«AU PS, C’EST COMME SI ON INVITAIT LES GENS A PARTICIPER A DES CLANS, A S’ACTIVER DANS DES FANS CLUBS»
PAPE SOW, COORDONNATEUR DE LA CONVERGENCE SOCIALISTE
La situation délétère qui prévaut chez les "verts" n'est pas pour plaire à Pape Sow, coordonnateur de la Convergence socialiste (Cs). Dans l'entretien qu'il nous a accordé, hier, le successeur de Malick Noël Seck à la tête de ladite structure appelle ses camarades de parti à faire preuve de responsabilité, dénonçant "un environnement malsain" dans la formation de feu Léopold Sédar Senghor.
On ne vous entend pas depuis quelque temps. Que devient la Convergence socialiste ?
Nous sommes à mi-chemin, à mi-parcours, de notre programme de tournée nationale. Je rappelle que c’était pour promouvoir le concept Cohésion, ouverture, unité et solidarité (Cous), que nous avions proposé aux militants et sympathisants socialistes, pour veiller à garder l’unité et la cohésion dans nos rangs. Et dans le cadre de cette tournée, nous avons été, après l’étape de la ville de Touba, où nous avons monté une cellule dynamique, dans la banlieue de Dakar, plus précisément dans la commune de "Jaxay" et environs. Là également, nous avons eu une satisfaction dans la mesure, où nous avons monté une cellule très dynamique, très engagée, composée de personnes très responsables. D’ailleurs, nous comptons y retourner dans les jours à venir pour une activité. Je rappelle que nous avions programmé d’aller à Bignona, dans la commune de Suel. Nous avons dû remettre le programme ultérieurement pour la simple raison que nous venions de sortir d’un référendum et que les uns et les autres étaient plus ou moyens épuisés. En plus aussi, il faut faire un grand contournement pour rallier le Sud qui, malheureusement, est devenu une zone enclavée. Pour toutes ces raisons, nous pensons que nous avions mieux à faire que de nous étaler à tout moment dans la presse. Parce que, pour nous, il faut travailler à mobiliser, à massifier, à animer le parti. Mais, il faut tout de même souligner qu’il manque sérieusement de solidarité dans nos rangs. Parce qu'il faut que des initiatives de cette nature soient accompagnées ou bien appuyées par la direction du parti. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Nous pensons que c’est des choses qui seront corrigées à l’avenir. Car le travail que nous sommes en train d'exécuter est un travail bénéfique pour le parti.
Qu'avez-vous prévu pour la suite de votre programme ?
Maintenant, nous attendons de voir, dans les jours à venir, comment dérouler la suite du programme qui nous mènera bien sûr au Sud du pays. Et forcément, revoir un peu le concept Cous. Parce que, nul ne doute qu’aujourd’hui, au Parti socialiste, c’est très difficile de militer. C’est comme si on invitait les gens à participer à des clans, à s’activer dans des fans clubs. Or, nous sommes au Parti socialiste pour militer. Nous militons pour des valeurs, nous militons pour des idéaux. Il faut reconnaître qu’aujourd’hui au Parti socialiste, vraiment, il y a un environnement malsain qui fait qu’aujourd’hui, les gens réfléchissent en termes de personnes. Est-ce qu'il faut soutenir Massamba ou Mademba ? Et cela a vraiment gangrené la vie de nos instances. Ça, il faut le reconnaître. Il ne faut plus se voiler la face. Nous ne sommes pas là pour dénoncer ou vilipender notre parti, mais nous sommes là pour tirer la sonnette d’alarme. Ce qui est très important à notre niveau. Parce que le Parti socialiste nous dépasse nous qui sommes des responsables, nous qui sommes militants et sympathisants. Le Parti socialiste, c’est plutôt un patrimoine national, historique, qu’il faut vraiment sauvegarder dans l’unité. Et quelle que soit la situation, quelles que soient les aspirations des uns et des autres, nous devons nous faire violence pour nous retrouver autour de l’essentiel. Faire en sorte que les instances fonctionnent dans le sens d’un militantisme accru qui intéresse les Sénégalais, plutôt que de verser dans des clans. Cela ne nous mènera à rien. C'est dans l'unité que nous pourrons relever les défis.
Que se passe-t-il vraiment au sein du Parti socialiste ?
