LE NEVEU DIT N’AVOIR DÉTOURNÉ QUE… 100 MILLIONS
CONDAMNÉ A SIX MOIS FERME ET À PAYER 230 MILLIONS À SON ONCLE
Condamné à une peine ferme de six mois assortie du paiement de 230 millions constituant les dommages et intérêts fixés par le juge d’instance, El Hadj Sidiya Tandian a fait appel sur les intérêts civils, estimant n’avoir détourné que 100 millions dans l’entreprise de son oncle. Cependant, il risque gros car l’avocat général qui a jugé la peine d’instance «trop clémente » a requis la confirmation du premier jugement, à défaut de l’aggravation de la peine à un an ferme. Délibéré le 6 mai prochain.
El Hadj Sidiya Tandian a du cran à revendre. Condamné par le juge d’instance à six mois ferme pour abus de confiance portant sur plus de 200 millions et à payer des dommages et intérêts chiffrés à 230 millions à son oncle El Hadj Khaoussou Dramé, le neveu et mis en cause a relevé appel sur les intérêts civils. En fait, l’appelant ne conteste pas les faits, seulement, mais accuse son oncle d’avoir fait une surfacturation concernant le montant détourné.
Aussi a-t-il évalué le préjudice causé à son oncle à 100 millions francs Cfa. A sa suite, ses conseils ont également dénoncé l’absence de traçabilité des montants réclamés par le plaignant qu’ils accusent d’avoir fait un montage financier unilatéral. Cependant, outre cet appel du prévenu, le parquet a fait un appel incident et à ce titre, l’avocat général n’a pas manqué de faire ses observations.
En effet, devant la gravité des faits, le représentant du parquet général s’est offusqué de la décision d’instance. «C’est une peine légère, trop clémente pour des faits aussi graves», a dénoncé l’avocat général qui a requis une peine ferme d’un an et à défaut, la confirmation du premier jugement ; avant de se rapporter concernant les intérêts civils.
Dans cette affaire d’abus de confiance, le prévenu, par ailleurs neveu du plaignant, ne lui a pas renvoyé l’ascenseur. Alors qu’il était au chômage, renvoyé de la société de transport Dakar-Dem-Dikk, il a été réinséré dans le circuit professionnel par son oncle El Hadj Khaoussou Dramé qui tient un bureau de change en France. C’est ainsi qu’il a confié le bureau de Dakar à son neveu en lui payant un salaire de 200.000 F Cfa, une prime de 600.000 F Cfa ainsi que d’autres avantages. En sus, pour permettre à son neveu de mener à bien ses activités, il lui a alloué en 2011 un fonds de roulement de 150 millions, attesté par deux chèques de 100 et 50 millions, envoyés dans un intervalle de deux jours.
Cependant, devant ces rentrées d’argent considérables, le mis en cause a confondu la caisse de l’entreprise avec sa poche. A en croire Me El Hadj Diouf, conseil du plaignant, El Hadj Sidiya Tandian faisait la pluie et le beau temps avec l’argent de son oncle. «Il a acquis trois véhicules, une maison, des terrains et s’est hissé au rang de ministre et fréquente désormais de hautes personnalités à qui, il prête de l’argent : 10 millions à un ministre et 15 millions à un directeur de société», constate amer Me Diouf qui dit en conclusion que son client est «mort», assassiné par son neveu.
Pourtant, estime Me Diouf, le prévenu avant de mener la belle vie avec l’argent de son client s’est attaché les services d’un charlatan qu’il a payé à hauteur de 40 millions pour, dit-il, fermer la bouche de son oncle. Toujours est-il que l’affaire a fini par s’ébruiter et le plaignant, après trente ans de dur labeur, n’a pu s’empêcher de fondre en larmes, revenant sur le comportement délictuel de son neveu.
Révolté par ce qu’il appelle «une trahison», Me Diouf a plaidé la confirmation du jugement d’instance. Par ailleurs, l’avocat n’a pas raté le prévenu et les mots pour qualifier la démarche de celui-ci ont volé tout bas. Délibéré le 6 mai prochain.