‘’NOS GOUVERNANTS DOIVENT FAIRE DE LEUR PRIORITÉ LA FORMATION DE SPÉCIALISTES’’
Dr Karamo Abdina Konté, chirurgien-urologue à l’hôpital Matlaboul Fawzény
La région de Diourbel ne compte que deux urologues qui servent tous les deux à Touba. Ils sont submergés par le nombre important de patients. Trouvé dans son lieu de travail, Dr Karamo Abdina Konté, ancien interne des hôpitaux et seul chirurgien-urologue à l’hôpital Matlaboul Fawzény de Touba, a levé un coin du voile sur ce service mal loti, mais très fréquenté.
Comment vous organisez-vous dans le travail ?
Je dirai que les consultations sont assurées trois fois dans la semaine : lundi, mercredi et vendredi, au matin. Au niveau du bloc opératoire, le service dispose de deux journées opératoires, le mardi et le jeudi. Tous les gestes à ciel ouvert de la chirurgie urologique sont réalisés à l’exception de la prostatectomie radicale (cancer de la prostate) et la pelvectomie antérieure (tumeur de vessie). L’échographie est réservée, elle, le mercredi après-midi. Il s’agit essentiellement de l’échographie de l’arbre urinaire.
Combien de patients recevez-vous par mois ?
En moyenne deux cent par mois. Le mois de juin passé, je suis allé jusqu’à deux cent quarante neuf (249) patients.
D’où viennent le plus souvent vos patients ?
Les patients viennent d’un peu partout : de Diourbel, Saint-Louis, Kaolack, Fatick, Tamba et même de Dakar. Ce qu’il faut souligner, c’est que notre structure est le seul hôpital de niveau 3, se trouvant hors de Dakar. Ce qui lui confère le statut d’hôpital de référence.
Les structures de santé avoisinantes, quand elles sont dépassées, font appel directement à nous. Pour les patients de Dakar, c’est par rapport au coût qu’ils choisissent de se faire prendre en charge à Touba. Nos tarifs sont de loin plus accessibles par rapport aux autres hôpitaux de niveaux 3, comme l’Hôpital général de Grand-Yoff de Dakar par exemple.
Les femmes sont-elles plus nombreuses que les hommes ?
C’est plutôt le contraire. Mais ce n’est pas non plus une spécialité réservée aux personnes âgées. Ce que les gens ne savent pas, c’est que nous recevons beaucoup d’enfants et de femmes aussi.
Quelles sont les périodes d’affluence ?
Le service est plus fréquenté durant la période de fraîcheur, c’est-à-dire du mois de novembre au mois de mars. L’explication par rapport à cet état est liée au fait que la plupart de mes patients sont du troisième âge et il y a une recrudescence de la symptomatologie urinaire durant cette période.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face ?
(Rires). Ici, on est l’homme à tout faire et ce n’est pas l’idéal pour une bonne pratique médicale.
Cependant, nous recevons de temps à autres des stagiaires qui nous épaulent et qui vont rentrer dans leur pays d’origine une fois la formation bouclée. Nous sommes un pays sous développé et le ratio de médecin par patients est loin d’être atteint. Nos gouvernants doivent faire de leur priorité la formation de spécialistes pour une prise en charge efficace et efficiente des problèmes de santé de nos populations.
Qu’est-ce qu’il vous faut comme personnel pour améliorer le service ?
Il faut un service digne de ce nom avec une nouvelle architecture permettant aux différents services chirurgicaux de s’épanouir. Il faut également améliorer le plateau technique, car le service ne dispose pas d’une unité d’exploration et de traitement endoscopique. Ainsi, de nombreux patients sont contre-référés dans d’autres structures, ce qui constitue un manque à gagner pour notre hôpital.
La disponibilité de cette unité endoscopique pourrait contribuer à vulgariser le service à l’échelle nationale voire sous régionale en augmentant de façon considérable le flux de patients. Il faut aussi augmenter les ressources humaines puisque la qualité de la prise en charge ne peut se concevoir que dans un cadre d’échanges fructueux et instructifs entre collègues relevant de la même spécialité.
C’est quoi l’urologie ?
C’est une spécialité médico-chirurgicale avec un champ d’action large. La discipline s’intéresse à ce qu’on appelle le haut-appareil, c’est-à-dire les reins, les uretères, le retro-péritoine et ganglions et le bas-appareil, c’est-à-dire la vessie, la prostate, l’urètre, les organes génitaux masculins chez l’homme, mais également l’appareil reproducteur de la femme.
Comment devient-on urologue ?
Il faut faire d’abord des études médicales sur une durée de 8 ans après le Bac pour être médecin généraliste, par la suite sur une durée de 5 ans pour faire la spécialité chirurgicale.
Vous êtes combien d’urologues au Sénégal et dans la région de Diourbel ?
On est une trentaine au Sénégal, mais la région de Diourbel n’en compte que deux, qui sont à Matlaboul Fawzény et Ndamatou.