MACKY À LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU
AXE TOUBA-PALAIS
Macky Sall s’est personnellement engagé à rétablir les ponts avec Touba. Un exercice dont il aurait pu se passer, s’il avait pris le courage de nommer dans son gouvernement un "Monsieur Touba".
Le palais a engagé une bataille féroce pour la reconquête de Touba. Il ne reste plus qu’un peu plus de deux ans pour que le pays en entier replonge dans la fièvre préélectorale. Et Touba ne semble guère aligné sur des positions nettement favorables aux tenants du pouvoir. Loin s’en faut !
Le khalife général des mourides, bien au contraire, a multiplié, ces derniers temps, les actes de générosité en direction de Karim Wade. Les plats qu’il lui a envoyés, alors qu’il continue de faire face à la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), sont une marque d’affection certaine.
Pour un candidat déclaré à la Présidentielle de 2017, il n’y a sûrement pas soutien plus vigoureux. Le fils de l’ancien chef de l’Etat a, en effet, estimé que son sort de "prisonnier politique" est consécutive à son ambition de briguer les suffrages des Sénégalais dans deux ans et demi.
Certes, le khalife général a dans la même foulée offert au président de la République Macky Sall un boubou déballé devant les caméras de la télévision nationale, histoire sans doute de montrer que Serigne Sidy Moctar Mbacké est à équidistance de la classe politique.
Mais, les faits sont là : Touba porte en estime Karim. Lui-même qui fait face aux juges pour plus de cent milliards de FCFA dérobés, selon l’accusation. Dans cette ambiance où les lignes sont brouillées, Macky Sall s’est engagé personnellement dans une campagne de séduction de la hiérarchie mouride. Et il ne s’en cache pas !
Le mercredi 24 septembre dernier, le chef de l’Etat a rendu une visite de courtoisie au khalife général des mourides aux Hlm. Une visite émaillée d’incidents qui ont dû mettre le feu à la poitrine des tenants du pouvoir. Le chef a, selon la presse, essuyé des huées obligeant Serigne Bara Maty Lèye, fils du guide de la communauté mouride, à sortir de ses gonds.
"Si une aussi importante personnalité comme le président de la République, Macky Sall, fait un déplacement en direction du représentant de Serigne Touba sur terre, il est inacceptable que de telles dérives viennent souiller la beauté de cette démarche", s’indignait le fils du khalife dans "Grand Place".
Selon lui, ceux qui ont hué le chef de l’Etat ne font pas partie de la communauté de Serigne Touba et n’en feront jamais partie. "Nous talibés, nous devons faire une introspection pour un retour aux principes du mouridisme, tels que édictés par le fondateur, Khadimou Rassoul", recommandait-il.
Quelques jours après, Macky Sall se rend chez Serigne Bass Abdou Khadre. Raison officielle de la visite du chef de l’Etat ? Présenter ses condoléances au porte-parole du khalife général des mourides à la suite du décès de sa mère. C’est clair, Macky Sall veut rétablir les ponts avec Touba.
Pour y arriver, c’est lui-même qui monte au créneau. Il faut aller vite dans cette opération et surtout multiplier les engagements à satisfaire les doléances de la cité sainte. Que le président de la République lui-même prenne les devants dans cette course contre la montre se comprend. Les lieutenants de Sall à Touba notamment le député Moustapha Cissé Lô n’ont plus la cote à Touba.
Les derniers résultats des Locales ont prouvé que dans tout l’espace mouride, aucun responsable apériste n’est en mesure de drainer des foules. A Touba où la seule liste en compétition portait les couleurs du pouvoir, ce sont les bulletins blancs qui sont majoritaires. A Bambey, Diourbel et Mbacké, la mouvance présidentielle a mordu la poussière.
Pourtant, Macky Sall avait bien l’opportunité de se passer d’un engagement personnel pour ressouder l’axe Touba-Roume. Il aurait suffi de nommer un "Monsieur Touba" fortement ancré dans la cité religieuse pour jouer le rôle de courroie de transmission.