LITTORAL EN PERIL !
CONSTRUCTIONS ANARCHIQUES, EROSION, POLLUTION ...
Les environnements marin et côtier subissent des agressions diverses qui ont pour conséquences : l’érosion côtière, la pollution marine, la destruction des habitations et la perte de la biodiversité. Le dernier rap- port sur l’état de l’environnement (2010-2015) tire la sonnette d’alarme.
L ’occupation massive du littoral n’est pas nouvelle. Ce qui est nouveau, c’est qu’elle a pris, ces dernières années, une tournure alarmante. Dans le cadre de l’Organisation de la Conférence islamique qui s’est tenue à Dakar en 2008, l’Agence nationale pour l’organisation du 13e sommet de l’Organisation de la conférence islamique (ANOCI) a réalisé des infrastructures à vocation touristique.
Le programme de réalisation d’infrastructures avait été principalement implanté sur la corniche ouest. Or, ce n’est un secret pour personne que cette dernière représente un élément stratégique dans la structuration économique, culturelle et environnementale du pays.
Le deuxième rapport sur l’état de l’environnement au Sénégal (2010-2015) publié sous l’égide du Centre de Suivi écologique (CSE) et écrit par plusieurs acteurs étatiques et non étatiques, tire la sonnette d’alarme sur cet état de fait. « Il faut dire que l’urbanisation inconsidérée de cet espace est un facteur aggravant de risques, tels que les séismes, les glissements de terrain, l’avancée de la mer », avertit ce « document de référence » sur l’environnement au Sénégal.
« La décision prise par les autorités d’embellir la corniche de Dakar et de construire de nouvelles infrastructures hôtelières sur cette façade maritime, poursuit le rapport, a la particularité d’avoir densifié, avec la nouvelle infrastructure routière et ses ouvrages lourds le mur de béton entre l’océan et la ville. Privant ainsi Dakar, des vents marins qui l’empêchaient d’étouffer de chaleur ».
LE BATI, PRINCIPALE MENACE
Au niveau du littoral sénégalais, long de 700 kilomètres, le développement des constructions immobilières souvent anarchiques, est la principale menace. « L’extension du bâti en ce qui concerne le secteur touristique constitue l’une des principales sources d’altération des écosystèmes littoraux. Cette extension est très rapide dans certaines régions littorales comme la Petite Côte sénégalaise », déplore le rapport.
Pis, généralement, ces constructions se font souvent à moins de dix mètres du rivage contre les 100 mètres requis. Cette extension des bâtiments à usages touristique ou d’habitation est un facteur aggravant de l’érosion côtière. C’est le cas à Saly où L’Etat et les promoteurs privés rivalisent dans la construction d’établissements hôteliers ou de résidences. Récemment, la construction d’une résidence hôtelière a obstrué la lagune, faisant ainsi monter le niveau de la mer, qui a envahi les plages.
Aujourd’hui, Saly n’a plus de plage et de nombreux réceptifs hôteliers et une partie du village de Saly Koulang sont menacés par les vagues. « Ce littoral, déjà fragile morphologiquement, subit les effets de l’urbanisation et d’une exploitation touristique exigeant plus d’espaces et induisant une compétition et une cohabitation qui dégradent l’environnement et les écosystèmes », prévient le document. C’est le cas à la Porte du Millénaire, la banlieue dakaroise comme Mbao, Thiaroye, mais aussi Rufisque et Bargny, où les inondations liées à l’érosion côtière sont devenues monnaie courante.
A Saint Louis, l’ouverture du « Canal de délestage » avait permis de « soulager » les habitants des inondations de 2003 en évacuant les eaux de pluie vers la mer.Reste que cette brèche est passée de 250 mètres, au début, à plus de 800 mètres. Aujourd’hui, ce « canal de délestage » menace de rayer de la carte beaucoup de quartiers comme Coxxu Bathie, la Langue de Barbarie et Ndoune Baba Dièye. Ce n’est pas tout. « L’ouverture de la brèche a causé la disparition de nicheuses d’oiseaux au niveau de la Langue de Barbarie.
Des menaces pèsent aussi sur le parc ornithologique de Djoudj », indiquent les auteurs du rapport. Ces derniers signalent également que « la salinisation des terres autour de la Langue de barbarie, entraîne une baisse de la productivité des maraîchers, qui se répercute sur l’approvisionnement des hôtels ».
POLLUTION MARINE
L’environnement marin et côtier est aujourd’hui menacé par la pollution industrielle et domestique. Ce problème de la pollution marine concerne surtout la région de Dakar, qui concentre à elle seule 87% des entre- prises du pays. Les sources de pollution mari- ne sont nombreuses. On peut citer : les ordures ménagères, les hydrocarbures et les rejets industriels. A Dakar, la baie de Hann qui fut la plus belle du monde après celle de Rio de Janeiro, est fortement affectée.
Le développement des activités industrielles et portuaires au niveau de cette baie et l’implantation de certains quartiers et villages traditionnels, souvent de façon spontanée, ont aggravé la pollution. A Dakar, chaque jour près de 180 000 mètres cubes d’eaux usées sont jetés en mer.
En conclusion, les auteurs insistent sur le fait que le domaine marin et le littoral sénégalais regorgent de potentialités socio-économiques. « Ces milieux constituent un capital naturel jouant le triple rôle de développement financier, en ce sens que son exploitation commerciale est source de taxes et de redevances versées à l’Etat et aux collectivités locales, notamment avec les infrastructures hôtelières et les quais de pêche. Ils constituent également des supports de services environnementaux. Car les écosystèmes permettent la survie d’espèces exploitables économiquement », mentionne le rapport.
Avant d’indiquer que « force est de constater que cet environnement marin et côtier est aujourd’hui menacé et connaît des dégradations diverses qui ont pour conséquence l’érosion côtière, la pollution marine et la destruction de l’habitat et la perte des zones touristiques ». En guise de recommandation, le rapport sur l’état de l’environnement recommande l’adoption d’une loi sur le littoral pour mettre fin à la « superposition de régimes fonciers », pour apporter un plus. La mise en place d’une structure institutionnelle, chargée de la gestion des zones côtières est recommandée, entre autres.