PAR-DELÀ ÉBOLA
Conakry refuse d’autoriser l’atterrissage de l’avion en provenance de Dakar et transportant Mamadou Diallo, le jeune guéri du virus au Sénégal - Il est rentré en Guinée par la route
Ce fut un voyage mouvementé pour Mamadou A. Diallo, le jeune Guinéen guéri du virus Ébola et embarqué vendredi dernier à bord d’un vol militaire spécial en direction de la Guinée. Conakry a en effet refusé l’atterrissage de l’avion sénégalais, poussant l’équipage à atterrir à l’aérodrome de Kédougou. C’est à partir de cette région sénégalaise que Diallo a regagné son pays via la route.
L’axe Conakry-Dakar ne respire pas la bonne entente. La preuve par ce qui s’est passé lors du retour du jeune Mamadou A. Diallo, guéri de la fièvre à virus Ébola au Sénégal. Vendredi dernier, alors que Dakar croyait bien faire, en affrétant un vol spécial de l’Armée, pour le retour de Diallo, Conakry l’attendait de pied ferme.
En effet, l’avion militaire n’a pas pu se poser à l’aéroport de Conakry, parce que n’ayant pas obtenu une autorisation d’atterrissage. L’avion en question a longuement tournoyé dans le ciel guinéen, sans jamais obtenir de feu vert.
C’est de guerre lasse que l’équipage s’est résolu à se poser à l’aérodrome de Kédougou. Le jeune Mamadou Aliou Diallo est finalement rentré chez lui par la route à partir de la région de Kédougou.
Une attitude assez illustrative des frustrations guinéennes nées entre autres, de la gestion de l’affaire Mamadou A. Diallo. En effet, à plusieurs reprises, la presse guinéenne avait fait échos des condamnations de Conakry à propos de la décision sénégalaise de fermer ses frontières avec la Guinée.
L’axe Dakar-Conakry se détériore
Les autorités guinéennes, Alpha Condé en premier, ont multiplié les sorties acerbes contre le Sénégal et s’étaient même plaintes auprès de la Cedeao. C’est au plus fort des attaques guinéennes que le ministre des Affaires étrangères du Sénégal avait brisé le silence, en rassurant que le Président guinéen n’a jamais dit que son pays n’avait pas été informé de la fermeture des frontières, mais qu’il ne comprenait pas cette décision du Sénégal.
Mankeur Ndiaye expliquait : "On les (les Guinéen) a informés. C’est moi-même qui ai informé le ministre guinéen des Affaires étrangères, on était ensemble à Yamoussoukro, au sommet de la Cedeao. Quand le Président Macky Sall prenait la décision, il était à Yamoussoukro. Et avant même que la mesure ne soit connue au Sénégal, il m’a demandé d’informer les Guinéens."
Le chef de la diplomatie sénégalaise, qui tenait ces propos dans le journal EnQuête, poursuivait en ces termes : "On ne s’est pas contenté de fermer les frontières, on a envoyé une équipe médicale à Conakry, ceux de l’Institut Pasteur sont là-bas et les assistent. Le ministre de la Santé est en conversation quotidienne avec son homologue guinéen pour discuter du type d‘appui qu’on peut leur apporter."
Mais malgré tous ces "efforts", la Guinée elle, semble toujours garder une dent contre le Sénégal. D’autres interlocuteurs très au fait des relations entre les deux pays rappelleront même l’épisode des 10 milliards de francs Cfa de la Banque centrale guinéenne, qui ont transité par l’aéroport de Dakar à destination de Dubaï, pour expliquer la décision de Conakry de ne pas autoriser l’atterrissage de l’avion militaire sénégalais.
En fin de compte, seul Condé peut dire avec exactitude ce qui l’oppose au Sénégal, pour adopter de telles attitudes envers un voisin, qui s’est toujours montré accueillant et disponible.
A Conakry de comprendre Dakar
Le jeune malade guinéen guéri d’Ébola n’est pas rentré dans son pays comme le souhaitaient les autorités. Conakry, toujours en colère contre Dakar, le lui a exprimé encore à travers son refus de voir l’avion militaire transportant Mamadou Aliou Diallo atterrir sur le tarmac de l’aéroport de la capitale guinéenne. Certainement après avoir donné son feu vert pour un retour au bercail du jeune étudiant.
A la guerre comme à la guerre et œil pour œil, dent pour dent ont voulu dire Alpha Condé et ses collaborateurs à Macky Sall. Une fermeture de ses frontières avec Conakry a valu à Dakar cette vengeance guinéenne digne d’une autre époque.
Cette décision revancharde de la Guinée peut susciter l’interrogation suivante : doit-on sacrifier des relations fraternelles qui remontent à longtemps, du fait seulement du virus à fièvre hémorragique Ébola ?
Plus de compréhension de la part de Conakry est attendue par Dakar, afin que ce bel axe que beaucoup de facteurs positifs ont consolidé cesse de se détériorer.