Coupe de France : Stéphane Moulin, bricoleur et un peu magicien à Angers
Sorcier, alchimiste, magicien... Les résultats de l'entraîneur Stéphane Moulin avec Angers, impressionnants malgré des moyens limités, ont quelque chose de surnaturel, mais ils s'expliquent aussi par son travail acharné et sa rigueur extrême.
"Le foot occupe ma vie d'une façon quasiment permanente (...) je veux qu'on vive pour l'équipe". En deux phrases à l'AFP, le technicien de 49 ans a résumé son engagement total envers un club où il termine sa 27e saison.
Hormis un intermède de 15 ans (1990-2005) à Châteauroux et Châtellerault, il a toujours eu le cœur noir et blanc, revenant au bercail en 2006 pour entraîner la réserve.
"J'y prenais beaucoup de plaisir. On n'est pas obligé d'être au plus haut niveau pour prendre du plaisir", raconte-t-il.
À tel point qu'en 2011, lorsqu'on lui propose de prendre en main l'équipe première, il hésite. "Je n'avais pas de prétention, je n'avais pas de diplôme. Ça nécessitait un investissement différent, parce que ce n'est pas du tout le même métier de s'occuper d'une réserve et d'une équipe professionnelle", explique-t-il.
- Le goût du travail -
Il accepte pourtant et avec lui, le SCO remonte dans l'élite en 2015, plus de 20 ans après y avoir fait une apparition éclair (en 1993/1994). Il disputera samedi sa première finale de Coupe de France depuis 60 ans, face au Paris SG.
Neuvième puis 14e de L1 avec le 19e ou 20e budget (26 millions d'euros), il a su déjouer la corrélation entre logiques économique et sportive.
Obligé de faire avec les moyens du bord, son travail pourrait s'apparenter à du bricolage, mais ressemble en fait davantage à celui d'un architecte débrouillard.
Régulièrement dépossédé de ses meilleurs éléments, qu'Angers ne peut retenir en raison de sa faible puissance économique, il arrive pourtant toujours à rebâtir un collectif solide et performant avec des joueurs libres ou peu coûteux, et donc souvent inexpérimentés.
Deux ans après, il ne reste ainsi que quatre joueurs ayant connu la montée en Ligue 1 dans l’effectif - Alexandre Letellier, Romain Thomas, Vincent Manceau et Thomas Mangani.
Et sur cette période, 26 joueurs ont disputé leur premier match en Ligue 1 sous le maillot noir et blanc.
Beaucoup d'entraîneurs s'arracheraient les cheveux face à un tel casse-tête, mais pas lui, porté par sa foi dans la valeur travail.
"Ce que je recherche (chez un joueur), c'est l'envie du travail, le goût du travail. J'aime les gens généreux ou courageux. S'ils ont du talent, c'est encore mieux", explique le technicien.
- Gourcuff, un modèle -
Pas étonnant qu'un de ses modèles soit le Christian Gourcuff de Lorient, avec "sa capacité à renouveler toujours, en gardant un style, une méthode, quels que soient les joueurs qui arrivent ou qui partent".
Il partage le côté maniaque du Breton: "mes équipes, j'aime bien qu'elles soient bien organisées. Il faut que ce soit nickel. Même si l'adversaire est supérieur, je veux voir une vraie discipline collective, parce que ça nous permet d'exister même si ça ne nous permet pas forcément de gagner".
"Il faut de la réflexion parfois, du courage d'autres fois, mais ça, on doit l'avoir, c'est la base", insiste-t-il.
Mais si, comme Gourcuff, Moulin est un adepte du 4-4-2 - "je pense, encore aujourd'hui, que c'est le système qui permet la meilleure occupation du terrain" - il est bien moins dogmatique et plus pragmatique que lui.
"Je considère que le système qui nous convient le mieux aujourd'hui c'est 4-3-3 ou 4-1-4-1. C'est le système qui me paraît le plus équilibré avec les joueurs que j'ai", détaille-t-il.
Cela ne l'empêche pas de tenter des "coups", comme un 3-5-2 au Parc des Princes ou la titularisation de Mateo Pavlovic, un stoppeur, au poste d'avant-centre, quand les absences en attaque sont trop nombreuses.
Celui qui disait il y a deux ans à l'AFP vouloir être "champion de France, c'est l'état d'esprit, parce que ça ne coûte pas d'argent", a en tout cas réussi à se faire une place et un nom parmi les entraîneurs de Ligue 1. Il lui reste à graver définitivement son nom dans l'histoire du SCO en lui apportant son premier trophée majeur.