C’est difficile à expliquer. Mais, nous sommes là pour faire le constat, et aujourd’hui, même les rares sorties que nous faisons au niveau de la presse, parfois, sont présentées comme étant des problèmes. Ou alors comme étant le problème. Or, ce n’est pas cela. Je pense que c’est une des conséquences du vrai problème, le problème se présente autrement. Nous sommes dans une mouvance présidentielle, certes, mais nous sommes dans un parti qui regorge d’hommes et de femmes ambitieux à qui il faut, à un moment, permettre de s’exprimer. Les choses sont telles qu’aujourd’hui, comme s’il fallait renoncer à certaines ambitions, le temps d’accompagner un allié qui ne se soucie même pas de l’avenir de la jeunesse du Parti socialiste.
Que prônez-vous face à cette situation délétère qui, à la longue, risque de coûter cher à votre formation politique ?
Bon, encore une fois, de faire preuve de responsabilité. Nous pouvons rester dans une Coalition au pouvoir en apportant une contribution constructive de qualité, sans que cela n’enlève le principe qui nous unit dans le Parti socialiste. Nous avons besoin de fonctionner comme des militants, comme des camarades, dans notre parti. Quelle que soit la complexité des sujets, des questions à traiter, nous devons, de façon régulière, les trancher dans les instances. Mieux encore, il faut que les responsables à la base travaillent à la base, qu’ils ne travaillent pas pour Massamba ou Mademba. Mais qu’ils travaillent, qu’ils massifient le parti, pour le Parti socialiste, pour le Sénégal. Parce que nous sommes censés, au-delà de la participation que nous faisions dans cette mouvance, retrouver le pouvoir un jour, de façon effective. Et dans ce sens, il faut vraiment convaincre, rassurer, voilà tout le sens de ne pas aller dans un sens clanique. C’est un mot qui peut paraître lourd, chargé, mais, en réalité, c’est cela qui se passe dans le parti. Et ça démobilise, ça démoralise, finalement, ça déconstruit tout ce que nous avons construit jusque-là. Encore une fois, ce parti nous appartient à nous tous.
Est-ce à dire que vous avez du mal à reconnaître le Parti socialiste ?
Je dirai simplement que mon parti est en train d’aborder un virage, mais nous sommes en train de le faire dans une ambiance mouvementée, dans un sens qui peut être préjudiciable pour le parti. Je suis un socialiste et je reste un socialiste, je suis un militant socialiste, et je reste un militant socialiste, quelle que soit la situation dans mon parti. Mais là, il faut le dire haut et fort, il faut que ça change au Parti socialiste, car ça part dans tous les sens. Et alors ces différentes déclarations ne sont que la conséquence du problème. Nous ferions mieux, de façon courageuse, comme nous le faisions, à travers la presse, de poser les problèmes à travers les instances. Faudrait-il encore que les socialistes, à travers les instances, aient la possibilité de choisir, eux-mêmes, les sujets ou les questions à traiter. Parce qu'une question traitée une fois, deux fois, elle est évacuée, et on passe à autre chose. Mais, il ne faut pas laisser les choses pourrir. C’est comme si, quelque part, il y a une véritable entreprise de dé-construction du Parti socialiste. Et ça, nous le décrions fortement, nous le déplorons. Nous ferons face, quelle que soit la situation.
L’actualité est marquée par la destitution de Mme Aïda Mbodj de son poste de présidente du Conseil départemental de Bambey pour cumul de trois fonctions électives. Vous en dites quoi ?
Là, je vais émettre un avis personnel. Parce que tout simplement, je suis de ceux qui sont contre le cumul des fonctions. Il s’agit de cumul de mandats. Trois, ça fait trop. Mais, j’invite personnellement le ministre de la Gouvernance locale, du Développement et de l'Aménagement du territoire, Abdoulaye Diouf Sarr, à ne pas rester sur le cas Aïda Mbodj seulement. Il faut qu'il aille jusqu’au bout de sa logique. Par contre, moi, je parlerai de cumul de fonctions, pour la simple raison que je fais allusion à la nature des fonctions cumulées, plutôt qu’au nombre de fonctions cumulées. Je trouve très indécent qu’un responsable ou une autorité de ce pays cumule les fonctions de maire et de ministre. Ça décrédibilise l’action du gouvernement du Sénégal. Est-ce que c’est une action de politique politicienne? Je ne saurai le dire, je ne saurai, non plus, le démentir. C’est à lui, ministre du gouvernement, d’aller jusqu’au bout de sa logique. Et pourquoi pas de commencer par sa propre personne ? Parce que, moi, je vois mal qu’il soit maire, ensuite ministre de la Décentralisation. On a vu tous les problèmes que cela a créés, car il règle des comptes. Voilà le type de cumul qu’il faut vraiment dénoncer au Sénégal. Nous avions tous espéré, attendu des ruptures positives, voilà, c’est le moment. Voilà un grand chantier que le gouvernement doit ouvrir pour bannir à jamais le cumul de ces fonctions qui est inacceptable.