JULES, TOI AUSSI… !!!!
Grand Jules, tu es parti.
Et pourtant, lorsque je t’ai eu au bout du fil, il y a à peine quelques semaines, je ne pouvais aucunement deviner que c’était notre dernière conversation, et que tu nous laisserais orphelins, en ce 31 janvier 2016, si brutalement. Ce soir-là, je voulais partager avec toi cette peine que je ressentais, avec la perte de Tonton Bachir Thioune. « Bachir ???!!!! », tu t’exclamais alors à l’annonce de la nouvelle. Je confirmais. Oui, « Baye Bass », comme tu l’appelais affectueusement, venait de « partir » et a été inhumé à Touba, sa demeure éternelle.
Tu m’expliquas ensuite que tu t’apprêtais à subir une opération pour une arthrose qui t’avait fatigué ces derniers temps. A priori, rien de bien méchant, mais franchement gênant pour marcher. En fin de compte, je me résous à croire que tous les deux, Bass et toi, vous vous êtes, en réalité, fait passer le mot. Pour vous retrouver Tout là-haut aux côtés de l’Eternel.
Souleymane, depuis trois longs jours maintenant, tu ne fais plus partie de ce monde, terrestre et pesant. Et pourtant, je te vois partout. J’entends ta voix, forte, raisonner avec cet écho teinté de rire, si familier à nos oreilles. Les hommages qui fusent sur la toile, depuis « ton départ », tendent tous vers un seul constat : tu étais quelqu’un de bien et profondément humain et porteur d’une foi inébranlable envers l’Homme.
Qui mieux que nous, Mandémory, Sidy, Diabel, Mamoune, Barka, Ibou, Cheikh Ibra, Serigne Mour et j’en passe, pourrait témoigner auprès de ces anges, dépêchés par Le Très Haut aux fins de Lui rapporter des infos sur ta vie d’ici-bas ?
Je leur dirai que tu étais un être exceptionnel. Drapé de ton manteau d’humilité, tu parcourais les ruelles obscures de cette vie pour éveiller les consciences à l’aide de ta plume majestueuse et de ton savoir hors norme. Tu avais préféré retourner à la terre et te faire l’écho du monde paysan, pour lequel tu ressentais une reconnaissance sans commune mesure et un respect presque religieux.
Grand Jules, Je t’ai connu alors que j’étais haut comme trois pommes. Tu venais à Ben Tally rendre visite à Tonton Bass, et je vous accompagnais dans vos pérégrinations journalistiques à travers Dakar. C’était le bon vieux temps et une école du savoir pour moi. Vous connaissiez tous les taximen de la capitale et eux, à force de croiser votre route, vous devenaient familiers.
Ainsi donc, les soirées se terminaient tard, autour de débats politiques et par de vraies crises de rire. Je ne t’ai jamais vu en colère. Sauf contre la médiocrité, la bassesse et l’hypocrisie. Ce que tu appelais « la bêtise ». Lorsque je suis parti de Dakar pour continuer ma vie en Europe, tu étais resté avec Tonton Bass. A mon retour, plus de dix ans après, tu étais toujours là, à m’accueillir et à m’accompagner dans mes projets loufoques.
Homme de lettres, tu aimais l’écriture pour transmettre tes émotions ou les partager. Tes mots sonnaient justes et ne pouvaient s’écouter qu’avec le cœur. Pour toi, l’information ne se résumait pas seulement à l’actu, elle se déclinait aussi en images ou en musique, tel ce tambour major qui communique avec son tam-tam.
Tout un art. T’étais une plume rebelle. Mandémory et toi, vous formiez un couple formidable. Aujourd'hui, ce grand maître de l'image, pleure ton absence et risque de regretter pour longtemps encore ce grand vide que tu as laissé derrière.
Et je le comprends.
Grand Jules, je dirai aussi aux anges que tu avais un cœur gros comme ça. Tu aimais partager le peu de ressources dont tu disposais jusqu’à ta dépouiller de tout. En définitive, cette vie de « Baay Faal » que tu avais adoptée et qui t’allait si bien, était une marque de fabrique personnelle. De renoncement des largesses d’ici-bas, en vue d’éduquer ton âme vers Les Sommets.
En bon talibé mouride, tu comprenais, mieux que quiconque, l’éducation de « Khadimou Rassoul ». A savoir se dépouiller des attraits de « nafs » pour mériter de siéger sur le Trône, dans une vie future. Aujourd’hui, je sais que tu es avec Lui, Celui qui est et qui sera toujours. Eternellement.
Grand Jules, mon seul regret sera de ne plus avoir l’opportunité de « boucler » le journal sous ton contrôle. Admirateur. Avec ce regard fixé sur l’écran de mon ordinateur. J’avais pris l’habitude de sentir ta respiration, haletant, au dessus de ma tête, de t’entendre commenter l’actu, en puisant dans ton savoir inépuisable de la chose politique. Je n’entendrai plus tes belles histoires, ponctuées de rire, qui illustraient à merveille tes chroniques piquantes et nos conférences de rédaction.
De toi, Grand Jules, il me restera ton souvenir, ton image et ton savoir-faire. Ce lourd héritage, qui, à coup sûr, continuera de s’imprimer dans notre conscience. Nous le cultiverons et le transmettrons, le moment venu, à d’autres, pour que la mèche que vous aviez allumée, Bass et toi, ne puisse jamais s’éteindre. Et de là-haut, en bons maîtres, vous pourrez apercevoir la flamme. Eternelle. Avec ton sourire légendaire.
Repose en paix Souleymane !