LES NOUVEAUX PARADIGMES DE MACKY SALL
On ne peut envisager, en aucune façon, de chercher à entraver le droit de citoyens à exercer leur droit, inaliénable en démocratie, de manifester et surtout que ce droit a été exercé dans le respect strict des lois de la République
Quelle est l'idée de chercher à contrecarrer une marche d'organisations politiques et de la société civile par une contre-manifestation sur les mêmes terres et sur les mêmes lieux ? Le projet de certains responsables de l'Alliance pour la République (Apr) d'organiser une contre marche à celle que le mouvement Y en a marre organisait sur la Place de l'Obélisque à Dakar a été on ne peut plus stupide. Il est heureux que la raison ait fini par rattraper les responsables de l'Apr pour qu'ils revinrent sur leur projet. Un tel acte aurait été une pure provocation et tout débordement qui en aurait résulté leur aurait été imputable.
On ne peut envisager, en aucune façon, de chercher à entraver le droit de citoyens à exercer leur droit, inaliénable en démocratie, de manifester et surtout que ce droit a été exercé dans le respect strict des lois de la République. Il s'avérera vain et illusoire de chercher à empêcher l'exercice plein et entier de ce droit dans notre pays. C'est dire que le projet de saboter, (et il faut le dire, tel avait été l'objectif clairement affiché), la marche de Y en a marre ne saurait être toléré.
Il sera encore inacceptable, voire même impossible, d'empêcher les citoyens sénégalais d'exprimer leurs opinions et de prendre des positions critiques vis-à-vis de tout gouvernement, si cela les chante. Il faut une bonne fois pour toutes que tous les acteurs de la vie publique se mettent à cette donne, et donc se fassent violence pour entendre des opinions divergentes. Du temps de la gouvernance de Abdoulaye Wade, on avait cherché à empêcher des citoyens de manifester publiquement. Une répression policière s'en était suivie, provoquant une douzaine de morts en 2011.
Ironie du sort ou tragédie du sort ? Y en a marre avait été un des principaux acteurs de ces marches contre le Pds et Abdoulaye Wade. L'histoire rattrape la marche de la démocratie sénégalaise, avec son côté hypocrite et pathétique. Les bourreaux des manifestants de 2011 ont été aux côtés des manifestants de Y en a marre. Qui s'est souvenu des morts ?
Il y a lieu aussi de relever que des attitudes puériles du genre de celle envisagées par le secrétaire d'État, Yakham Mbaye, ou les attaques proférées contre les initiateurs de la marche, comme les accusations portées par le vice-président de l'Assemblée nationale, Moustapha Cissé Lô, selon lesquelles "les manifestants préparaient un putsch", au-delà de leur caractère burlesque, ont permis aux membres de Y en a marre de bien communiquer sur leur manifestation.
La polémique suscitée et entretenue pendant plusieurs jours a eu l'avantage de faire la publicité de la marche. En effet, on peut bien augurer que de nombreux marcheurs ont pu se décider à aller sur la Place de l'Obélisque pour marquer leur présence, comme un défi à ceux qui songeraient à interdire la marche. C'est dire que l'opposition bruyante et virulente contre la marche de vendredi dernier de Y en a marre a eu l'effet contraire.
Après les élections législatives, la patrie devra primer sur le parti
On dirait que le camp des partisans du Président Macky Sall n'apprend jamais de ses erreurs. Combien de fois les déclarations violentes et incendiaires contre des opposants leur retournent comme un boomerang ? Il s'y ajoute que ce sont toujours les mêmes gens qui font les mêmes sorties médiatiques qui objectivement gênent le pouvoir politique ou font perdre au Président Macky Sall des soutiens. Il est temps que le chef de l'État reprenne ses troupes.
Il en est de même de la présence de ses proches qui manquent de lumières dans son gouvernement ou dans d'autres stations essentielles de la vie de la Nation. Le Président Macky Sall a sans doute le mérite d'avoir cherché à gouverner avec ses camarades de parti, ses amis et proches. Mais il faut bien dire qu'il n'est pas bien servi ou qu'il n'a pas la main heureuse dans ses choix. Les canards boiteux de son gouvernement proviennent tous des rangs de son parti, notamment de ceux qui se réclament en être "les militants authentiques ou de la première heure".
Ces derniers exigent des faveurs, des prébendes et des privilèges, peut-être légitimes, mais faudrait-il continuer à leur faire la part belle au détriment des résultats sur l'action publique ? Le chef de l'État semble en être conscient et a déjà averti ses troupes en direction des prochaines élections législatives. Non seulement, il a indiqué que les responsables qui ne seront pas à même de faire gagner les couleurs de son parti au niveau de leur fief politique en paieront le prix, mais aussi Macky Sall s'inscrit dans une dynamique de résultats et d'efficacité pour les deux années qui le séparent de l'élection présidentielle de 2019.
C'est dire qu'au cas où sa coalition électorale remporterait la victoire aux élections législatives du 30 juillet 2017, une nouvelle architecture gouvernementale en sortira. Macky Sall ne fait pas mystère de sa ferme intention de ne mettre en selle que des compétences affirmées pour diriger l'action de son gouvernement. Son premier slogan, "la patrie avant le parti", sera de nouveau au goût du jour.
On peut augurer que les choses auront bien changé. Le Président Sall estime ne plus être redevable d'une quelconque faveur à quelque militant politique, d'autant qu'il est de notoriété publique qu'il leur a déjà donné toutes leurs chances et que ceux qui n'ont pas pu tirer leur épingle du jeu auront fini d'être conscients de leurs limites.
On doit rappeler que le Président Macky Sall avait essayé de traduire en actes son slogan. Ainsi, dans le premier remaniement du gouvernement dirigé par Abdoul Mbaye, il avait mis sur la touche de nombreux caciques de l'Apr. Seulement, le Président Macky Sall avait été obligé de lâcher prise suite à de fortes pressions venant de son parti et de ses proches. Ils étaient nombreux à dire leur frustration d'avoir été éjectés de leurs positions gouvernementales et qui estimaient être la risée du monde après un engagement politique sans failles auprès de leur leader.
Les récriminations ont pu forcer la main au chef de l'État qui avait fini par recycler tout son monde. Tout le monde a pris la mesure, Macky Sall ne fait plus mystère de s'être affranchi totalement et définitivement de ces contingences.