FOCUS SUR LA FORMATION DE 100 JEUNES
MUSIQUE Initiative pour combler le déficit en ressources humaines
Comment faire pour industrialiser la musique sénégalaise ? A cette interrogation, plusieurs voix autorisées répondent en donnant l’exemple des pays qui ont déjà réussi tout en oubliant que les réalités sont différentes. Autrement dit, ce qui marche au Nigeria trouvera-t-il forcément du répondant au Sénégal ? Si cette question reste posée, les acteurs des cultures urbaines préfèrent prendre le taureau par les cornes. En se besant sur leurs expériences, Africultururban, Guédiawaye hip-hop et la Maison des cultures urbaines ont démarré depuis mai 2017, dans le cadre du Forum des cultures urbaines du sud (Focus), des sessions de formation dans les métiers hors scène. L’objectif est de jeter les bases d’une industrialisation tout en se battant contre le radicalisme des jeunes
Le Sénégal fait face à un manque criard de ressources humaines pour les métiers hors scène. Pour pallier ce handicap, l’Africultururban, Guédiawaye hip-hop et la Maison des cultures urbaines ont conjugué leurs efforts pour former 100 jeunes venant de la banlieue dakaroise et des 13 autres régions. Logé dans le Forum des cultures urbaines du sud (Focus), ce projet vise à pallier l’offre de formation dans les métiers hors scène. Ainsi, les jeunes qui ont été recrutés sur un appel à candidatures ont débuté depuis mai 2017 des sessions de formation en vidéo, photographie, entreprenariat culturel et djing.
Financé par la fondation hollandaise Doen, le projet doit durer 2 ans et à une forte présence féminine. Amadou Fall Ba, coordonnateur du Focus, d’expliquer : «On nous reproche souvent dans le hip-hop de trop se concentrer sur les hommes. C’est pourquoi nous avons lancé le projet Jokko fam. Qui est une résidence artistique composée de 2 Sénégalaises, d’une Marocaine, d’une Mauritanienne et d’une Malienne. Elles sont en train de se produire dans les 4 pays qui composent le Focus», a-t-il dit hier lors d’une séance de présentation du projet.
Après la formation, les récipiendaires vont présenter chacun un projet devant un jury en décembre. Le vainqueur aura 500 mille F Cfa pour conduire son projet. Le reste des étudiants formés vont entrer dans une sorte d’incubateur. «On va les épauler pendant 3 mois à distance. On va les introduire dans le circuit technique pour les montrer comment lever des fonds et rédiger des business-plans», a expliqué Amadou Fall Ba.
Pour Fou Malade, cette formation est doublement bénéfique. «L’entreprenariat culturel ne fait pas partie de l’offre de formation. En plus dans les quartiers défavorisés, les parents n’ont pas les moyens de payer le coût de certaines formations. Nous cherchons des fonds pour former ces jeunes issus des quartiers défavorisés ; une manière de prévenir un certain radicalisme. En parallèle, le hiphop a besoin d’entrepreneurs culturels, parce qu’on n’arrive toujours pas à créer une industrie culturelle. Il est important que l’Etat prenne en compte l’existence de nos centres», a souligné Fou Malade.
A défaut de recevoir cette «reconnaissance» de l’Etat, les membres du Forum continuent un tant soi peu de trouver des alternatives et offrir des formations adéquates à la demande. C’est dans cette optique qu’un projet de formation des ingénieurs est à l’étude. «On va accueillir une nouvelle session de formation intitulé Beat lab. L’objectif de cette formation qui aura lieu à la Mcu est d’asseoir un dialogue sur notre identité musicale. La partie technique de cette formation sera assurée par un Américain résidant au Pays-Bas. En 2018, une formation plus poussée en graphisme sera programmée», a informé Amadou Fall Ba.
Pour les élèves trouvés sur place, cette formation est une aubaine. Pour Mme Wasso Tounkana, manager du groupe de rap Gotal, cette session est venue à son heure. «Il est utile dans un pays où la culture est marginalisée de se former enfin de rendre ce métier professionnel. On veut sortir de l’informel et la seule façon de le faire, c’est d’avoir de bons managers. Cela passe forcément par une offre de formation adéquate. C’est pourquoi nous magnifions ces sessions», a-t-elle dit avec assurance.