LE TAMBOUR MAJOR EN APOTHÉOSE
85 ans de Doudou Ndiaye Rose au Grand Théâtre national
Pour fêter les 85 ans du percussionniste à la renommée internationale Doudou Ndiaye Rose, le hall du Grand Théâtre s’est mué en grand guéw. Il a accueilli jeudi dernier des danseurs et batteurs qui ont permis aux Américaines de se défouler comme des forcenés sur la scène. Cela au grand bonheur du Tambour major et du chef d’orchestre américain Nathan Fuhr.
Il est 20h, les chaises sont bien ordonnées tout au milieu du hall central du Grand Théâtre. Mais elles sont encore vides. Dans un des coins de la salle sont rangés une dizaine de tambours tandis que de l’autre côté sont placées 5 batteries.
C’est ainsi que le Grand Théâtre accueille peu à peu ses invités. Doudou Ndiaye Rose lui, dans un boubou bleu, est occupé à échanger des accolades par-ci, poignées de mains par-là. Ses fils et petits-fils, eux, affûtent leurs tamtam.
Deux gamins se disputent à qui mieux-mieux. Font-ils sans doute partie des petits-fils du maître percussionniste ? Ils se disputent et chacun tambourine comme un chef. Avec la ferveur qu’ils déploient et la lueur qui se lit dans leurs yeux, l’on devine qu’ils aiment ce qu’ils font.
Un tane beer à l’américaine
Après une heure de protocole, le spectacle commence enfin. Debout au milieu, Doudou Ndiaye Rose gratifie ses invités d’un spectacle de haute facture. Il a, comme à l’accoutumée, séduit son public et de surcroît un public américain.
Avec son tam-tam au milieu donnant des ordres, mimant des gestes, les spectateurs observent avec admiration ce vieux qui, malgré le mal de genoux dont il se plaignait juste avant, apparaît au meilleur de sa forme.
«Nous sommes ici jusqu’à 4h du matin», blague-t-il. Une autre façon pour lui de montrer qu’il n’a rien perdu de son talent. Tournoyant sur lui-même, courant, sautant, et virevoltant de chaque côté de la scène, Doudou Ndiaye Rose tape fort sur son tambour.
De même, les batteurs américains le suivent sous la houlette de leur maître d’orchestre Nathan Fuhr. Un homme qui s’est parfaitement intégré à la culture sénégalaise. Habillé en tenue traditionnelle bleu blanc, il bat le tam-tam comme un vrai Sénégalais et imite à perfection les gestes de celui qu’il considère comme son marabout. «Yay sama serigne» (Ndlr : tu es mon marabout), dit-il avec un accent américain s’adressant à Doudou Ndiaye Rose.
Cela explique sans doute le pendentif qu’il porte au cou. Une grosse médaille en argent sur lequel est incrusté la figure de son maître : Doudou Ndiaye Coumba Rose. De même, les danseurs ont subjugué le public du Grand Théâtre de par leurs talents.
Du sabar à la japonaise au break dance du groupe Deggi Daaj en passant aux back de Afreekanam, chacun danse et suit avec tact les rythmes des batteurs. Des batteurs que rien n’arrêtent, même pas un bâton fendu en plein spectacle.
Aucune fausse note n’est permise. Ils suivent leurs rythmes tantôt lents, tantôt saccadés ou effrénés. La fureur de la danse émerveille tout le monde, des applaudissements et des sifflements émanent de cette assistance coite.
Une relève déjà prête
Doudou Ndiaye Coumba Rose est parvenu à l’exploit de faire connaître et de porter le nom du Sénégal par-delà ses frontières. Il a en outre réussi à exporter la culture sénégalaise par le biais de son art. Il est connu aujourd’hui à travers le monde. Au Japon par exemple. Les Américains aussi l’adulent. Au seuil de ses 85 ans, il est important pour le vieil homme de bien préparer la relève.
«Elle est déjà faite», promet-il. Son art ne sera jamais perdu parce que, soutient-il, il a foi en ces fils et petits-fils. «Tapha Ndiaye Rose est là. Il jouera à ma place.»
Le vieux se retire pendant un court instant pour se reposer, laissant la place à son Tapha Ndiaye qui, lui aussi, assure comme un chef. Il suit ses pas.