LES RIVERAINS SE PLAIGNENT, LES VENDEURS SE JUSTIFIENT
MARCHES A TOUS LES CARREFOURS DE DAKAR
Rond-point Liberté 6. Rond-point «Poste Thiaroye». Deux carrefours très fréquentés de Dakar. Un seul et même décor : Celui de marché à ciel ouvert. Ce dont se plaignent les riverains du fait des nombreux accidents que cela engendre, alors que les vendeurs, certes conscients du danger, se justifient quand même.
Effet de mode ou mal d’une capitale qui étouffe ? En tous les cas, c’est devenu fréquent dans les ruelles de Dakar d’en faire le constat : Tous les ronds-points ou presque sont maintenant transformés en marchéS à ciel ouvert. Ce qui provoque d'énormes bouchons dans la circulation routière, en plus des accidents et d'autres désagréments que ça ne manque pas de causer au quotidien. Si les riverains se plaignent et montrent leur inquiétude face à cette situation qui prend de l'ampleur avec son corolaire d’accidents, les vendeurs de leur côté essayent de se justifier.
De Liberté 6 au Front de Terre, en passant par le croisement Cambérène et Poste Thiaroye, le décor est le même. Tous les carrefours de la capitale sont désormais transformés en lieux de ventes de toutes sortes de produits et articles de toutes sortes : vêtements, chaussures, nourriture, accessoires, entre autres.
En cette mi-journée du vendredi, au rond-point Liberté 6, d'interminables embouteillages favorisent la lenteur des véhicules, les piétons se précipitent avec les automobiles. Chacun essaie de se frayer un chemin. Les vendeurs rangent leurs étals à l'attente d'éventuels clients, les va-et-vient des piétons qui admirent les marchandises ou qui se précipitent pour des occupations sont intenses. Le bouchon fait l'affaire de ces vendeurs installés sur le rond-point car ça donne plus de visibilité à leur marchandise.
C'est dans cette ambiance que nous avons rencontré Meïssa Fall, habitant à Liberté 6, trouvé au terminus des Tata établi dans ce rond-point, en train d’attendre le bus de la ligne 76. Ce professeur de français déplore ce nouveau phénomène. «Franchement, cette situation est regrettable. Nous ne sommes plus en sécurité avec dans cet environnement. Nous courrons des risques au quotidien. Cette situation cause beaucoup de dégâts comme les vols et les cas d'accidents», dit-il.
Les commerçants conscients du danger, mais…
Justement, les accidents sont très fréquents sur cet axe. Monsieur Fall, qui a été témoin de beaucoup de cas d'accidents en ce lieu témoigne : «Il y a eu beaucoup de cas d'accidents sur cet axe et qui sont parfois mortels. Cette situation anarchique des commerçants en est l'une des causes. Pourtant, ils ont été déguerpis l’année dernière. Mais ils reviennent à chaque fois». «Comment ce petit espace peut-il servir en même temps de marché, d’arrêt de bus et de passage pour piétons ?», s'interroge le sieur Fall.
Abondant dans le même sens que Meïssa Fall, Ndèye Aïssatou Diop, vendeuse de «fruits sauvages» sur ce rond-point Liberté 6, trouve pour sa part la situation «anormale». «Mais que faire s'il n'existe pas une autre alternative que de prendre le risque de s’installer ici pour mener à bien mon petit commerce. Nous n’avons guère le choix, même si nos vies, nous les vendeurs, sont menacées avec la circulation automobile très dense. Je sais parfaitement que cela est anormal, mais si on n'a pas où aller, on ne peut que se contenter de ce qu'on a. Si on nous trouve des lieux plus adaptés pour nous recaser, alors on pourra quitter les ronds-points», explique la quinquagénaire.
Les ronds-points, des espaces très fréquentés, donc très prisés par les commerçants
Autre endroit, même décor, le rond-point «Poste Thiaroye», juste à la sortie de l'autoroute à péage. Ici, ce sont les vendeurs et les chauffeurs du garage de taxis «Clandos», qui font la loi sur cet axe. Dans ce lieu, il y a une atmosphère polluante. Que dire des piétons qui pullulent comme des fourmis et qui multiplient les déplacements. Certains attendent impatiemment l'arrivée de leur bus, pendant que d'autres se contentent des «Clandos».
Vendeuse de beignets et de «Café Touba», chaque après-midi, Ndèye Binta rallie «Poste Thiaroye». Elle tente, tant bien que mal, de nous expliquer la situation, qui, selon elle, est tout à fait normal. «On veut juste travailler, mais on n’a pas les moyens de se procurer un magasin. Donc, on s’installe à ce genre de carrefour pour faire fortune, car les ronds-points sont très fréquentés et ça nous permet de voir beaucoup de clients défiler et ainsi de faire de bonnes affaires en écoulant facilement nos produits», avoue-t-elle.
Si la commerçante souligne que le fait qu’ils occupent ces lieux n’entrave en rien la circulation et ne gêne pas les piétons, ce riverain par contre soutient le contraire. Etudiant à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, I. Baldé, qui habite à un jet de pierre du rond-point «Poste Thiaroye», dénonce l’anarchie qui s’est installée dans cet espace et généralement à travers toute la ville de Dakar. Selon lui, «cela ne peut pas continuer, car c’est la sécurité de tous qui est menacé». Aussi, appelle-t-il les autorités à «prendre les mesures idoines pour régler la situation et remettre de l’ordre».
«On doit tous les déguerpir de ces lieux. Un marché à la sortie d’une autoroute, vraiment cela n'existe qu'au Sénégal. L'Etat doit prendre ses responsabilités et mettre fin à cette situation une bonne fois pour toutes», préconise-t-il.