D’UNE FORET A UN ZOO, EN 110 ANS D’HISTOIRE
LE PARC ZOOLOGIQUE DE HANN
C’est 110 ans d’histoire que le parc de Hann renferme dans sa forêt et dans son zoo. Avec un personnel passionné, le parc garde toujours, après plus d’un siècle d’existence, sa verdure abondante et attrayante. Des animaux, parmi lesquels des lions, des chimpanzés ou encore des autruches… continuent d’attirer les visiteurs. Plusieurs mutations se sont opérées dans le parc. Les directeurs qui s’y sont succédé ont travaillé pour son extension. Aujourd’hui, considéré comme la «15e région du Sénégal», le parc forestier et zoologique de Hann, à l’instar de biens d’autres structures, connaît des difficultés d’ordre financier. Le budget, pourtant revu à la hausse, peine à supporter les dépenses faramineuses qu’engendrent l’entretien du zoo et l’alimentation des animaux.
A première vue, ce sont les arbres qui attirent l’attention au niveau du parc forestier et zoologique de Hann. Et pourtant, ce havre de paix, seul poumon vert de Dakar, cache au sein de son zoo une diversité d’animaux en captivité. Le parc forestier ne date pas d’aujourd’hui. Sa création remonte à 1903 par les autorités coloniales pour faire face à un problème d'eau causé par la forte pluviométrie de l'époque.
De parc forestier au départ, il a subi plusieurs mutations et réformes avant d’allier aujourd’hui foresterie et zoologie. Etendu sur 7 hectares, le zoo a ouvert ses portes aux animaux et aux visiteurs près de 33 ans après la création du parc forestier (1935). Il est aménagé en plusieurs cases, bassins, fosses, enclos et volières. C’est dans ces aménagements spécifiques que vivent actuellement 27 familles d’espèces.
Un parc érigé pour faire face aux problèmes d’eau de Dakar
L’actuel directeur du parc, le commandant Lamine Guèye, nous a retracé les différentes mutations qui ont jalonné le processus de création de ce qui est aujourd’hui devenu le poumon vert de Dakar. D’après le commandant Guèye, le parc a été créé par les Colons pour faire face aux problèmes d’eau auxquels Dakar était confronté. C’est plus tard qu’il a pris une dimension environnementale. Celle-ci a consisté à la création en même temps du parc zoologique et du jardin botanique. «La construction du parc zoologique a commencé en 1934, mais c’est en 1935 qu’il a ouvert ses portes», confie le commandant Guèye.
Son collègue, l’Adjudant-chef Abou Abdourhamane Ndiaye, gestionnaire de la partie zoologique du parc, a lui aussi abondé dans le même sens en confirmant que la création du zoo s’inscrivait dans une logique de répondre à un besoin ponctuel. «A la création du parc, il y avait dans les maisons des Français des animaux sauvages. Et leurs propriétaires, pour aller en Europe en vacances par exemple, avaient des problèmes. Ils ne savaient pas à qui confier ces animaux. Et avec la colonie, ils trouvaient facilement certaines espèces au niveau régional et sous-régional. C’est de là qu’est née l’idée de la création du parc zoologique», narre l’Adjudant Ndiaye pour préciser que le parc forestier, vieux maintenant de 110 ans, avait à l’époque de son élargissement en zoo beaucoup d'espèces d’animaux et dépendait de l’Inspection régionale de Dakar des Eaux et forêts. Le premier inspecteur régional fut Baba Dioum. Après lui, viennent successivement El Hadj Sène, le Colonel Bocar Sall, le Colonel Kane, le Colonel Malick Diallo, Ndiawar Dieng, le Colonel Malick Cissé, le Colonel Baba Sarr et puis Daniel André Dieng.
Le parc, «15e région du Sénégal»
Après ces inspecteurs régionaux, la gestion du parc est détachée de la région. Le parc devient autonome. Pour certains, le premier directeur du parc était Amadou Mactar Dieng. De M. Dieng au Commandant Lamine Guèye, le parc a connu, successivement, comme directeurs les Colonels Madeleine Cissé, Kondé Sylla, Koïté, Oumar Diaw, Pape Alassane Diop, Omar
Diagne, Mactar Fall, et enfin revient le Colonel Koïté. Selon l’Adjudant-chef Ndiaye, le directeur du parc a les mêmes prérogatives que l’inspecteur régional des Eaux et forêts. L’Adjudant nous confie que dans l’organigramme de leur service, le parc est considéré comme «la 15e région du Sénégal».
Depuis sa création, le zoo a connu plusieurs vagues de peuplement d’animaux venus, pour la plupart, du Maroc et de l’Afrique du Sud. Beaucoup de générations de médecins vétérinaires ont assuré le suivi médical de ces bêtes. Par expérience, les travailleurs - n'ayant pourtant jamais fréquenté une école de faune - ont réussi à adapter le régime alimentaire de ces animaux aux moyens modestes dont dispose le parc.
25 millions pour l’alimentation pour 187 pensionnaires
«A mon arrivée, le budget annuel pour l’alimentation du parc était d’environ 2,7 millions de francs Cfa et certaines dépenses sont prises en charge par le fonds forestier. Aujourd’hui, il dépasse les 25 millions de francs Cfa», renseigne l’Adjudant Ndiaye qui, après 14 ans de service dans le parc, parvient à lire les comportements des animaux.
Ainsi, de 134 pensionnaires en 2002, essentiellement composés de lions, de gazelles, d’hyènes, de crocodiles, d’oiseaux divers, entre autres, le parc zoologique de Hann abrite aujourd’hui 187 pensionnaires.
LE ZOO ET SES DIFFICULTES
Un régime alimentaire dispendieux pour un budget dérisoire
Les responsables du parc zoologique de Hann doivent nourrir quotidiennement 187 spécimens répartis en 27 familles. Les coûts de la nourriture ne cessent de flamber au moment où le budget ne suit pas, couvrant difficilement les charges. Parce que le régime alimentaire - déjà dispendieux - varie selon l’animal. Les poissons, les poulets et la viande constituent le menu principal de l’alimentation de ces animaux en captivité.
Parmi ces animaux figure le roi de la forêt, dont l’une des particularités du régime alimentaire n’est connue que des forestiers. «Quand le lion mange de l’herbe ou des feuilles, c’est uniquement pour se soigner», informe ainsi l’Adjudant-chef Abou Abdourahmane Ndiaye gestionnaire du parc. Ce dernier, en fonction au parc depuis 1998, confie également que la structure dépense hebdomadairement près d’un million de francs Cfa uniquement pour les carnivores qui se nourrissent exclusivement de viande.
15 ânes de 50 kg par semaine pour nourrir les carnivores
«Pour les carnivores, il nous faut quinze ânes par semaine. Et pour être sûr d’avoir un âne bien portant pesant 50 kilos, soit 750 kg de viande, il faut débourser 50 à 60 000 francs Cfa. Les 15 ânes nous reviennent à 750 000 francs Cfa chaque semaine», révèle-t-il avant d’ajouter que malgré la forte demande, «on ne peut pas élever des ânes pour la nourriture des carnivores. Par conséquent, on fait appel à des fournisseurs pour des raisons administratives».
Expliquant que pour d’autres carnivores, l’alimentation n’est pas constituée que de viande, il renseigne que les autres espèces se nourrissent de poissons et que les spécialistes de vie des animaux en captivité leur donnent parfois des poulets. C’est notamment le cas des crocodiles. Les oiseaux ne sont pas non plus laissés en rade dans l’organisation ainsi que dans la planification du régime alimentaire du parc. Les céréales dominent dans leur nourriture.
Pour la structure qui dispose d’un budget de 25 millions de francs Cfa pour le volet nourriture, l’ensemble des précautions mises en œuvre pour garantir une bonne alimentation des pensionnaires du parc vise à réduire, voire éradiquer à son niveau le plus absolu les taux de mortalités au niveau de la population animale. «À chaque fois qu’il y a mort, nous faisons une autopsie pour en connaître la cause du décès. Et si c’est une maladie, nous prenons nos dispositions pour éviter qu’elle se propage», explique l’Adjudant Ndiaye.
Un prix d’entrée pour les visiteurs très dérisoire
Toutefois, dans ce contexte de hausse généralisée des coûts des denrées alimentaires, les charges du zoo de Hann, ne cessent d’augmenter, sans que les finances suivent la même dynamique. Car, aussi paradoxal que cela soit, les tarifs pour la visite restent statiques depuis des décennies. Les tickets d’entrée au parc s’établissent, en effet, à 75 francs pour les enfants âgés de moins de 7 ans, 200 francs pour les enfants entre 7 et 18 ans. Pour les personnes âgées de plus de 18 ans, l’entrée revient à seulement 350 francs. Pour les groupes scolaires, de la maternelle à l’université, le prix de visite réduit s’élève à 40 francs par personne.
Ces tarifs sont fixés par un décret présidentiel qui date de 1986. «Les tarifs n’ont pas subi de variation malgré la dévaluation. Parce que l’Etat cherche, à travers ces faibles prix, l’éducation des enfants», souligne le responsable du parc zoologique qui concède que ces tarifs restent quand même très bas. «La recette mensuelle tourne autour de 1 million de francs Cfa et même au mois d’août, on a fait plus, puisqu’on a été autour de 1,700 million de francs Cfa», indique-t-il avant de préciser que la destination de ces recettes issues des entrées, qu’ils sont tenus, avant le 25 de chaque mois, de les envoyer au niveau du Trésor. «Mais ce que l’Etat dépense annuellement pour le parc est largement supérieur aux recettes que nous réalisons», martèle l’Adjudant Ndiaye.