TANT QU’ON SERA DANS LA HIERARCHISATION DU MAL . . . !
Le «graawoul» et le « ca va » à tout-va, sont bien connus de partout et de tous les amis du Sénégal, comme une marque de fabrique «déposée» de notre insouciance.
Tant que c’était pour contenir notre «No stress» (pour utiliser une expression des plus courues en ce moment), cela ne posait aucun problème.
Sauf que nous avons tous cette fâcheuse tendance à convoquer un fait plus grave que nos propres turpitudes pour minimiser la portée de nos actes répréhensibles.
Le marchant ambulant qui squatte les devantures de commerces, leur menant une concurrence déloyale, encombrant la chaussée, estime qu’il n’a rien fait de mal. Tant qu’il gagne «son pain» à la sueur de son front, il estime qu’il ne devrait pas être déguerpi. Et souvent, l’argument massue en l’espèce, c’est que la police devrait s‘employer à traquer les voleurs plutôt que «d’honnêtes» citoyens . . .
L’artiste comédien qui a dernièrement défrayé la chronique en tirant une bonne bouffée de son tuyau de chicha, «enfumant» du coup tous les téléspectateurs, estime, pour sa défense, qu’il y’a plus grave que çà dans notre société. Et de montrer du doigt tous les consommateurs et/ou dealers de produit stupéfiant. Il n’a pas compris que c’est l’acte d’exposer le grand public par le canal d’un média à un produit nocif pour lequel la publicité est prohibée qui est à blâmer. Qu’importe pour lui, son acte est personnel et il n’a fait de mal à personne d’autre. Une communauté religieuse du Nord du pays a cru bon de poser brique sur brique, en dehors de toutes autorisation administrative, jusqu’à ériger sa mosquée. Une fois la bâtisse dressée, impossible de leur faire entendre raison pour déguerpir. Là aussi, le mal est ailleurs pour les «fidèles». La mosquée étant par essence un lieu d’éducation et de bonne moralité, les fidèles estiment que l’Etat devrait plus se consacrer à sanctionner la dépravation des mœurs ailleurs plutôt qu’à chercher noise à ces «ayatollahs» de la bonne morale.
Le mal est partout, et tout le monde trouve excuse sous le prétexte qu’il y’a plus grave. Oui, on trouvera toujours certains faits plus graves que d’autres. Tellement ancré en nous cette façon d’être et de faire que le premier des Sénégalais s’y met. On ne sait pas par quelle circonlocution, le Président Macky Sall est arrivé à penser que la cause de la très grande détresse des jeunes Sénégalais qui n’ont d’autres choix que de prendre la mer par des embarcations de fortune pour rejoindre l’Europe, était la pesanteur pour ne pas dire la pression sociale que les familles font peser sur les frêles épaules des jeunes. Simple raccourci, mais le contexte et l’environnement de cette déclaration fait penser que le chef de l’Etat sous-entendait aussi que la dot «insurmontable» réclamée à Samba Sow (chauffeur de la sénatrice Fatou Matar Ndiaye) a pu expliquer son geste de liquider sa patronne pour lui voler de l’argent.
Non on ne va pas penser que le président de la République trouvait ainsi une excuse à l’acte irréparable. Mais tout de même, le chef de l’Etat semble lui-même rouler dans les mêmes travers que ses compatriotes. Et, à ce jeu-là, lui n’a aucune excuse puisque la première pression faite à la jeunesse du pays, c’est celle de ne pas lui trouver du travail. Tant qu’on mettre de la hiérarchie dans les maux de notre pays, il sera difficile de les solutionner. La somme des solutions du mal de chacun ne fera jamais le traitement de choc dont ce pays a besoin.
Par Abdoulaye CISSE
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