3 EXPERTES ARGENTINES PRESENTENT LEURS DECOUVERTES MACABRES
PROCES HABRE : RESTES D'OSSEMENTS, PREUVES BALISTIQUES, PROJECTILES…
Le procès de l’ancien président de la République du Tchad, Hissein Habré, s'est poursuivi, hier, avec la déposition de 3 expertes de nationalité argentine.
Trois expertes ont présenté, hier, à la barre de la Cour des Chambres africaines extraordinaires (Cae), leur rapport, suite aux travaux de prospections, d’excavations et d’exhumations archéologiques qu’elles ont fait sur les différents sites d’enterrement des présumées victimes du régime de Hissein Habré.
A les entendre parler, on a l’impression que des morts sont enterrés partout en terre tchadienne, et que le lieu importait peu, l’essentiel était de porter sous terre les personnes décédées.
En effet, ces experts, images à l’appui, ont affirmé avoir trouvé des restes humains un peu partout, dans les champs, dans la rue.
Première à présenter son rapport, Anahi Ginarte a précisé que toutes les visites ont été faites avec les membres du tribunal, et qu'ils ont visité 4 sites.
Les 28 et 30 mai 2014, la délégation a visité le site de Mabrouka. Mais là, les études se sont révélées négatives : aucun corps n’a été trouvé, même si les témoins sur place ont affirmé que des personnes ont été enterrées là-bas.
Des restes de cadavres auraient été découverts partout
Le 29 mai 2014, la délégation a été à Am Salaya Gadjira. «C’est un endroit désertique, avec des formations rocheuses, secs, à l’époque de la visite», a expliqué l’experte.
Et contrairement au premier site, celui-ci aurait donné des résultats, car des restes humains auraient été découverts.
Les 31 mai et le 3 juin 2014, la délégation s’est rendue à Madj, à 2 Km de Mongo dans la région de Guera.
«L’endroit signalé a été dans un endroit rocheux très compact. Le témoin a affirmé que 12 personnes ont été enterrées dans ce site».
Après Madj, cap sur Koumra, où la délégation a visité deux secteurs d’inhumations des personnes assassinées en 1984. Mais, là aussi, les experts n’ont rien trouvé. Concernant les restes retrouvés, l’expert a déclaré qu’ils vont procéder à des prélèvements sur les supposés parents pour identification des personnes exhumées. Ils feront ainsi une comparaison du profil génétique
Claudia Biso, anthropologue légiste, est la deuxième experte à présenter son rapport. Son travail s’est concentré dans la ferme de Déli. Elle a dit avoir visité plusieurs sites, et a découvert les restes d’un enfant. a également signalé qu'un témoin a parlé d’un autre site, où 100 personnes auraient été enterrées, mais qu'ils n’ont pu faire d’études, car sur le site il y avait des constructions.
«Le sédiment est dur, nous avons fait appel à un spécialiste. Mais, nous n’avons trouvé aucune fosse. C’est après cela que les témoins nous ont dit que la fosse se trouvait à 20 mètres. Malheureusement, on a érigé des constructions sur ce site. Raison pour laquelle, nous n’avons pas pu vérifier», a-t-elle expliqué.
A noter qu’en plus des restes humains, les spécialistes ont affirmé avoir aussi trouvé des effets personnels, mais aussi des projectiles et des preuves balistiques.
Claudia Biso a eu à apporter des éclaircissements sur la manière dont des corps étaient inhumés dans des fosses communes Mme Biso - qui s’exprimait en espagnol - a bénéficié du concours d’un interprète.
Elle a précisé avoir travaillé dans une organisation qui a eu à travailler dans 49 pays, à travers le monde. Notamment en Bosnie et au Kossovo.
Répondant aux questions du procureur général, Claudia Biso a affirmé que la profondeur des tombes dépendait des sépultures. Les tombes trouvées au Tchad étaient, selon elle, non formelles, car ne se trouvant dans aucun cimetière.
Graves révélations de Mercedes Salado Puerto
A l'en croire, dans le secteur C, «une fosse commune a été découverte, contenant 9 cadavres superposés».
Pour la datation des corps, l'experte a dit s’être basée sur une pièce de monnaie retrouvée sur les lieux. Non sans préciser que la datation est relative, pas absolue.
Pour l’identification des vêtements, l’anthropologue a parlé de fibres synthétiques qui durent dans le temps.
Un des avocats de la défense a introduit une requête contre l’expertise, soulignant que les anthropologues n’ont pas eu à prêter serment avant leur témoignage.
Il a ainsi soulevé l’article 151 du Code de procédure pénale régissant les expertises.
Le président de la Cour lui a permis d’introduire la requête.
Après une brève suspension d’audience, ce fut autour de Mercedes Salado Puerto, une autre experte argentine, d’exposer le résultat de ses recherches.
L’anthropologue a affirmé qu’ils devaient procéder par une analyse génétique pour pouvoir déterminer le sexe de la personne.
Elle a précisé qu’il était également possible de trouver des traumatismes pouvant être les causes de la mort. Mme Puerto a fait état de la découverte de 21 squelettes à Déli, avec des niveaux de préservation différents.
Mercedes Salado Puerto a parlé de 16 squelettes de sexe masculin, ainsi que le squelette d’un enfant, dont ils n’arrivaient pas à déterminer le sexe. Ainsi que 2 autres squelettes, dont le sexe restait à déterminer.
Des analyses génétiques ont permis de déterminer que l’un des squelettes est de sexe masculin, et l’autre de sexe féminin.
Les analyses génétiques ont montré, selon l'experte, que les ossements à Déli ont révélé la mort de 20 hommes et d'une femme.
Au terme de son exposé, le président Kam a décidé de suspendre l’audience, qui reprend ce matin, avec les questions du parquet général.