SAUVER LE PDS, PRÉSERVER LE SÉNÉGAL
Le Parti démocratique sénégalais (PDS) doit se pencher sur le cas Abdoulaye Wade. Celui qui est qualifié de seule constante du PDS est un homme qui amuse désormais la galerie et déstabilise son parti en menaçant de mettre le pays à feu et à sang, parce que son fils doit rendre des comptes comme tout citoyen qui a été aux affaires.
La redondance de notre approche éditoriale ne nous dérange guère car c’est le sort d’une nation qui se joue. Nul ne saurait être au-dessus des lois dans une République. Et le Sénégal fait face à un monstre. Un monstre qui l’a mal gouverné douze années durant et qui l’a mis au bord du précipice. Cet homme s’appelle Abdoulaye Wade.
La reddition des comptes est un enjeu démocratique et nul ne saurait s’y soustraire, fût-il un ex président de la République ou un fils de président de la République. C’est une exigence citoyenne et ceux qui échappent à la Justice n’en sortent que grandis.
Abdoulaye Wade dérange par son autoritarisme qui a des allures dictatoriales. Le "vieux", qualificatif qu’on lui colle depuis plus d’une vingtaine d’années, perpétue sa mainmise sur la structure politique qu’il a créée en 1974. Quarante ans à la tête d’un parti, cela use son homme. Ce ne semble pas être le cas de Wade.
Pour lui, le parti -qui devrait être un instrument propre de rassemblement pour porter les aspirations de citoyens qui veulent améliorer le sort d’un pays- n’est qu’un outil de manipulation et de chantage. Au sein du PDS, Wade est seul aux commandes. Un roitelet qui n’en fait qu’à sa guise.
L’homme qui a atteint le stade suprême de son ambition -être président de la République- n’a pu gérer douze années durant correctement les affaires du pays et se trouve désabusé par le comportement de Macky Sall, l’actuel locataire du Palais de la République qui fut son Premier Ministre et qu’il a formaté.
Il aurait aimé que Macky ait un devoir de reconnaissance en le préservant de toutes les poursuites. Que nenni, il se sent exposé et la présence de son fils à la barre du tribunal de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite lui donne de l’urticaire. Aussi Wade menace à tout va. Narcissique et mégalomane, Abdoulaye Wade est capable de tout quand il désire quelque chose.
Sa dernière virulence contre Macky Sall mérite d’être prise au sérieux. En effet, principal opposant sous le régime de Abdou Diouf -on a vécu avec lui la tuerie des policiers, l’affaire Me Sèye et le dossier des armes libyennes- son nom est associé aux heures les plus sombres de l’histoire du Sénégal.
Après avoir perdu le pouvoir, Abdoulaye Wade aurait dû avoir la sagesse et la décence de se retirer du champ politique pour couler des jours heureux. Mais Wade adore le jeu de quilles. Son esprit machiavélique l’entraîne à vouloir toujours être le maître du jeu.
Malheureusement, à plus de 90 berges, l’homme dérive et déraille quand il veut solder ses comptes. Son acharnement à vouloir faire libérer Karim Wade son fils brouille toutes ses lectures et à cela s’ajoute son manque de lucidité, signe inéluctable de sa déchéance mentale. Ses proches, sous le prétexte qu’il doit défendre son fils, le laissent faire.
Abdoulaye Wade a pris date la semaine dernière avec Macky Sall, à une semaine de l’ouverture du sommet de la Francophonie qui se tiendra les 28 et 29 novembre à Dakar. Un rendez-vous qui sera suivi du forum économique, le premier du genre organisé dans le cadre de la Francophonie. Les forces de l’ordre sauront certainement encadrer la ou les manifestations qui seront organisées par Abdoulaye Wade et son parti, à moins que l’autorité n’interdise l’envahissement des artères de Dakar ou un quelconque meeting.
Wade rêve de mobiliser à l’image du grand rassemblement qu’il avait réussi lors de son retour à Dakar. Sa machine risque d’être grippée par le refus de certains de ses alliés qui refusent de suivre son appel à libérer Karim son fils. Cette agitation anti républicaine pourrait ne plus prospérer car, de plus en plus, des voix s’élèvent pour l’inviter à savoir raison garder.
Cette posture qu’il a prise d’être un opposant pur et dur au régime de Macky Sall s’accommode mal de sa stature d’ancien président de la République. C’est à ce titre qu’il bénéficie des largesses de la République en étant nourri, logé et blanchi. Wade doit à ce titre arrêter de défier l’Etat. C’est la décence qui l’exige, au-delà des appels qu’il reçoit de tous bords, de la part des médiateurs qui veulent préserver la paix sociale.
Au même moment au sein du PDS, nombre de dirigeants rêvent de déposer Wade. L’affaire Arcelor Mittal qu’il a soulevée dernièrement en accusant Macky Sall d’avoir reçu des pots-de-vin a mis à nu ses errements. "Wade est devenu sénile !", a lâché le ministre Aly Ngouille Ndiaye. Ce n’est pas une boutade. Pape Samba Mboup, l’un des plus fidèles compagnons de l’ancien chef de l’Etat, l’a vigoureusement interpellé en lui demandant de se réveiller.
Cette dormance aiguise l’appétit des successeurs non désignés -c’est le casse-tête au son du PDS- qui espèrent être les heureux élus, alors que dans l’agenda de Wade seul son fils est assez beau pour hériter du parti.La forte prédominance du vieux dans son parti n’a pas empêché des frondes de taille avec les départs de Idrissa Seck, Abdoulaye Baldé qui ont créé leurs partis ; ou la mise en place de mouvements (Aïda Mbodj et Babacar Gaye). Le mode de gouvernance de Me Abdoulaye Wade a été souvent décrié.
Une dictature éclairée que Ousmane Ngom avait dénoncée en 1998 en claquant la porte du PDS. Arrivé au pouvoir, Abdoulaye Wade a su le faire entrer dans les rangs. La gestion trouble du pays de 2000 à 2012 qui est illustrée à travers le procès de son fils Karim Wade à qui il avait confié une bonne partie de son pouvoir et qu’il choyait en lui donnant des centaines de millions de Fcfa, selon les témoins qui sont passés à la barre du tribunal, est un indicateur suffisant sur la manière d’être et de vivre de Abdoulaye Wade. Un infatué qu’il s’agit de remettre à sa place. L’exercice ne sera pas aisé et pourtant il faudra que quelqu’un s’y colle au sein du PDS pour République.