A SAINT-LOUIS, DES ITINERAIRES ARTISTIQUES POUR PROMOUVOIR L’ENTREPRENEURIAT CULTUREL
Dans le sillage de la 6ème édition des "Itinéraires artistiques" de Saint-Louis, plus d’une vingtaine d’artistes expose au Centre de recherche et de documentation du Sénégal (Crds). L’événement promeut l’entrepreneuriat culturel dans la ville.

Dans le sillage de la 6ème édition des "Itinéraires artistiques" de Saint-Louis, plus d’une vingtaine d’artistes expose au Centre de recherche et de documentation du Sénégal (Crds). L’événement promeut l’entrepreneuriat culturel dans la ville, jusqu’au 30 avril.
A Saint-Louis, de jeunes artistes pour l’essentiel, venus de tout le Sénégal, subliment le beau dans toute sa splendeur. Au-delà de ce travail, la 6ème édition des « Itinéraires artistiques » est une récompense pour Ndar Créations, structure organisatrice de l’événement. Depuis six ans, Abdou Karim Fall et ses amis enchantent, dans une belle alchimie de couleurs et de formes, le public de la capitale du nord. L’exposition est de haute facture. Pêle-mêle, on note la présence d’Aminata Diobe Taye et son « Waki Mak/le viatique ». Cette artiste a la capacité de faire un beau mix, où le wax tient une place de choix. Tandis que sa compère Awa Ndiaye, dans un style propre, évoque les caprices juvéniles en peignant le radieux chez l’enfant. Plus loin, la douceur de la mère, qui porte son bébé, est mise en exergue dans « Amour Maternel ». Les œuvres d’Awa Ndiaye, avec en toile de fond des carrés superposés, sont attirantes. Dans une fresque, elle valorise le charme féminin et toute sa grâce rehaussés par son habillement. Cette finesse dans le geste, on la retrouve également chez Al Seck qui évoque la place de la diversité comme socle du Sénégal. Avec « Le sourire du Foulbé », « la Femme Poulaar » ou «l’Enfant Bédik », Al Seck offre des œuvres vivantes, obtenues grâce à la technique de l’huile au couteau. Que dire de l’initiateur Abdou Karim Fall qui, dans « Partage », « Lumière du jour » et « Ressources naturelles », revient comme toujours sur les vagues, le poisson, le bleu aquatique et le disque solaire (deux des tableaux sont circulaires). Avec lui, c’est l’enfant de Guet Ndar, sous influence de la mer, qui parle toujours. Cette exposition est une occasion pour Aziz Ndiaye de rappeler la beauté de la roche. Avec ces deux créations, l’artiste, qui travaille à la Manufacture des arts décoratifs de Thiès, donne une seconde vie à la calebasse qui devient roche. L’environnement qui découle de sa performance est rustique et rappelle les rigueurs de la vie dans les campagnes.
TROIS GÉNÉRATIONS D’ARTISTES
La richesse de cette exposition repose sur le fait que l’on retrouve trois générations d’expressionnistes. Parmi ceux-ci, le patriarche du groupe, El Hadji Adama Sylla, et ses photos qui retracent Saint-Louis et son histoire, avec des images de 1856, lors de l’inauguration du Pont Faidherbe. Dans ces clichés, on voit « Gouye Seedelé », l’arbre totem de toute une génération de circoncis de Saint-Louis. Les trois clichés du vieux El Hadji Adama Sylla sont une petite partie de cette grande collection représentant Ndar, qu’il a par devers lui. A travers ces itinéraires, le public repense, en quelque sorte, la photographie avec Ibrahima Thiam. Gorgui Boye, originaire de Gorée Île Mémoire, propose un travail de conception, avec une belle alchimie de couleurs. Quant à Ousmane Aw, ses deux phases techniques graphiques sont agrémentées de trois points, ouvrant ainsi des perspectives de recherche et d’interprétation. Que deviendrait une expo dans la ville de Saint-Louis sans une dose de spiritualité ? Ce ne serait certainement pas complet, et c’est pourquoi Seyni Fall propose une belle virée dans le questionnement perpétuel à soubassement religieux. Mais, le coup de cœur de cette prouesse a certainement été El Hadji Keita et sa sculpture « Ken Bougoul », la danseuse. Une jeune fille, crinière au vent, faite de matériaux de récupération, montre toute sa souffrance dans ce monde si injuste. Cette cérémonie a été également un moyen pour les artistes de porter le plaidoyer sur la protection de la nature. C’est en ce sens que Moussa Ndiaye a présenté un travail, dont l’inspiration semble naître des côtes, avec une forte pensée aux victimes de l’érosion côtière. Il y évoque même la transformation urbaine, avec la modernité. Quant à Ariane Senghor, elle est une illusionniste qui rappelle que ce monde est une apparence, et « si on ne se dit pas la vérité à nous-mêmes » que reste il de notre humanité ? Les femmes reviennent encore, avec Betty Kandé qui nous plonge dans la prestance des foulards de tête et la beauté de la femme. Elle partage nos cultures, avec le port des bijoux. Les Signares, les doucereuses toucouleurs, en sont des exemples. Samba Sarr, Aminata Sall, Masta Ly et bien d’autres plasticiens montrent la belle dynamique dans le milieu des arts, surtout chez les jeunes. La visite pouvait prendre fin avec Serigne Guèye et son mobilier urbain. Il propose un salon de quatre places, plus une table basse. Le fer reprend sa noblesse, et on peut s’y prélasser calmement en assimilant les belles surprises de cette exposition.