UN ANCIEN NDONGO «DAARA» DEVENU ARTISTE REGGAEMAN
MAMADOU DIOP ALIAS MAME-J RASSOUL
Son nom d’artiste est Mame-J Rassoul, mais ses parents l’ont baptisé Mamadou Diop. Natif de la Petite Côte, il demeure à Nianing, distant de 10 Km de Mbour, sur la route de Joal. Et comme tout jeune piqué par le virus du rap, il s’est lancé à fond dans le mouvement hip-hop. Ce, avec son ancien groupe «Ndongo-yii». C’était en 1997.
Taille moyenne, teint noir, un visage ovale ceinturé par une barbe soigneusement taillée, ressemblant à un talibé Baye, un sourire jovial laissant transparaître sa belle denture, cet ancien «Ndongo daara» est artiste, auteur, compositeur qui évolue actuellement à 100% dans le registre reggae. En jeans et tee-shirt noir, avec des cheveux cachant mal ses dreadlocks, un chapelet marron autour du cou, ce «Baye Fall» est venu nous rendre visite.
Faisant la genèse de sa carrière, il confie qu’au moment où il a démarré sa carrière, il considère ce style musical qu’est le rap comme une musique de contestation, de dénonciation. C’était donc pour lui un moyen de dénoncer les bradages fonciers sur la Petite Côte. «Parce que, note l’artiste, notre localité est un site touristique. Nous, natifs de la zone n’avions même pas le droit de nous promener sur notre propre plage, à plus forte raison d’aller pêcher des poissons. La cause, les touristes se bronzaient, on ne doit pas les déranger. C’est injuste et nous avons commencé à coucher des textes, à prendre le micro pour dire non, pour dénoncer. Pire encore, nos terres ont été bazardées», lâche-t-il.
Après avoir exploré le rap de fond en comble, maintenant Mame-J Rassoul fait du reggae. «C’est une musique de maturité, de partage, d’humilité, d’amour, une musique spirituelle par rapport à ce que je suis en train de vivre. Pour moi, la spiritualité est le début de toute chose. C’est aussi une musique qui nécessite beaucoup de recherches», explique-t-il.
La carrière de ce jeune artiste a réellement commencé en 2000. En 2004, il sort son premier album avec son ancien groupe «Ndongo-yii». En 2008, il a voulu sortir le second album, mais les autres membres du groupe ont décidé de faire chacun leur propre chemin. Après un temps de recul, l’artiste sort finalement son premier album solo en 2012 sous le titre «Akhirouzaman».
Actuellement, il prépare un album solo de 10 titres qui sera intitulé «La Lettre du continent», dont le titre phare sera «Mbi féé» (je t’aime) en bambara. La vidéo originale a d’ailleurs été tournée aux îles du Saloum et est déjà disponible. L’album sera sur le marché en 2016 et il indique que tous les titres seront accompagnés d’un projet.
Un album qui porte des projets
«Nous avons démarré avec le single ‘Baye Fall’, en octroyant à des postes et des cases de santé quelques cartons d’eau de javel dans les localités de Pointe Sarène, Mballing, Warang, Gagnant et Mbour. Pour le second single, c’est le projet d'une école des poubelles qu’on a initié. Et actualité oblige, étant aussi un enfant de ‘daara’, dans l’album à venir, il y a un son dédié aux talibés intitulé ‘Talibés de rue’, où le projet est un talibé une paire de chaussure».
«En tant qu’artiste et talibé - car moi-même j’ai fait le ‘daara’ à Touba pendant des années, ce qui m’a retardé pour faire l’école française - nous avons dénoncé, nous avons manifesté, nous avons critiqué ce qui se passe avec les talibés. Or, nous avons tous notre part de responsabilité. Les parents n’ont pas le droit d’amener les enfants dans les ‘daaras’ et les laisser à la merci du marabout. Pour certains marabouts, il n’est aucunement dit dans un verset du Coran qu’ils doivent envoyer les enfants à mendier ou à errer dans les rues. L’Etat aussi doit réguler, idem pour la société. Car c’est nous qui donnons de l’aumône à tout bout de champ», analyse-t-il.
En outre, pour booster la musique au Sénégal, Mame-J Rassoul fait savoir qu’il faut arrêter le mimétisme, faire une bonne musique avec nos propres instruments.