LES VICTIMES NOURRISENT ENCORE L’ESPOIR QUE JUSTICE SERA FAITE AVEC L’ACTUEL REGIME
12 ANS APRES LE NAUFRAGE DU JOOLA
Les victimes du naufrage du bateau «Le Joola» veulent plus que jamais que les lanternes soient éclairées afin de permettre aux familles éplorées de faire leur deuil. Ce, même plus d’une décennie après le drame maritime. Laissées à elles-mêmes, les victimes ont ainsi rappelé les autorités du pays d’apporter la lumière sur le dossier. C'est ainsi qu'ils ont saisi l'occasion pour fustiger la tournure des événements, au cours d’une conférence-débat, initiée, hier, à Dakar par le lycée français de Dakar. C’était autour du thème : «Catastrophe du «Joola» et développement».
Nombreuses ont été les victimes du drame à prendre part à la rencontre. Parmi eux, l'auteur de l'ouvrage «Souviens-toi du Joola», Patrice Auvrey et Jean Diédhiou, tous deux rescapés ainsi que le Colonel Momar Guèye, écrivain essayiste, entre autres. Lesquels ont saisi l'occasion pour rappeler les autorités de prendre leurs responsabilités sur le dossier.
Jean Diédhiou a estimé que «les familles des victimes ainsi que les rescapés ont été abandonnés au moment des faits et même jusqu'à présent ils continuent de l'être. J'ai espoir avec ce nouveau gouvernement que la justice fasse son travail et que cette affaire soit élucidée une bonne fois pour toutes». Légitimant son cri du coeur, il a estimé qu’en tant que rescapé, ses semblables et lui «n'ont pas le droit de se taire».
Quant à M. Auvrey, il a estimé, pour sa part, que «l'oubli est pour (lui), la pire manière d'en sortir. La mémoire des disparus est nécessaire au respect des vivants, car nous ne pouvons pas prétendre être attentifs à la sécurité de nos proches si nous savons que nous oublions leur existence dès qu'ils seront morts. C'est pourtant ce qui se passe dans le cas du «Le Joola» cela est tellement vrai qu'il devient aveuglant».
De son avis, «c'est ignorer tous les avertissements des nombreuses personnes ayant voulu attirer l'attention sur le mauvais état et la mauvaise gestion du bateau ; c'est laisser les représentants de la collectivité errer dans la méconnaissance des règles et de l'intérêt commun ; et léguer le monopole de l'intervention à des puissants ayant détourné la décision collective de leur mandat, au profit de leur propre intérêt. Allant jusqu'à l'absence de secours aux personnes en danger».
Du nombre de ceux qui réclament encore que la lumière soit faite, M. Auvrey de dénoncer une proposition qui leur a été faite. «Pour recevoir les indemnités, on nous a demandé de signer une décharge, comme quoi on serait dans l'obligation de ne pas porter plainte contre l'Etat. Si les victimes sénégalaises n'ont pas porté plainte parce qu'elles ont été manipulées alors, dans ce cas, il ne devrait pas y avoir de prescription».
Le Colonel Momar Guèye a, quant à lui, assimilé le naufrage à une «destruction massive de vies humaines, un délit indescriptible». D’avis que «les responsabilités sont partagées», il a souligné que «la tragédie relève de l'imprudence exagérée, de la négligence révoltante et de l'indiscipline généralisée. La responsabilité de l'Etat est entière, l'argent qui a été donné ne règle pas le problème».