‘’TOUTES LES ÉTUDES ONT ÉTÉ FAUSSES’’
Daouda Guèye, ingénieur en industries chimiques à propos de la centrale à charbon de Bargny
Pourquoi soutenez-vous que la centrale à charbon est mal conçue ?
On travaille sur ce projet de centrale à charbon depuis le 6 mars 2008, date du dépôt des termes de référence. Toutes les procédures ont été accomplies mais pas respectées, pour que le projet puisse avoir une autorisation. L’élément essentiel est l’audience publique.
Premièrement, les normes n’ont pas été respectées parce qu’il fallait que les populations soient informées de toutes les démarches pour qu’elles puissent donner leurs avis. Au-delà de leurs inquiétudes, les populations ont montré leur opposition à l’implantation du projet, parce que ceci a été implanté en plein cœur de Bargny.
En aucun cas, on ne peut accepter qu’une centrale puisse être aux flancs d’une ville. La centrale est dans Bargny.
Toutes les études ont été fausses. Dans tous les documents, on n’a pas fait état des lotissements qui existaient sur ce site. Or, avec les changements climatiques, la mer avance à plus d’un mètre par an à Bargny. Des maisons ont été détruites. C’est pourquoi la mairie a fait ce lotissement.
Déjà, pour la stabilisation et les ouvertures de voies, 50 millions de francs Cfa ont été dépensés. Il y a eu des personnes qui ont commencé à construire. Donc, il y a eu un abus important, parce que le Code de l’environnement n’a pas été respecté. Les principes de l’Ifc (International bank corporation), qui est une filiale de la Banque mondiale, n’ont pas été respectés. Les populations affectées n’ont pas été informées. Les mesures, qui permettent d’atténuer les impacts négatifs, n’ont pas été prises.
Il est dit que les femmes de Khelcom vont être appuyées à hauteur de 200 millions de francs Cfa pour moderniser leur travail. Comment des femmes qui vont travailler des produits alimentaires pourront-elles cohabiter avec une centrale à charbon ?
Je ne parlerai même pas des maladies. Comment vont-elles cohabiter avec cette centrale qui va rejeter des produits toxiques comme le mercure et le sélénium ? Cela va créer des cancers, etc. Une augmentation de la fumée à 2 microgrammes va augmenter la mortalité de 12 à 14% sur les malades pulmonaires et cardiovasculaires.
Du point de vue technique, cette centrale peut-elle ne pas affecter la qualité de l’air ?
Pour cette centrale (de la Ces), les calculs ont été faux. Il y a des équations qui permettent de calculer la hauteur des cheminées. La cheminée doit avoir une hauteur de plus de 250 m. Mais ils ont prévu une cheminée de 100 m de hauteur. C’est-à-dire que le rayon de dispersion est de deux kilomètres. C’est-à-dire que la poussière sera dispersée dans Bargny qui s’étend sur 1,5 km.
Cette centrale va générer plus d’un million de tonnes de gaz carbonique. Cela veut dire que cette centrale va contribuer à hauteur de 20 à 30 % du gaz à effet de serre au Sénégal. La norme Ifc dit que si un établissement classé niveau 1 produit plus de 100 mille tonnes de gaz à effet de serre, il faut des mesures alternatives.
En dehors du charbon, il faudrait qu’ils utilisent du gaz, etc., pour atténuer les effets dans le temps. Mais il faut qu’ils disent clairement les mesures alternatives préconisées. C’est ce que la loi dit.