LETTRE OUVERTE AU PRÉSIDENT MACKY SALL : QUI DOIT TRAVAILLER ?
Monsieur le Président de la République, vous nous demandez de travailler. C’est un constat que vous faites. Je cite Alassane Samba Diop, directeur de la Rfm : le constat que les Sénégalais doivent travailler plus et mieux est fait depuis longtemps.
Cependant, votre constat pose plus de questions qu’il ne donne de réponses. Le lieu du constat est le premier problème : un séminaire politique de vos alliés Benno bokk yaakaar. Vous seriez plus crédible si vous aviez tenu ces propos dans un conseil interministériel, en Conseil des ministres ou dans un séminaire gouvernemental.
Tenir un séminaire avec des centaines de politiciens, pris en charge tout un week-end avec nos maigres deniers dans l’hôtel le plus cher de Dakar, n’est sûrement pas la meilleure façon de donner des leçons aux Sénégalais. Ces propos manquent d’autant plus de crédibilité que ce séminaire est un jeu de dupes envers vos alliés que vous avez snobés pendant la moitié de votre mandat mais que vos résultats aux Locales ont remis au centre du jeu.
Ils ne sont pas dupes, les Ivoiriens disent que «premier gaou n’est pas gaou, c’est deuxième gaou qui est...» On ne les y prendra pas à deux fois et le temps des règlements de comptes arrivera bientôt. Votre ex-allié Moubarack Lô disait de votre Excellence, que vous appeliez au travail mais que vous ne travailliez pas et que vous ne faisiez que de la politique : ce séminaire politique de Bby, après celui de Macky2012, en est la parfaite illustration.
Monsieur le Président, Excellence Macky Sall, vous nous demandez d’arrêter de faire la fête et de nous mettre au travail. Je donne aux lecteurs le lien ci-dessous : http://actunet.sn/video-faut-il- en-rire-macky-chante-danse-et- accuse-les-senegalais-de-fetards.
On vous y voit chanter et faire la fête lors de l’anniversaire de votre parti avec Youssou Ndour et Demba Dia. Lors de cette fête, votre député Cissé Lô a distribué et jeté des liasses de billets sous vos yeux. Cela vous a fait rire vous et la Première dame. Doit on faire ce que vous dites ou ce que vous faites?
Vous savez, il y a ce qui relève de la vie privée des gens et de leur liberté. La dictature commence lorsque l’Etat veut imposer un mode de vie aux masses. Les gens ont la liberté de dépenser leur argent comme ils veulent.
Le seul rôle que l’Etat peut avoir, c’est de vérifier l’origine licite des fonds dépensés et la situation fiscale. Il ne faut pas croire qu’il existe une corrélation négative entre la fête et le développement.
Le Brésil, réputé pour son samba, son football et son festival de Rio, est sur la voie du développement. Ce que vous appelez gaspillage, c’est de la consommation et la consommation est le moteur de la croissance économique. Les fêtes familiales créent des emplois : cuisiniers, laveurs, sécurité, transport, coiffeurs, tailleurs, logistique, etc.
Les loisirs, le tourisme et les industries culturelles sont des leviers importants de la croissance économique. Votre ami Youssou Ndour, le chanteur, n’est-il pas l’un des plus grands créateurs d’emplois de ce pays?
Les dépenses que vous appelez gaspillage procèdent de la liberté individuelle. Ce que nous appelons gaspillage, ce sont les actes que vous posez chaque jour. Au lieu de doubler les indemnités des membres du Cese et doubler le budget de cette institution inutile, nous aurions aimé que cet argent serve à financer les jeunes qui veulent monter leur propre affaire.
Nous appelons gaspillage, les 500 000 francs Cfa donnés aux conjoints de consuls et ambassadeurs alors qu’au même moment vous payez 50 000 francs Cfa aux pauvres agents de l’Agence de sécurité de proximité.
Le gaspillage ce sont les voitures achetées aux députés. Il y a un député qui posait beaucoup de questions orales, celui-là a vu l’Etat du Sénégal lui acheter une 4X4 pajero en 2001, une Hoover en 2007 et une Toyota en 2012. C’est cela que nous appelons du gaspillage. Nous appelons aussi du gaspillage la réfection d’un building à 17 milliards, la construction d’un centre de conférence à 51 milliards.
Vous devriez commencer par donner le bon exemple, en diminuant les fonds politiques. Comment parlez-vous de lutte contre les inégalités sociales alors qu’en neuf mois d’exercice en 2012, vous avez signé des décrets d’avances de 10,5 milliards pour vos fonds politiques. Ces fonds politiques équivalent à une bourse familiale pour 105 000 familles. Monsieur le Président, comme l’a dit Alassane Samba Diop, les constats sont faits.
On attend de vous les actes qui relèvent de votre compétence. Si vous pensez que nous avons trop de jours fériés, supprimez-en. Si vous pensez que les fonctionnaires ne travaillent pas assez, prenez les mesures qu’il faut. Avec vous, nous allons de déception en déception. Quand vous faites des constats et des discours nous applaudissons mais vos actes trahissent vos paroles.
Quand vous avez créé l’Ofnac, nous avons applaudi. Mais quand vous en avez choisi les membres, nous avons compris que ce sera une institution sous contrôle comme la Crei et les autres. La patronne de l’Ofnac est celle qui avait mené l’audit des chantiers de Thiès, chantiers que vous coordonniez à l’époque en tant que ministre de l’Intérieur.
Vous accusiez alors Bara Tall de surfacturations, aujourd’hui vous avez donné instruction à l’Etat du Sénégal de se désister dans sa plainte contre Bara Tall, reconnaissant implicitement le complot et vous nommez à la tête de l’Ofnac celle qui était chargée de rédiger un faux rapport.
Dans cette même institution, vous avez nommé deux hommes de tenue accusés l’un par Cheikhna Keîta d’être mêlé au trafic de drogue dans la police et l’autre par le Colonel Ndao d’être un des corrompus de la gendarmerie. Avez-vous pris des mesures conservatoires ?
Monsieur le président de la République, il y a quelque temps, posant une première pierre à Diamniadio, vous aviez décrété le temps de l’action. Il semble aujourd’hui que le temps de la parole est de retour.
Vous êtes élu et les Sénégalais attendent des actes concrets pour changer leur quotidien. Le temps des séminaires, des coalitions et des débauchages n’est pas le temps du Peuple.
«Naniou ko wakh té dé» : On ne vous pas élu pour que «nga niouy khass. Kou régler sounouy problèmes laniou doon wout».