LE QUINTET IVOIRIEN
Ils étaient cinquante-neuf au départ. Ils ne sont plus que cinq à postuler pour le banc des "Eléphants".
Prenez la liste d’origine et mettez les noms des postulants dans Google. C’est à se demander pour qui se prennent certains à vouloir oser prendre les destinées des champions d’Afrique.
Ici ou là, on tombe sur d’anciens footballeurs, dont la carrière d’entraineur a été un échec lamentable. Pour d’autres, on se demande s’ils ont été des perchistes ou des joueurs de water-polo. On rigole même en tombant sur un Libanais (avec toutes les excuses du monde).
Pour tamiser ce bel aréopage et en "short lister" cinq élus, les fédéraux ivoiriens n’ont pas dû se triturer les méninges. Même pas besoin d’un peigne fin. Ils y sont allés au râteau.
Ce que la presse française enseigne (avec perfidie), c’est que Raymond Domenech n’a pas échappé à la voiture poubelle. Au même titre que Giovanni Trapattoni, d’ailleurs. Le fantôme de Knysna passe avec ses clochettes. Mutique avec la presse, sombre de caractère, la plaisanterie lourde, l’ami Raymond n’apporte guère confiance. Mieux valait passer au suivant… pour tomber sur Il Trap.
On se demande aussi ce que les Ivoiriens feraient avec un "vieillard" de 76 ans comme entraineur. Sa tête vous sortirait-elle les formules footballistiques les plus éblouissantes, il faut se méfier des mémoires qui fuitent. Quand on entraine depuis 1972, qu’on a dirigé le Milan Ac dès 1974, assistant au désarmement du "béton" italien, à l’affirmation du football total avec l’Ajax et à toutes les révolutions-évolutions qui ont eu lieu sur le gazon, on a assez à raconter les soirs d’hiver que d’aller collecter des histoires de maquis aux bords de la lagune.
Cela dit, le cahier des charges dessiné par les Ivoiriens renseigne sur qui ils cherchent. Et à quoi peut ressembler l’heureux élu la décision finale.
D’abord, pour diriger les "Eléphants", il faut "être titulaire d'un diplôme d'entraîneur de haut niveau". A quoi cela se juge ? Aux diplômes ? Au parcours ? Ou les deux à la fois ? Il faut ensuite témoigner d’"une bonne expérience internationale". Combien de Can, mon vieux ? Combien de matches et contre qui ?
Par ailleurs, toujours dans les critères, il n’est pas question de débarquer à Abidjan pour préparer et jouer un match, et ensuite retourner en métropole pour courir les studios radios et télés parisiens à "piger" comme un damné. Il faut donc "être disposé à résider en Côte d'Ivoire pendant la durée du contrat".
Autre critère pour le vainqueur, les Ivoiriens ont besoin d’un Blanc bien "boucané". Pas du genre à se taper une dysenterie la première fois qu’il passe au robinet. Ils veulent quelqu’un qui s’amuse avec les anophèles et ne s’enfuie pas au premier lézard rencontré, qui le salue de la tête. Les Ivoiriens cherchent un coach ayant donc "une grande capacité d'adaptation". Et pour bien faire, afin d’éviter le blindage absolu du technicien qui vit replié sur lui-même, qui fuient son ombre, ne rendant compte que dans les rapports et au moment des points de presse, il leur faut aussi un homme ayant "une aptitude au travail en équipe".
Last but not least and of course, le "parler français" est une exigence fondamentale. Comme si les Français avaient inventé le football, jouaient le meilleur football au monde ou offraient la caste des meilleurs entraineurs au monde… De quoi se demander ce qu’ils auraient fait, les Ivoiriens, si Mourinho s’était offert à eux pour le Smig.
Question à mille balles : Où est-ce que Domenech a pu être recalé dans tout cela ? Ils ne sont vraiment pas sérieux, ces Ivoiriens ! On en est aux préliminaires et ça sent la magouille…
Qu’importe : les cinq élus de la première phase s’appellent Patrice Neveu, Paulo Duarte, Michel Dussuyer, Henry Kasperczak et Frédéric Antonetti. Soit quatre Français et un Portugais. Aucun champion d’Afrique. Le plus capé de la bande, "Kaspi" comme Stades aimait l’appeler, a été demi-finaliste avec le Mali en 2002. Côté adaptation, le bonhomme n’avait pas pu résister, quand le vestiaires sénégalais avait pris de la température et que les gros mots avaient commencé à voler lors de la Can-2008.
Pour le reste, l’un a été "roi" en Mauritanie et un autre fort résilient en Guinée. Il en est un qui a récolté 4 victoires et 6 défaites au Gabon ou encore 15 victoires pour 11 défaites au Burkina. Le dernier n’a jamais entrainé en Afrique. Cherchez à donner l’identité qu’il faut à l’homme qu’il faut.
Les techniciens ivoiriens, sachant sans doute ce qui les attendait, n’ont eu qu’un représentant parmi les cinquante-neuf postulants. Ancien entraineur de la Stella d’Abidjan et du Sporting de Gagnoa, Yélato Silué n’était sans doute présent que pour le principe. Car même si les Ivoiriens doivent leur première Can, en 1992, à un technicien local, la "jurisprudence" locale se trouve entre des mains étrangères.
Présent lui aussi sur la liste, Stephen Keshi ne devait peut-être pas bien parler le français. Et puis, fierté bien ou mal placée, ce n’est pas un Nigérian qui va venir faire son show à Abidjan.
Ce qu’il reste de la liste des cinq n’a pas de quoi faire sauter au plafond. Il y a six ans, on aurait pu cependant en dire de même pour Hervé Renard. Il est sorti du trou avec les Zambiens… Mais on pensait les Ivoiriens bien plus vendables.
Qui qu’il soit cependant, on souhaite du plaisir à l’heureux élu. Devant un football ivoirien mis à mal par le "détournement" des primes de la Can, abattu par les difficultés financières de la Fédé, appelé à faire face à une équipe en transition, etc., il y a à faire.
Mais il aura au moins le plaisir de passer à la banque…