HAMIDOU DIA... AU FIL DU FLEUVE
EXCLUSIF SENEPLUS - L’homme était élégant, sa poésie raffinée et ouverte aux étreintes du monde - Son identité était farouchement futanké - Mais le cœur s’ouvrait à tous les apports fécondants du monde - Il laisse un vide intellectuel immense
Hamidou Dia, c’était un talent, une érudition et une élégance. Sa mort est brutale et nous laisse un vide immense. Hamidou Dia a eu plusieurs vies. Elève politisé turbulent. Etudiant engagé dans le mouvement maoïste. Intellectuel rigoureux. Conseiller écouté. Mais de toutes ces vies, Hamidou Dia a dessiné un seul passage : celui de l’humanisme. Un humaniste de combat pour la dignité des peuples.
On appréhende difficilement Hamidou Dia si on ne le lie pas à la trajectoire du fleuve qui, par ses contorsions millénaires, a dessiné le Daandé Maayo, donnant vie à une culture, une identité, une foi et une exigence. Le poète a effilé sa plume sur les berges du fleuve Sénégal, là où il a connu ses premières émotions. Le militant acharné a toujours recouvré une quiétude dans les bras câlins du Maayo. L’enseignant et conseiller a vu notre Maayo nourrir ses ultimes inspirations.
Hamidou Dia était un amoureux du Fouta ; de ces amours terribles car nécessaires. Il fut un enfant biberonné aux berges de notre fleuve-vie ; un homme nourri à la quintessence du legs de nos ancêtres.
J’ai rencontré Hamidou Dia la première fois à l’Institut français de Dakar où il donnait, à coté du Pr Amadou Ly, une conférence sur la négritude. Il parlait de Césaire et de Senghor avec une éloquence rare et une connaissance fine.
L’homme était élégant, sa poésie raffinée et ouverte aux étreintes du monde. Il avait les pieds ancrés sur notre sol africain. Son identité était farouchement futanké. Mais le cœur s’ouvrait à tous les apports fécondants du monde. Il parlait d’Afrique, des Antilles, d’Europe et d’ailleurs. Il n’était pas la caricature de « l’intellectuel communautaire » que des roquets d’internet ont voulu peindre. On pouvait être en désaccord avec Hamidou Dia, mais rien ne justifiait le torrent d’insultes que l’homme a récemment subi. Mais il est compréhensible que ceux qui n’ont nullement le talent ni la culture de l’intellectuel puissent se compléter par l’outrance et la grossièreté.
Baba Hamidou est parti. Il laisse un vide intellectuel immense. Il me manquera énormément. Il manquera également à tous ceux avec qui il passait des journées à échanger sur la littérature, la philosophie et la politique.
Son âme est dorénavant au Ciel. Mais sa mémoire continuera d’illuminer la route du preux passant qui arpentera les berges de notre Fleuve.
Adieu Baba Hamidou !
Hamidou Anne, doctorant à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis