KHALIFA SALL VA DÉMOLIR BENNO BOKK YAAKAAR
Le funeste destin qui se dessine pour le chef de l’Etat et Benno bokk yaakaar soumet les cœurs dans la cadence des grosses paniques : un chef de l’Etat sans dakar.
une bonne parcelle du pouvoir est en jeu le 29 juin prochain. Si l’Alliance pour la République (Apr) s’incline devant Khalifa Sall, actuel maire de Dakar, aux Locales prochaines, Macky Sall va devoir être un président de la République sans une prise sur la capitale.
Il faudra alors bien aux apéristes une sorte de Juliette Drouet comme Hugo torturé par la trahison de son Adèle. Dakar qui abrite le palais de la République sous le contrôle d’un parti autre que celui aux affaires ! Un mandat entier sans Dakar ? C’est l’incroyable destin qui guette Macky Sall. Ce n’était jamais arrivé depuis l’indépendance.
Le maire de Dakar a toujours été sous la coupe réglée du parti présidentiel. Une parfaite allégeance au chef de l’Etat au point qu’on se demandait si le premier magistrat de la ville avait une autorité. Les libéraux, champions en mixtion institutionnelle en étaient arrivés à faire du maire le président de l’Assemblée nationale.
Et puis quel joli désordre que de voir le chef de l’Etat accueillir ses hôtes de marque aux côtés d’une personnalité que lui imposent les urnes. L’Apr a beau être aux manettes, sa souveraineté sur Dakar risque d’être limitée. Cette perspective-là n’est plus à écarter. Mais alors que de dégâts en vue sur la coalition Benno Bokk Yaakaar !
Et que de trésors de subtilités il faudra étaler pour briser cette tradition passée au statut de mythe. Car, qu’on l’avoue ou pas, sous les faisceaux des lustres dorés, les apéristes appréhendent les Locales le cœur battant la cadence des grandes paniques. La bataille de Dakar aura bien lieu. Et Khalifa Ababacar Sall sera effectivement en lice pour défendre son écharpe.
Voilà qui va inéluctablement fissurer Benno Bokk Yaakaar, la machine qui a broyé Wade en 2012. Et cela donne normalement le sourire au Parti démocratique sénégalais (Pds). Les libéraux avaient multiplié les imprécations contre Bby le donnant pour mort à chaque coup de boutoir d’un leader allié.
Dès le début de la gouvernance et un peu avant la traque aux biens mal acquis, les libéraux avaient juré que ça n’irait pas loin. "Ils ne peuvent pas s’entendre !", annonçaient-ils à l’endroit des fortes têtes de la coalition au pouvoir. Véritable tour en acier, la formidable entente contre le pape du Sopi, Me Wade, résiste.
Macky Sall qui peinait à baisser les prix des denrées, prisonnier qu’il est des seigneurs du marché avait encore besoin de la rhétorique des alliés. D’autant que les libéraux, principales cibles de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) avaient décidé d’investir la rue et d’en faire leur principal instrument de dissuasion.
La cassure
Cette réalité-là n’est plus de mise. Les signes avant-coureurs sont partis de la Ligue démocratique (Ld). Les jallarbistes ont affiché leur volonté de rouler pour Khalifa Sall aux Locales du 29 juin. Invité à l’émission le Grand Jury de la Rfm, Mamadou Ndoye, secrétaire général de la Ld La Ligue démocratique (Ld) s’est fait formel :
"Khalifa Sall et le Parti socialiste sont nos alliés, comme l’Afp et le reste. Et aujourd’hui, compte tenu de ce qu’il a apporté à la mairie de Dakar, son bilan est tout à fait appréciable. Par conséquent, si demain notre parti était placé devant la responsabilité de soutenir (quelqu’un), certainement nous allons soutenir Khalifa Sall".
Se faisant plus précis Ndoye a martelé : "Nous allons le soutenir". Ce coup porté à la coalition Benno Bokk Yaakaar n’avait pas ébranlé les apéristes. Personne n’avait réagi dans le camp des marrons-beige. Sous-estimaient-ils l’apport de la Ld ou alors étaient-ils sûrs de leur suprématie face à au "candidat" un Khalifa Sall ? Sans doute, les deux à la fois.
Parti au pouvoir, l’Alliance pour la République semblait certaine de sa force d’entraînement. Les transhumants aidant, les proches de Macky ne pouvaient nullement envisageaient l’existence d’une force politique capable de leur barrer la route de la mairie de Dakar. Ils n’avaient pas alors compté avec la possible dislocation de la coalition qui a leur a ouvert les portes du palais de Roume.
Car, les cocos de Khar Yalla ont eux aussi entonné un cantique peu rassurant. Lors de la réunion de son bureau politique, le Parti de l’indépendance et du travail (Pit) a émis la consigne du vote utile. Personne ne s’y trompe : les camarades d’Amath Dansokho vont probablement trancher en faveur des tenants de la mairie de Dakar.
Le Pit en a donné l’avant-goût en fustigeant dans la déclaration ayant sanctionné la rencontre de son Bp l’Apr "piquée par le virus de l’hégémonisme". Avec leurs ministres et leurs députés, le Pit et la Ld gardent, certes, en perfusion des formations politiques vidées de leur substance.
Mais, la météo politique semble leur dessiner un bien meilleur avenir avec Khalifa Sall. Formations politiques à l’envergure sociale très modeste, la Ld et le Pit sont forts d’une expérience et d’une capacité de nuisance à l’efficacité infaillible. En témoigne leur implication active aux deux alternances au sommet de l’Etat que le Sénégal a connues.
