique de l’Ouest.
L’organisation onusienne a volé au secours de 90.000 ménages vulnérables guinéens dont l’approvisionnement alimentaire et les moyens de subsistance sont menacés par l’effet perturbateur de l’épidémie sur l’économie rurale, les activités agricoles et les marchés.
« L'épidémie a déjà réduit le pouvoir d'achat des ménages vulnérables, ce qui signifie moins de nourriture dans leurs assiettes et risques nutritionnels accrus pour les familles qui sont déjà en régime de subsistance.
Flambée des prix alimentaires
La peur et la stigmatisation menacent également de réduire les activités agricoles, compromettant ainsi la sécurité alimentaire », fait savoir le représentant régional de la Fao pour l'Afrique, Bukar Tijani.
Des enquêtes d’évaluation rapide révèlent une situation inquiétante. En Sierra Leone, 47 % des interrogés répondent que l’épidémie a perturbé considérablement leurs activités agricoles. Le document de la Fao indique que dans le comté de Lofa, comité rural le plus touché du Liberia, les prix des produits de base –notamment alimentaires- ont augmenté de 30 à 75 % rien qu’en août
2014. « S'il n'y est pas remédié, l'effet actuel de l'épidémie sur la vie au quotidien pourrait impacter à long terme les moyens d'existence des agriculteurs et l'économie des zones rurales », prévient la Fao.
Inquiétudes sur les exportations
L’exportation de produits peut aussi subir les contrecoups de l’épidémie. La Guinée peine à vendre dans les pays voisins sa célèbre pomme de terre, Belle de Guinée produite dans le Fouta Djalon, à cause d’Ebola. Ce qui a poussé Conakry à envisager maintenant de transformer, localement, la pomme de terre.
« Nous allons transformer, sur place, notre pomme de terre en chips et en purée. On ne va plus rien exporter. Que ça soit les pommes de terre, les fruits, les légumes », avait lancé le président Alpha Condé, dénonçant que le Sénégal ait fermé la frontière avec son pays. Aujourd’hui, des risques planent également sur le cacao, 70 % de la production de cette matière première étant assurée par des pays d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire et Ghana, respectivement premier et deuxième producteurs mondiaux).
En fin septembre, les cours mondiaux du cacao avaient flambé de 10 %, renouant avec leur niveau de 2011 (expliqué par la guerre en Côte d’Ivoire à l’époque), avant de descendre.
Cette fébrilité des cours de la fève brune est expliquée, selon Christopher Dembik, économiste chez Saxo banque, par « une vraie psychose auto-entretenue, alimentée par la médiatisation de la maladie », les investisseurs craignant que le virus ne touche la Côte d’Ivoire, pays frontalier avec le Liberia et la Guinée.
La migration des travailleurs des plantations, qui se trouvent dans des zones forestières, reste un facteur de propagation du virus, estime l’économiste.