«LL FAUT QUE LES POLITICIENS NOUS AIDENT A METTRE DE L’ORDRE DANS CE PAYS»
L'ARCHEVEQUE DE DAKAR FAIT LE PROCES DE LA CLASSE POLITIQUE
Le comportement des hommes politiques indispose le chef de l'Église catholique au Sénégal. Monseigneur Benjamin Ndiaye, qui s'exprimait, hier, au Cap des biches, lors de la traditionnelle conférence de presse des évêques du Sénégal, a jeté l'anathème sur la classe politique.
L'Archevêque de Dakar n'a pas été tendre, hier, avec les hommes politiques sénégalais. Monseigneur Benjamin Ndiaye - qui procédait au bilan de la 128e édition du pèlerinage marial de Popenguine - a fait leur procès. «Il faut que les politiciens nous aident à mettre de l’ordre dans ce pays», a déclaré d’emblée le chef de l’église sénégalaise. Il est temps que ces acteurs du landerneau politique arrêtent de prendre les gouvernés pour des demeurés. Cessons de nous croire dans un marché de dupes», a-t-il martelé.
Pour le successeur du Cardinal Théodore Adrien Sarr à la tête de l'Eglise sénégalaise, «il faudrait poser la question aux politiques sur leurs véritables attentes. Il y a lieu de faire le distinguo pour éviter tout amalgame».
Tout en magnifiant l'appel au dialogue national lancé par le président de la République, Monseigneur Benjamin Ndiaye n'en a pas moins déclaré : «Il y a une loi de fonctionnement, et ce n’est pas parce que vous allez dialoguer, qu’il faut tout confondre». Selon lui, «c’est une initiative à saluer, si le dialogue participe à faire baisser les tensions verbales et physiques. Mais, un dialogue qui gommerait les différences ne serait pas un vrai dialogue, et c’est même impossible». L’Archevêque de Dakar, qui définit la politique comme étant «l’art de s’investir au service exclusif de la cité», a dit douter de la bonne foi des acteurs.
Déclinant les conditions d’échanges francs, il dira : «Si le dialogue, en tout cas, est pour faire baisser les tensions verbales et physiques, c’est tant mieux. Mais, si le dialogue n’est mû que pour des besoins partisans, alors ce n’est pas du dialogue, c’est du 'mussante'».
«Si le dialogue n’est mû que pour des besoins partisans, alors ce n’est pas du dialogue, c’est du 'mussante'»
«Comment voulez-vous qu’un petit pays comme le Sénégal se paye plus de 200 partis politiques?», s’est-il également interrogé, s’offusquant de la pléthore de partis politiques. Poursuivant son diagnostic sans complaisance, Monseigneur Benjamin Ndiaye a dit ne pas comprendre que «chacun veuille créer sa chapelle et aller autour du dialogue pour faire du chantage».
L'Archevêque de Dakar n’a pas manqué de revenir sur la crise scolaire qui gangrène le secteur. Pour lui, «la crise n’a que trop duré». Revenant sur son homélie de l’année dernière à Popenguine qui, rappelle-t-il, portait sur le sujet, il a réitéré ses vœux de voir l’école sénégalaise sortir de cette spirale de grèves cycliques. Car, a estimé Mgr Ndiaye, «on n’est dans une crise sans fin, une crise avec des intérêts partisans qui l’emportent sur l’intérêt général».
Explorant des voies de sortie de crise, il a exhorté les différentes parties prenantes à «prendre le temps de s’asseoir et de discuter, cartes sur table, et de dire ce qui est possible et ce qui ne l’est pas, et qu’on accepte les règles du jeu». Et d’ajouter : «Je peux défendre un droit qui n’est pas immédiatement réalisable, mais, pour autant, je ne peux pas bloquer la vie d’une nation pour des intérêts particuliers. Maintenant, il appartient aux acteurs qui sont sur le terrain de voir où se situent leurs responsabilités et de les prendre en toute honnêteté».