UNE RESPONSABILITÉ PARTAGÉE
Les résultats du premier tour du baccalauréat général 2015 ont commencé à tomber. Mais, les tendances qui se dessinent n’inspirent pas l’optimisme, tant les résultats sont parfois catastrophiques dans plusieurs centres d’examen. Certains ont même enregistré zéro admis au premier tour. Les pires résultats sont enregistrés dans les séries littéraires (L) au point que la presse parle de naufrage collectif des candidats des séries L.
Seuls les séries scientifiques semblent tirer leur épingle du jeu. Une occasion pour d’aucuns d’indexer le ministre de l’Enseignement supérieur qui, dit-on, favorise les scientifiques, oubliant que les candidats au Bac sont des élèves des lycées qui dépendent du ministère de l’Education nationale. Ils ne sont produits de l’Enseignement supérieur que lorsqu’ils obtiennent le sésame.
Mieux, l’option d’encourager les études scientifiques est une décision étatique. Et ce n’est pas la première fois que le Sénégal agit de la sorte. En 1975, le président Senghor l’a fait et en 1981, le Sénégal était à plus de 50 % de scientifiques, expliquait le Pr Mary Teuw Niane, à Saint-Louis, samedi dernier, aux étudiants de l’Ugb.
Cette année encore, sur les 142.096 candidats (soit une hausse de 15,3 % par rapport à l’année dernière), les séries littéraires constituent le gros du lot (113.746 candidats), soit 77,8 % des effectifs, alors que ceux des séries scientifiques ne sont que 28.350, environ 22 %. Le directeur de l’Office du Bac, Babou Diaham, faisant ainsi remarquer que le taux des effectifs des candidats des séries littéraires ne cesse d’augmenter à raison de 1 % par an.
Ce qui fait dire au ministre de l’Enseignement supérieur que les séries scientifiques sont des Bac en « voie de disparition ». En réalité, la responsabilité de ces mauvais résultats est collective. Il y a les enseignants d’abord. Ils sont souvent prompts à indexer le faible niveau des élèves, oubliant que leur mission est de faire en sorte que ces derniers soient meilleurs.
Le bon enseignant, c’est quelqu’un qui arrive à hisser l’élève de faible niveau à celui du bon élève. En plus, comment peut-on avoir des élèves de bon niveau dans un pays où l’on peine à atteindre les 1.000 heures de quantum horaire requis du fait des grèves récurrentes ?
Autant dire que les élèves ont accumulé de multiples insuffisances au fil des années. Dans ce cas, les échecs aux examens ne doivent point surprendre.
Quant aux élèves, malgré les multiples avantages dont ils bénéficient aujourd’hui (électricité, proximité des écoles, cours de renforcement, Internet, transport, répétiteurs à la maison...), ils n’arrivent pas à en tirer profit. Et si ce ne sont pas les enseignants, ce sont eux qui déclenchent les grèves. La responsabilité des parents est tout aussi engagée. Qui parmi eux se rend à l’école pour s’enquérir du niveau de son enfant ?
Qui parmi eux s’occupe de l’encadrement de son enfant à la maison ? Qui répond à l’invitation de l’école pour des réunions portant sur le devenir de l’établissement de leur enfant ?
Enfin, il y a l’Etat. Depuis des années, il n’a cessé de signer des accords qu’il n’arrive pas à respecter, poussant l’autre partie (les syndicats) à toujours se braquer. Conséquence : des grèves répétitives qui bloquent le système.
Il s’y ajoute que de nombreux établissements ne répondent pas aux conditions d’enseignements-apprentissages (écoles non clôturées, sans électricité, sans eau, toilettes non séparées, cycle incomplet, manque de manuels...). De plus, les abris provisoires sont légion dans le pays, même s’il faut reconnaître qu’une véritable politique de résorption est en cours.
Autant dire que l’école n’est pas encore devenue l’affaire de la communauté. Or, tant qu’elle ne le sera pas, le pays ne s’en sortira pas. Il faut espérer qu’après les Assises de l’éducation nationale et de la formation, le Conseil présidentiel annoncé prendra des mesures idoines pour redresser la situation.