«IL Y A UNE CRISE DU ROMAN POUR ENFANT»
Dans cet entretien, l’écrivain Seydi Sow déclare qu’il n’y a pas de baisse du roman sénégalais mais plutôt une baisse du conte et du théâtre. Allant plus loin, il fait savoir qu’il y a une « crise du roman pour enfant ».
Parmi les causes de ce phénomène, le secrétaire exécutif de l’Association des écrivains du Sénégal (Aes) cite le « coût de fabrication du livre d’enfant » qui est « beaucoup plus cher que celui des adultes » mais aussi le « manque de soutien financier » aux éditeurs qui s’orientent vers la littérature enfantine.
Aujourd’hui, les productions romanesques ne tendent-elles pas à diminuer dans la littérature sénégalaise ?
C’est une mauvaise évaluation. Il est vrai que les gens font tendance à aller vers la poésie parce qu’ils pensent que c’est un genre facile mais, en réalité, nous avons beaucoup de productions romanesques. Sur ce plan-là, il y a même des percées sur le plan international avec les romans sénégalais. C’est une mauvaise perception que de croire qu’il y a une baisse du roman sénégalais. Nous, en tout cas, au niveau de notre maison d’édition, nous enregistrons beaucoup plus de romanciers que de poètes parce que c’est deux genres qui viennent. C’est soit la poésie, soit le roman. Maintenant, ce qui est réellement en baisse sur le plan de la littérature, c’est d’abord le conte, un genre qui est totalement oublié. C’est aussi le théâtre qui est totalement méconnu et ce qui est beaucoup plus grave, c’est que les écrivains de maintenant n’écrivent pratiquement pas pour les enfants. Il y a une crise du roman pour enfant. Ça, c’est vrai. La littérature enfantine, le roman pour l’enfant, est totalement en baisse.
Qu’est ce qui explique alors cette baisse de la littérature enfantine ?
Il faudrait une enquête pour savoir pourquoi les écrivains ne s’adonnent pas aux romans d’enfants alors que la littérature enfantine a des débouchés extraordinaires et elle est parfaitement commerciale. Sur le plan du commerce, on vend beaucoup plus la littérature enfantine que les grands romans. La première explication que je pourrais tenter, c’est peut-être lié au coût. Le coût de fabrication du livre d’enfant, du fait des images, est beaucoup plus cher que celui des adultes. Quand on a un livre en noir et blanc, c’est beaucoup plus simple, c’est beaucoup moins cher alors que les enfants, pour que ça soit attractif, il faut qu’il ait des images, beaucoup d’images même or les images sont trop chères sur le plan de l’impression. Au niveau des imprimeries, chaque page où il y a une image est facturée vraiment deux fois la page en noir et blanc. Ensuite, il n’y a pas fondamentalement une politique pour la littérature enfantine. On ne s’en soucie pas et c’est ça la réalité. On ne met pas l’accent sur cette littérature or c’est la meilleure voie pour éduquer nos enfants, pour les initier à la lecture de demain. Parce que s’ils n’ont pas de quoi lire, comment voulez-vous quand ils seront adultes, qu’ils puissent lire ? Parce qu’ils n’ont rien sur leurs mains. Il faudra maintenant à ce niveau mettre un bémol au fait qu’il y a de temps en temps quelques éditeurs qui s’orientent vers ça. Je veux citer Nara Editions qui s’oriente vers ça. Il y’a il y a aussi un soutien financier qui manque cruellement à ces éditeurs qui s’orientent vers la littérature enfantine. Mais le roman, il n’est pas en baisse.
Quelles sont les solutions pour promouvoir les productions littéraires ?
Il faut aussi dire qu’il y’a aussi les essais maintenant. Les hommes politiques de plus en plus ont fait une effraction dans cette forme de littérature et c’est bien. De plus en plus, des hommes politiques écrivent pour parler de leurs expériences et ça c’est une bonne chose que nos hommes politiques se dévoilent. Et puis présentement, nous sommes en train de travailler sur une encyclopédie gigantesque d’un grand homme politique. C’est des éléments qui montrent que notre société est en évolution sur le plan de la littérature. Maintenant, il faudrait que tous les autres éléments qui accompagnent le livre puissent venir. Il faut que la bibliothèque soit là. Il faut que les journalistes s’intéressent de plus en plus à notre littérature parce que c’est eux qui permettent la promotion de cette littérature. Si on ne s’y intéresse pas, ce n’est pas bon or nous souffrons par manque d’espaces littéraires au niveau des médias.
Recueillis par Mariame DJIGO