"UN GALIMATIAS JURIDIQUE"
AÏSSATA TALL SALL À PROPOS DE LA LOI MODIFIANT LE RÈGLEMENT INTÉRIEUR DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Aïssata Tall Sall a rejeté la loi modifiant le règlement intérieur de l'Assemblée nationale, adoptée ce lundi par les députés. La maire socialiste de Podor assimile le texte à un "galimatias juridique".
Dans les rangs de la majorité, elle préfère s'aligner parmi les exceptions. À l'instar des rares députés de Benno bokk yaakaar ayant voté contre la proposition de loi issue de leur rang et modifiant le règlement intérieur de l'Assemblée nationale, Aïssata Tall Sall a rejeté le texte adopté hier par la presque totalité des parlementaires (142 pour, 4 contre et 4 abstentions). "Cette loi est juridiquement indéfendable, politiquement injustifiable et historiquement insoutenable", a martelé la maire de Podor lors de son intervention face à ses pairs et aux membres du gouvernement présents dans l'hémicycle. Des éléments de langage qu'elle a repris lors de sa conférence presse, tenue en marge du vote de la loi controversée.
Pour pousser les autres députés à barrer la route à la proposition de loi en question, la responsable socialiste a jeté un coup d'œil dans le rétroviseur du parlement sénégalais. Elle dit : "L'histoire a toujours retenu que cette assemblée était plurielle. C'est pour cela que je demandais à mes collègues d'être les dignes héritiers d'illustres précurseurs dont Me Lamine Guèye, Daouda Sow, Amadou Cissé Dia, entre autres, pour que nous puissions maintenir ce flambeau de la diversité et de la pluralité politique de cette assemblée et ne pas en faire une assemblée monocolore."
Aïssata Tall Sall, très en verve, de poursuivre : "Nous ne pouvons pas être dans l'expression démocratique la plus élaborée au sein de l'Assemblée et dire qu'aucun autre son de cloche ne sera entendu. Cela ne peut pas être dans un pays de grande démocratie, de vieille et de longue tradition démocratique comme le Sénégal."
ATTEINTE À LA LIBERTÉ DU DÉPUTÉ
C'est que la maire de Podor considère la loi modifiant le règlement intérieur de l'Assemblée nationale comme la preuve d'une volonté d'empêcher l'expression de tout point de vue contraire à celui de la majorité. Certes elle ramène le mandat du président de l'institution à 5 ans. Cette disposition ne souffre d'aucune réserve ; l'ensemble des acteurs politique la considérant comme la réparation d'une injustice instaurée en 2008, avec la loi Sada Ndiaye, juste pour liquider un adversaire politique, en l'occurrence Macky Sall, alors au perchoir.
Par contre, les dispositions de la même loi portant à 15 députés le minimum pour former un groupe parlementaire et empêchant à tout député démissionnaire d'un groupe de s'affilier à un autre ou d'en constituer un nouveau sont considérées comme attentatoires à la liberté du parlementaire. Aïssata Tall Sall juge ces règles inacceptables et, surtout, non fondées juridiquement.
Elle explique : "Ceux qui ont conçu la loi mettent en parallèle, comme s'ils faisaient un exercice de droit comparé, la possibilité de former un groupe parlementaire et le fait que l'on soit 15 députés pour attaquer une loi en inconstitutionnalité et autant pour aller en motion de censure. Bon sang ! Pour attaquer une loi en inconstitutionnalité, il s'agit de l'exercice d'un droit exceptionnel grave, complexe et sérieux. Pour faire une motion de censure, il s'agit là aussi de la jouissance d'un droit grave et sérieux. Peut-on comparer ces dispositions exceptionnelles avec une loi simple qui concède au député son droit le plus commun, son droit le plus naturel, celui de pouvoir se constituer en groupe parlementaire ?"
La réponse coule de source pour elle, c'est non. D'où sa sentence : l'exposé des motifs de la proposition de loi modifiant le règlement intérieur de l'Assemblée nationale, relève du "galimatias juridique". La maire de Podor de poursuivre : "On devrait avoir honte de présenter un tel exposé des motifs devant une Assemblée nationale telle que la nôtre, qui siège depuis qu'elle est Assemblée territoriale avec une logue histoire derrière elle. Une assemblée héritière et dépositaire de cette tradition de bonnes lois et de lois justes. Nous ne devons pas nous inspirer de ces lois-là. Nous devons au contraire écarter ces types de lois de notre histoire juridique et parlementaire et faire de telle sorte que cette Assemblée aille de l'avant. C'est pour ça que nous sommes des députés et c'est pour ça que le peuple veut de la rupture et c'est aussi pourquoi je ne voterai pas cette loi."
"LE PS EST LIBRE"
En fermant le ban, Aïssata Tall Sall n'a pas manqué de répondre aux membres de l'Apr qui, ces derniers temps, brocardent le PS, coupable, selon eux, de déloyauté vis-à-vis de Macky Sall. Ces Apéristes goûtent pas la décision des Verts de présenter un candidat lors de la prochaine présidentielle. "Le Parti socialiste est un parti libre et souverain, s'exclame la député socialiste. Dans chaque circonstance politique, il apprécie sa position de par d'abord l'intérêt du Sénégal ensuite de par ses propres intérêts. Nous avions décidé de soutenir Macky Sall- à sa demande. J'insiste parce qu'ils étaient deux au second tour et nous avions délibéré dans nos plus hautes instances de soutenir Macky Sall. Le jour où nous déciderions que nous n'avons plus à le soutenir non seulement nous en délibérerons ainsi mais aussi nous le dirons au peuple sénégalais et nous le dirons au président Sall en premier dans le blanc de l'œil parce que nous savons assumer notre responsabilité."