A la veille de la Présidentielle fatale aux socialistes, le "pôle de gauche" avec Dansokho et le professeur Abdoulaye Bathily à sa tête est allé chercher Wade en France pour le convaincre à rentrer et à porter l’espoir de l’opposition face au Parti socialiste. Dansokho et Bathily étaient encore là en 2012 face au pouvoir quasi-absolu de Wade.
Autre force politique en dissidence : Tekki. Ce mouvement n’a pas encore dit qu’il allait mettre de l’eau au moulin de Khalifa Sall, mais sa colère contre les tenants du pouvoir dégouline de partout. Le député et chef de file de Tekki avait dans l’affaire du terminal vraquier du Port à Necotrans obtenu de concert avec 29 autres parlementaires une question d’actualité sur la légalité et l’impact sur les entreprises opérant au niveau du mole 8 de la fameuse concession.
L’affaire a failli à atterrir au tribunal. Car, un député apériste qui avait accusé Diallo de chantage a dû se rétracter après avoir reçu une sommation interpellative.
Appétit
A Grand-Yoff même fief politique du maire de Dakar, la tension entre Apr et Ps est vive. Le Premier ministre Aminata Touré est décidée à tester sa popularité dans cette banlieue populeuse. Elle multiplie les meetings comme celui tenu le week-end dernier à la Cité millionnaire.
"L’Apr s’est retrouvée derrière Aminata Touré pour la conquête de la mairie de Grand-Yoff", alerte, enthousiaste, l’initiateur du meeting, Moussa Sané. Son propos se durcit et attaque la gestion de leur commune par les libéraux et les socialistes. Il est temps que son parti, l’Apr, soit aux manettes afin de marquer la différence. Une position qui déclare la guerre à l’allié Khalifa Sall.
Mais le meilleur se trouve dans cette prophétie de Moussa Sané : "l’Apr va non seulement remporter cette commune mais nous allons prendre le contrôle de la ville de Dakar". Point de doute, Mimi Touré est en phase avec son responsable local. Quelque peu affaiblie par la fronde du "jeune frère Adama Faye", frère de l’épouse du chef de l’Etat, qui s’est déclaré candidat pour la commune de Grand-Yoff, Mimi lance :
"Je l’invite à nous rejoindre pour ce nouveau combat qui consiste consolider la victoire de Macky Sall lors des prochaines élections locales". Il faut donc à tout prix déboulonner le maire de Dakar. Et la première étape passe par Grand-Yoff. Khalifa Sall en est conscient. Faisant dans la discrétion, il réunit son monde à l’instar de cette réunion secrète rapportée par la presse.
Au cours de cette fameuse rencontre, 18 partis politiques et un collectif de 26 quartiers de Grand-Yoff ont fait bloc autour de Sall. Voilà qui soumet à rude épreuve la délicate amitié entre le secrétaire général du Ps et le président de l’Apr. Une subite complicité semble cimenter depuis quelque temps les rapports entre les deux hommes. L’image commence d’ailleurs à intriguer le public.
Cette subite effusion est, à l’apparence, si pleine de spontanéité qu’elle s’affiche indifféremment sur les tribunes ou les espaces publics. Car, Macky et Tanor placardent leur complicité aussi bien dans les événements officiels que politiques. Une illustration ? Le meeting de l’Apr au Palais des Congrès de la Porte-Maillot, en France. Là, Tanor et Mahmouth Saleh encadrent le chef de l’Etat.
Et comme pour répondre d’avance aux interrogations, peut-être aux sarcasmes, le secrétaire général du Ps lance : "Je suis ici, parce que je suis dans la coalition Benno Bokk Yaakaar". Mieux, le patron des socialistes qui semble chercher à freiner les velléités séditieuses à l’intérieur de Bby assène :
"dans la période que nous vivons au Sénégal et dans le monde, nous sommes à l’ère des coalitions". Le maire de Dakar avait, en effet, demandé aux chefs de parti de Bby d’aller s’occuper de leur formation politique plutôt que de se mettre aux basques de Macky Sall. La sortie lui avait valu les remontrances du Pit et de la Ld. Le maire n’en était pas à sa première "effronterie".
En 2009, juste après son élection, Khalifa a étalé noir sur blanc tous ses biens devant un jury d’honneur composé d’Amadou Makhtar Mbow, Mamoudou Touré, Cheikh Hamidou Kane, Abdoul Aziz Kébé et Abbé Jacques Seck. "Ce n’est pas un acte politique encore moins des calculs politiques ou politiciens", a-t-il juré, la main sur le cœur.
"En France, un maire de ville de plus de 100.000 habitants est obligé de faire ce genre de déclaration. Si elle n’est pas faite à temps ou si elle est incomplète, le maire peut être inéligible", argue-t-il. Volonté de transparence, selon Amadou Makhtar Mbow, "attitude citoyenne", apprécie Cheikh Hamidou Kane. La décision du maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall d’effectuer une déclaration de patrimoine a séduit plus d’un.
Devant un jury d’honneur qui force le respect, Sall a fait la lumière sur ses biens. Tous s’accordent à magnifier un acte à la portée pédagogique certaine. "Je ne sais pas si je suis riche, mais je rends grâce à Dieu, je me suis évertué à travailler très tôt en m’organisant surtout pour être à l’abri de certains besoins primaires", a déclaré le maire de Dakar.
La polémique s’installe dans son propre parti. Aminata Mbengue Ndiaye et Abdoulaye Willane annoncent qu’ils ne se soumettront pas à l’exercice. Si à cet acte on ajoute son courage face aux ambulants, sa prise de position sur l’affaire du mur de l’ambassade de Turquie et l’opération de pavage des rues de Dakar, il y a de quoi se demander si Khalifa Sall ne vaut pas le suicide collectif : faire sauter Benno Bokk Yaakaar.