‘’MÊME SI NOUS AVONS DES ORIENTATIONS POLITIQUES DIFFÉRENTES, LES RETOMBÉES DU PSE SONT POUR TOUTE LA POPULATION’’
Ibrahima Theo Lam, consultant en développement
Dans un de ses ouvrages consacré au Plan Sénégal émergent (Pse), le consultant en création et développement d’entreprise, Ibrahima Théo Lam, invite les Sénégalais à s’approprier ce programme de développement pour son succès. Il plaide également, dans son second livre sur l’entreprenariat en Afrique, la mise en place d’un fonds privé dédié à l’accompagnement des jeunes porteurs de projets.
Qu’est-ce qui vous a motivé à rédiger le livre « Le Pse : prospective territoriale, opportunités d’auto-emploi pour les femmes et les jeunes », près d’un an et demi après le lancement de ce programme de développement ?
Au moins avec ce plan (le Plan Sénégal émergent), on peut dire que notre pays bénéficie d’une orientation structurée sur le long terme. C’est pourquoi je me suis intéressé à cette documentation sur le Pse. Après une première lecture de ce plan qui m’intéresse autant, je me suis permis de comprendre que cet outil est très bien conçu. C’est là où j’ai eu l’idée d’approfondir mes recherches par apport à ce plan pour partager mon appréciation du Pse.
D’une part, ma motivation pour éditer ce livre, c’est d’expliquer ce plan de manière plus simple pour que le grand public puisse comprendre les enjeux. Je me suis senti intéressé de proposer une orientation méthodologique permettant aux lecteurs d’avoir un aperçu économique sur l’exploitation du Pse.
Le deuxième élément de motivation, c’est que je suis très préoccupé par la question du chômage. Et il existe des niches d’emplois très importantes qui, dans ce programme de développement, peuvent permettre à des femmes et à des jeunes d’améliorer leurs conditions de vie.
En écrivant ce livre, je voulais convaincre ceux-là qui se montrent souvent pessimistes sur la réussite du Pse. Ils pensent que ce plan ne marchera pas en disant que c’est de la théorie. Je veux leur faire comprendre d’abord que pour élaborer une politique de développement, il faut d’abord une phase théorique et de conception.
Dans cette phase, on ne peut pas apprécier négativement un plan, parce que tant qu’on n’est pas dans la mise en œuvre, on ne peut pas dire à l’Etat que sa stratégie pour l’émergence va échouer. Je n’aimerais pas qu’on insiste sur le fait que le Pse va réussir ou échouer.
Si nous sommes écoutés en tant qu’acteur social, économique, chercheur, enseignant, il faut qu’on porte des messages positifs vers les populations. J’adhère à une logique de contribution.
Dans votre ouvrage sur le Pse, vous avez beaucoup insisté sur l’appel citoyen. Quels messages voulez-vous adresser aux autres compatriotes dans la mise en œuvre de ce plan ?
Il s’agit d’un appel citoyen à l’émergence. Je voulais convier les citoyens à l’effort d’identification d’un pays qui émerge. Même si nous avons des orientations politiques différentes, il est important que nous soyons unis et conscients que si le Pse a des retombées, c’est pour toute la population. Nous devons savoir que notre Etat a déjà fait beaucoup pour nous.
L’appel citoyen se résume à une volonté d’unir toutes les couches sociales vers le développement de notre pays à travers cette politique de développement. Si l’on analyse le plan, tout le monde s’y retrouve. C’est un plan pour lequel on a insisté sur les besoins des populations, surtout locales.
Mais qu’est-ce qu’il faut faire, à votre avis, pour que le Pse puisse connaître un succès ?
Les solutions qui figurent dans le Pse répondent aux besoins des populations. En appréciant le plan, je me suis permis de faire l’état des lieux des autres programmes de développement qui existaient. Les Documents de stratégies pour la réduction de la pauvreté (Dsrp), la Stratégie de croissance accélérée (Sca), la Stratégie nationale de développement économique et social (Sndes), visaient l’amélioration de la croissance du pays, mais à court terme.
Ces plans avaient une orientation de régler des problèmes urgents. Cette fois-ci, l’Etat a osé faire une rupture en proposant un plan bien conçu qui est à l’horizon 2035. Il était important de recourir à l’expertise étrangère afin de mieux élaborer le plan.
Cela permettra aussi de convaincre les capitaux étrangers dans la recherche du financement du Pse. Le fait qu’il ait une signature internationale constitue un atout pour attirer les capitaux, cela lui donne plus de crédibilité.
Dans votre second ouvrage sur l’entreprenariat en Afrique, vous mettez en exergue l’équation de l’accès aux financements. Comment appréciez-vous cette situation ?
Les difficultés d’accéder au crédit bancaire classique brident considérablement la volonté des jeunes à se lancer dans une aventure entrepreneuriale. Les freins sont d’abord liés au système bancaire.
Dans les établissements financiers, des garanties solides sont généralement exigées et cela constitue un énorme obstacle pour les jeunes en situation de précarité. Une autre difficulté réside dans le fait qu’il existe peu d’informations sur les dispositifs locaux de financement dédiés aux jeunes porteurs de projets.
Quant aux organismes d’utilité publique, leurs moyens sont limités comparativement aux besoins de financement pour lesquels ils sont sollicités. L’une des conséquences de cette déficience de l’acteur public est que beaucoup de jeunes ayant bénéficié de programmes d’accompagnement à la réalisation d’un projet d’entreprise réussissent, certes, à rédiger le plan d’affaires de leur projet qui, malheureusement, ne trouve pas de financement.
Face à cette situation, quels mécanismes faut-il mettre en place pour surmonter la question de l’accès aux financements ?
Un levier efficace à actionner serait d’inciter les hommes d’affaires et investisseurs africains à mettre en place un fonds privé dédié à l’accompagnement des jeunes porteurs de projets. Il servirait à inciter et encourager les jeunes à créer et à développer des activités créatrices de richesse. Ce fonds doit être encadré par les autorités de chaque pays en fonction des spécificités locales.
Une autre piste pour l’entreprenariat des jeunes consisterait à mettre en place un fonds souverain. Il doit concerner, dans ce cas, une activité à orientation locale (agriculture, service à la personne, transformation des produits de base, pêche... ).
Ce fonds devra être destiné aux microprojets avec un prêt ne dépassant pas deux millions de FCfa et son remboursement pourrait s’établir sur un taux inférieur à 3 %. Il est aussi important de renforcer le suivi des jeunes ayant bénéficié des programmes de formation à la création d’entreprise.
Ils sont formés à la méthode et aux différentes étapes de la création d’entreprise, mais ne sont pas forcément accompagnés dans le développement