UNE ALTERNATIVE AU PROBLEME VIVRIER DU SENEGAL
REEQUILIBRAGE DES PRODUCTIONS ARACHIDIERES ET VIVRIERES
La malédiction arachidière, fruit du déficit vivrier que connait le Sénégal peut bel et bien être surmontée si le rapport de mission de Roland Portères de 1952, qualifié de ‘’Bible’’ par le gouverneur du Sénégal d’antan est mis en exécution. Lequel rapport recommande des mesures d’aménagement du territoire, de restauration des sols, de promotion de l’agriculture intégrée sérère. C’est ce que soutient Ismaïla Diop, ingénieur agronome, spécialisé en statistiques agricoles, Professeur associé en agroéconomie à l’Ecole supérieure d’agronomie (Esa) de l’université de Lomé (Togo) et consultant à la Fao.
Dans un livre de 216 pages intitulé: «L’agriculture du Sénégal sous la colonisation», Ismaïla Diop, ingénieur agronome et ancien directeur de l’Institut national de développement rural (Ndlr), actuelle Ecole nationale supérieur d’agriculture de Thiès (Ensa) après avoir revisité et interrogé les données statistiques agricoles du Sénégal sous la colonisation, comparativement à celles du Sénégal d’aujourd’hui, s’en désole et préconise les orientations du rapport de la mission Roland Portères de 1952, qualifié de ‘’bible’’ par le gouverneur du Sénégal d’alors.
Lequel rapport recommande entre autres mesures d’aménagement du territoire, de restauration des sols, de promotion de l’agriculture intégrée sérère.
Après le diagnostic de la situation de l’économie agricole du Sénégal, le rapport de Roland Pertères esquisse un avant-projet d’un plan de 30 ans portant sur l’aménagement de l’économie agricole et rurale au Sénégal. Le schéma proposé est établi en partant d’un système de culture (Sc) sur lequel repose deux techniques de production à savoir le système d’agriculture mixte pour les régions du Centre et du Nord et le système motorisé pour les régions du Sine Saloum.
Dans ledit rapport, le relèvement du niveau de vie en milieu rural est le plus important pour le développement du Sénégal.
Dès lors, le rapport souligne avec insistance qu’il est temps de prendre des mesures adéquates pour élever les possibilités de production et de mise en circuit commercial du maximum de produits avant que l’effondrement du milieu rural ne commence.
Sur ce, réoriente le rapport «la politique des unités d’exploitation en culture attelée (Ueca) semble être l’une des plus importantes à établir et à suivre. Ceci permettra d’élever la production, de renforcer les autoconsommations d’exploitation et de sauvegarde du sol pour élever encore les productions, de diminuer sensiblement l’autoconsommation par les exploitations des produits qu’ils obtiennent entre autres». Outre, le rapport indique, du reste qu’ «on ne peut pas entrevoir la possibilité de mécanisation intégrale sans la présence permanente de l’homme blanc avec ses connaissances, sa rapidité d’appréciation et de décision, son organisation, sa rigueur dans le contrôle des chantiers, son sens du rendement du travail, sa volonté toujours tendue pour parvenir à l’objectif assigné».
Toutefois, souligne l’étude «l’axe moteur du rapport est le déficit vivrier permanent qui s’aggrave alors qu’il doit reposer sur une situation conjoncturelle liée à la pénurie d’oléagineux d’après-guerre et au prix bon marché du riz indochinois».
D’où selon le document «l’urgence d’inverser la tendance de cette orientation coloniale. Ce, par le doublement des rendements, la résorption du gap vivrier par la production locale et un autre équilibre arachide/mil». Nonobstant, l’arachide ne doit pas être un moyen d’échange alimentaire, d’autant plus qu’elle est de plus en plus autoconsommée (150 000 T en 1951 dont 80 000 T de semences et 70 000 T pour l’alimentation).
Cette réorientation devrait se traduire par la course aux surfaces d’arachide et le soutien de cette production par les bas cours du riz d’Indonésie débouchent sur l’impossibilité d’augmenter la production vivrière parallèlement à celle de l’arachide et sur la nécessité de diminuer le prix du riz indochinois et des tissus par des artifices incitatifs à l’accroissement de la production arachidière.
En définitive, la restauration de l’économie agricole du Sénégal doit impérativement passer par le remplissage des greniers, la suppression du boulet alimentaire, qu’un esprit politique stupide autant qu’odieux crée avec la suppression des greniers alimentaires. Donc, toute solution doit dès lors passer par un rééquilibrage des productions arachidières et vivrières.