MAMADOU RACINE BATHILY, ANCIEN SECRÉTAIRE DE LA FÉDÉRATION DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCES
Les banques peuvent-elles créer des assurances ?
Si vous êtes assuré chez moi, vous me payez de l'argent, parce que le service que je vous promets, c'est de l'argent. Donc, par A+B ça va passer dans une banque, l'institution chargée de conserver les espèces. Il y a quelques-uns de nos parents qui ont de l'argent dans leurs boutiques. Mais même ceux-là ont de plus en plus des comptes. Dans les pays où le système intégré est appliqué, la concurrence est féroce. Les banques créent des assurances, les assurances créent des banques. Nous, on a des secteurs fragiles. Aucun des deux secteurs n'est assez fort. Il faut que chacun essaie d'être fort dans son domaine d'abord.
Le jour où il y a le mélange des deux, ça va produire un phénomène de vase communicant qui se fera à l'avantage du plus fort. Or le plus fort est la banque. Pour vous donner une idée, au Sénégal l'ensemble des sociétés d'assurances ont un chiffre d'affaire de 100 milliards. Or, une banque peut avoir un chiffre d'affaire de plusieurs centaines de milliards. Les tailles sont très différentes. L'assurance est la restauration des valeurs détruites. La garantie se fait à 1 pour 1000 (un pour mille). Tandis que dans les banques, c'est les 100% du capital qu'il faut. Si vous voulez une maison de 30 millions, vous payez 30 millions. Mais l'assurance est de 1 pour 1000.
Les Marocains ont-ils tenté la même expérience ailleurs ?
Ils l'ont essayé ailleurs avec la même stratégie du cheval de Troie. Le fond du problème est que le royaume a une stratégie de présence qui déroule depuis 20 ans grâce à son fonds souverain. A notre connaissance, avec la même banque, ils ont tenté de s'implanter au Mali il y a moins de 5 ans. Là, la commission bancaire a refusé en disant, quand vous êtes une banque, vous ne pouvez pas exercer dans le même pays une autre activité qui n'est pas l'activité bancaire. C'est ce que nous demandons. Il ne faut pas qu'un artifice de groupe à l'étranger permette à un même groupe de posséder sur un même territoire une activité bancaire et une activité d'assurance.
Vous avez peur que l'expérience marocaine fasse tâche d'huile ?
Plusieurs projets sont là à attendre que ça aboutisse. Le jour où les gens se rendront compte qu'il y a une source de profits en combinant les deux, ils ne vont pas s'en priver. A la longue, ça ne concerne pas seulement les Marocains, mais l'ensemble du secteur de l'assurance, parce qu'il y a d'autres sociétés étrangères qui pourraient être tentées par l'expérience.
* La première partie de l'ITW a été publiée dans l'édition du lundi 18 mai