LA GENDARMERIE RACONTE L’HORREUR DANS LES CENTRES DE REDRESSEMENT DE KARA
Dans un communiqué parvenu hier à «L’As», la Maréchaussée affirme que des hommes qui y sont internés faisaient l’objet de séquestration, torture, maltraitance
La Gendarmerie est sortie de sa réserve pour expliquer les raisons qui ont conduit ses hommes à démanteler les centres de redressement de Serigne Modou Kara. Dans un communiqué parvenu hier à «L’As», la Maréchaussée affirme que des hommes qui y sont internés faisaient l’objet de séquestration, torture, maltraitance. Elle a également fait état de traite d’êtres humains et de présence de drogue sur les lieux.
L’affaire aurait pu se limiter à l’arrestation d’un petit voleur de moto, mais elle a fini par prendre des proportions inimaginables qui pourraient inspirer les réalisateurs de cinéma, dans le futur. Voulant élucider le vol d’un simple scooter, la Section de Recherches (SR) de la Gendarmerie a finalement mobilisé ses redoutables hommes pour le démantèlement d’un réseau de vol de scooters, de trafic de chanvre indien, et de traite de personnes. Si l’on se base sur le communiqué des pandores parvenu hier à «L’As», tout a commencé le 26 novembre dernier. «Du 26 au 28 novembre 2020, des éléments de la Section de recherches (SR) ont effectué un transport à Ouakam pour exploiter un renseignement sur le vol d’un scooter.
A cette occasion, les enquêteurs ont découvert trois (03) autres scooters faisant l’objet de recherches et par incidence, un lieu de regroupement de plusieurs individus, en majorité jeunes, âgés de 17 à 42 ans, placés sous haute surveillance et victimes de séquestration, de maltraitances, voire de torture. Ils vivent dans des conditions sanitaires déplorables, dans des endroits présentés comme des daara de redressement, tenus par des disciples de Serigne Modou Kara. Les responsables se font appeler «commandant» et «colonel», renseigne la Gendarmerie dans son communiqué.
Les gendarmes affirment qu’au moment de leur décente sur les lieux, ils ont trouvé non seulement des personnes souffrant visiblement de maladies et de malnutrition sévère. De plus, les stigmates des sévices corporels étaient visibles sur les corps des victimes, dont certains semblaient avoir perdu la raison. Selon les pandores, elles ont expliqué qu’elles ne mangeaient qu’un repas par jour et ne se lavaient qu’une fois par semaine. «En outre, un des mis en cause appelé «Ndaama géant» chez qui il a été retrouvé six (06) paquets de chanvre indien, est allé se réfugier au domicile de Serigne Modou Kara, dont le fils Ahmadou Mbacké l’a heureusement reconduit à l’unité, suite aux mises en garde du commandant de la SR. Les témoignages des victimes font état de plusieurs décès durant ces deux dernières années, dont le dernier remonte à trois jours, sur lesquels des investigations sont en cours. Plusieurs blessés ont été secourus et acheminés d’urgence au service de santé de la gendarmerie et à l’hôpital Principal de Dakar, par les soins des éléments de la Section de recherches et du médecin chef de la Gendarmerie», ont fait savoir les gendarmes.
D’après le communiqué des pandores, «le 26 novembre, d’abord, dix-huit (18) personnes ont été découvertes aux Mamelles, sous la garde de quatre (04) geôliers. Ensuite, le 27 novembre à Guédiawaye, deux cent treize (213), dont sept (7) mineurs, séquestrés dans un immeuble R+1 et entassés dans huit(08) chambres, ont été libérées de ces lieux de détention». «Enfin, un transport effectué le samedi 28 novembre 2020, sur deux (02) autres sites situés à Malika et à la Zone B, a permis de découvrir respectivement vingt-deux (22) et cent (100) pensionnaires, dont une (01) fille âgée de 17 ans. Au total, quarante-trois (43) personnes ont été interpellées, dont six (06) à Ouakam, treize (13) à Guédiawaye, vingt (20) à la Zone B et quatre (04) à Malika».
Pour conclure, la gendarmerie explique que la Section de Recherches a démantelé un réseau de vol de scooters, de trafic de chanvre indien et de traite d’êtres humains. Selon les pandores, l’enquête se poursuit sous la direction du procureur de la République, précisément pour les faits d’association de malfaiteurs, vol en réunion en temps de nuit, trafic de drogue, traite de personnes et complicité. «Les documents audiovisuels sont disponibles et feront l’objet d’une diffusion en temps opportun», souligne la Gendarmerie.
LE CAMP DE KARA DEMENT LA GENDARMERIE
Le démantèlement des centres de redressement de Serigne Modou Kara par la Section de Recherches connaît un rebondissement. Après la sortie de la Gendarmerie pour expliquer les raisons qui ont motivé son acte hier, le camp du guide religieux s’est fendu, quelques heures après, d’un communiqué lui aussi pour battre en brèche les allégations des pandores selon lesquelles ils ont trouvé sur les lieux de la drogue, des personnes qui souffrent de maltraitance et de malnutrition. «Suite au communiqué très nuancé partagé sur les réseaux sociaux et par la Gendarmerie Nationale, le Diwane tient à préciser ce qui suit : la Gendarmerie n’a trouvé de la drogue dans aucun des centres de redressement Darou Salam au niveau de la banlieue cités dans leur communiqué. Nous invitons l’autorité à bien préciser l’endroit dans lequel elle affirme avoir trouvé du chanvre indien pour éviter toute confusion», indique le camps de Serigne Modou Kara. Sur l’un des geôliers où a été retrouvée de la drogue et dont les gendarmes affirment qu’il a trouvé refuge au domicile de Serigne Modou Kara Mbacké, le camp du marabout dément. «Celui auquel ils font allusion est certes un membre du mouvement, mais pas geôlier au niveau des trois principaux centres reconnus de la Kara sécurité. Il serait bien de préciser qu’il n‘était pas dans le domicile du guide Cheikh Ahmadou Kara Mbacké au moment de la descente de la Gendarmerie. C’est seulement après le départ de la Gendarmerie que le guide, informé de la situation, a immédiatement intimé son fils Serigne Ahmad Mbacké l’ordre d’aller chercher ce talibé partout où il se trouverait pour le mettre à la disposition de la justice pour répondre des accusations qui pèsent sur lui», précise le texte. A propos de la maltraitance et de la malnutrition évoquées, les disciples de Kara expliquent qu’ il serait bien de rappeler que les pensionnaires de ces centres (Daara Tarbiyah) y ont été envoyés par leurs propres parents sur la base d’une décharge d’autorisation parentale signée. Ces mêmes parents accompagnés de membres de leurs familles faisaient des visites récurrentes pour s’enquérir de l’état de leurs enfants dans la structure»