PETITS COMMERCES DE QUARTIER
Ccomment guinéens et mauritaniens gèrent un marché minimisé par le sénégalais
Les boutiques à Dakar et à travers tout le territoire national sont tenues par des étrangers. Non pas parce que les nationaux ne veulent pas de ce travail mais plutôt parce qu’ils ont essayé et ont échoué dans la gestion durable. Ainsi, le secteur est exclusivement partagé entre peuls de Guinée et maures, deux nationalités étrangères qui ont réussi à installer un système de gestion stricte essentiellement basé sur l’inventaire des produits.
Il est très difficile d’obtenir d’un africain des informations sur la marche de son business. Et c’est justement parce que nous entretenons des relations fraternelles que Sellou et Ousmane ont accepté de se livrer à nos questions sur ce qui fait le succès de leur commerce. A travers ce système, l’on comprend aisément pourquoi les sénégalais ne pourrons « jamais » gérer un commerce de ce genre.
Vivre économe, moteur d’un investissement
« Notre façon à nous de gérer les boutiques repose sur une chaîne de valeurs que respectent à la lettre tous ceux qui font partie du circuit. Il est important de noter aussi qu’une boutique ne doit pas être tenue par le propriétaire lui-même. Même si vous avez une boutique, vous l’a laissez à quelqu’un d’autre pour après tenir la boutique d’autrui. C’est plus efficace. Après c’est un système de relai qui se fait, quelqu’un reste dans une boutique 2 ans, cède la place pour rejoindre un autre quartier. Le gérant d’une boutique loge en même temps dans cet espace même si c’est étroit, cela permet de minimiser les dépenses. Il est aussi important d’avoir une bonne intégration sociale tout en restant fermé sur les emprunts que font le plus souvent les chefs de famille et les filles surtout. Cela apparaît compliqué mais on s’y fait vite», renseigne le sieur Ousmane.
Pour le ravitaillement des produits, Ousmane explique que « c’est à l’appréciation du gérant, c’est lui qui connait la demande et est libre de choisir son fournisseur ».
Un strict inventaire pour déterminer le sérieux du vendeur
Cette version est conforme à celui de Sellou qui lui, parle du système d’inventaire, le maillon sensible de la chaîne.
« L’inventaire, c’est le moment fatidique, redouté des boutiquiers. C’est une reddition des comptes pour voir si on n’a perdu ou si on n’a fait des bénéfices, sur tel ou tel produit. Il y a des personnes qui ont comme tâche de faire l’inventaire des boutiques.
Maintenant, il arrive que le gérant comme le propriétaire amènent chacun son parent de confiance pour procéder ensemble à cela. Même si c’est rare, des conflits peuvent naître de cet inventaire-là. Le principe c’est d’évaluer tous les produits par rapport à leur prix d’achat et leur prix de vente, de constater les bénéfices ou pertes afin de déterminer la part de chacun. Ceux qui font cette tache ont de l’expérience et comprennent, par-là, si le gérant est sérieux ou non. Cela a lieu tous les trois ou six mois. C’est le moment de déterminer si le gérant reste ou doit quitter ce quartier».
Pour Sellou, toute la réussite est due à cette étape : « Quand on sait que d’ici trois mois l’on sera contrôlé, cela permet de mettre du sérieux dans la gestion».
De cette stricte méthode de travail, s’ajoute cette capacité de serrer la ceinture et de ne pas céder à ces nombreux besoins humains. Les peuls et maures sont réputés être de bon économes. Tout le contraire du Sénégalais, qui lui, ne manque pas de prendre des moments de plaisir sur ce qui devrait être son bénéfice, faisant ainsi la perte d’un investissement.