LES RAISONS DE "L'EXIL" À DAKAR
ÉTUDIANTS MAROCAINS À L'UCAD
La Faculté de médecine compte un nombre important d'étudiants marocains. La raison est simple, Dakar est pour eux à la fois une bouée de sauvetage et un cachet supplémentaire de reconnaissance. Avoir une place au pays s'avère difficile et les portes de l'Europe se ferment de plus en plus.
Arrivé à bord d'un scooter, Hamza se dirige d'un pas pressé vers les salles de cours. Cet étudiant en année de thèse est un Marocain venu suivre des études à la Faculté de médecine de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Comme lui, ils sont nombreux ses compatriotes qui se réveillent sous le soleil Dakarois et prennent le chemin de cet espace de formation universitaire. Sur place, il suffit juste de promener le regard sous les arbres et dans les couloirs pour se rendre compte du caractère melting-pot de cette faculté. Les "peaux noires" y côtoient les "peaux blanches" comme nulle part ailleurs dans ce temple du savoir.
Les gens de teint clair sont essentiellement des maghrébins. Mais la grande majorité est originaire du royaume chérifien. Ils sont 676 avec une légère majorité des filles pour l'année universitaire 2013/2014. La faculté de médecine reçoit le gros lot en accueillant les 655 inscrit à l'université. Pour le reste, ils sont 8 à la Fac Science, 6 à l'Ecole supérieure polytechnique, 5 à l'Ecole supérieure d'économie appliquée et un (01) respectivement à Ebad et Fac Droit. Des effectifs possibles grâce à une convention liant les deux pays depuis longtemps.
Le Maroc est pourtant un pays dont la qualité de la médecine est réputée. Il y a même des personnalités sénégalaises qui se soignent au Maroc. Pourquoi alors la monarchie de Mohamed VI envoie-t-elle ses fils à Dakar. En fait, pour les bacheliers marocains qui veulent faire la médecine, Dakar se présente comme une bouée de sauvetage. Si l'on en croit Hamza, le premier choix de chaque prétendant à des études supérieures de médecine c'est la Maroc. Chacun voudrait rester au pays. Mais là, la demande est forte et les places sont très limitées. C'est réservé pratiquement à une minorité, mais pas n'importe laquelle. Il faut avoir une moyenne autour de 15 à 16 sur 20 voire plus pour y avoir droit de cité.
N'étant pas admis au pays, beaucoup optent pour l'Europe. Malheureusement pour eux, les portes du vieux continent se ferment de jour en jour. Il s'y ajoute que les moyens des parents ne permettent pas à tout un chacun de fréquenter des universités qui demandent des moyens colossaux dans ces mégalopoles où le coût de la vie est très élevé. De ce fait, il ne reste que le continent africain. A ce niveau, Dakar bénéficie d'une très bonne image. Sa réputation est sans pareille, surtout dans la région ouest-africaine. "Je n'ai pas eu de place au Maroc. Mes parents voulaient que j'aille en Espagne. Mais là-bas, il fallait changer de langue. Ce qui n'est pas évident. J'ai préféré laisser tomber pour venir à Dakar, vu que le diplôme est très respecté et que la langue est la même", confie Hamza.
Avantage du diplôme sénégalais
Une étudiante en Licence III confirme. "Je n'avais plus le choix. Si je devais faire médecine, il fallait que je vienne à Dakar. Au Maroc, il faut avoir une note très élevée pour être sélectionné. Mes parents n'ont pas de quoi payer mes études en Europe. Or, pour moi, c'était la médecine ou rien", avoue la jeune dame d'une blancheur qui rappelle les habitants des pays scandinaves. Autre avantage de l'Ucad, c'est que son programme n'est pas loin de celui dispensé en France. "J'ai fait des comparaisons entre les programmes, mais c'est presque le même que celui de la France", révèle Hamza qui par ailleurs se félicite beaucoup des contacts quasi permanents que l'apprenant a avec les malades. Autrement un volume important de pratique.
Cette similitude entre les programmes des deux pays fait que le diplôme de l'Ucad bénéficie d'une équivalence de fait avec celui de l'hexagone. Ce qui, dans une profession libérale, est en soit un avantage que l'étudiant marocain ayant étudié à Dakar a sur son compatriote resté au pays, révèle un responsable de la Faculté. En fait, pour qu'un étudiant diplômé au Maroc bénéficie de cette même reconnaissance, il lui faut faire une demande d'équivalence. C'est d'ailleurs pour cette raison que des étudiants, même formés en Europe, viennent à Dakar pour se spécialiser. Ils sont donc de plus en plus nombreux dans la formation post-doctorale. De quoi perpétrer davantage les relations historiques entre le Sénégal et le Maroc.