UN MOIS APRÈS L'OUVERTURE DE L'AIBD
On note des débuts pleins d'espoirs

Un mois après son ouverture marquée notamment par quelques désagréments liés à plusieurs facteurs, le nouvel aéroport de Diass a trouvé le train normal propre à une plateforme aéroportuaire digne de ce nom.
Mercredi 3 janvier 2018. Il est 13 heures 48 minutes. Le Boeing 737-400 de la compagnie aérienne nigériane Med-View Airline s’engage, dans un bruit assourdissant, sur la longue piste de l’Aéroport international Blaise Diagne (Aibd). En quelques secondes, l’appareil à destination de Lagos se déploie dans le ciel de Diass enveloppé de poussière. Quelques minutes plus tôt, c’est un avion de la compagnie américaine Delta Airlines et un autre de la compagnie émiratie Emirates qui ont décollé de ce même tarmac.
Au même moment, dans la salle d’embarquement d’où l’on peut admirer le spectacle qui se déroule sur le tarmac à travers les vitres en concaves, les passagers à destination de Nouakchott et de Milan s’apprêtent à embarquer par deux des six passerelles télescopiques qui relient l’aérogare aux avions. Des passagers dont les vols ne vont pas tarder patientent tranquillement sur les bancs tandis que d’autres, accoudés aux deux restaurants bars, trompent leur faim. L’ambiance est d’un ton plus bruyant dans la salle adjacente où les passagers d’un vol de Kenya Airways remplissent les dernières formalités d’enregistrement dans l’une des 44 box. Une fois les étapes de contrôle de la police et des douanes franchies, il est fait en sorte que les passagers traversent la zone du Duty Free, une manière de les inciter à faire des achats. Un mois après sa mise en service, l’Aéroport international Blaise Diagne, malgré des débuts difficiles, est opérationnel.
A l’image d’un nouveau-né encore fragile, des moments de doute et d’incertitudes ont jalonné les premiers pas de la plateforme, comme cette grève de 24 heures des contrôleurs aériens de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) survenue une semaine après l’ouverture de l’aéroport et qui a eu des conséquences fâcheuses aussi bien pour l’aéroport, les compagnies que pour les passagers. Sur les réseaux sociaux, les critiques, photos ou vidéos à l’appui, avaient fusé. Les images montrant des passagers déboussolés, des tonnes de bagages abandonnées dans le hall des arrivées ou encore des énergumènes marchant sur les tapis-bagages ou sortant par l’ouverture des tapis-bagages avaient envahi la toile. Chacun y allait de son commentaire.
Plus de 11,6 millions de litres de kérosène fournis
Un mois après, tout semble revenu à la normale. Les balbutiements des débuts se sont envolés et l’Aibd a retrouvé le train-train quotidien et banal propre à un aéroport digne de ce nom. Une situation dont se félicite des passagers rencontrés dans le hall des départs.
« Avec toutes les critiques que j’ai entendues ou lues, j’admets que j’avais des appréhensions avant de venir. Je suis heureux de constater que tout cela est derrière nous. J’ai trouvé une belle infrastructure, moderne et spacieuse qui nous change beaucoup de l’ancien aéroport. Bref, j’ai envie de dire que le Sénégal dispose d’un vrai aéroport », confie ce passager en partance pour Abidjan qui préfère garder l’anonymat. Me Augustin Senghor, en partance pour la cérémonie de remise du Ballon d’or africain à Accra (Ghana), fait chorus. Le président de la Fédération sénégalaise de football se dit charmé. « La mise en route a été difficile, mais c’est normal, car c’est la première fois qu’on vit l’expérience de devoir déménager d’un aéroport à un autre. C’est heureux de voir que tout est rentré dans l’ordre et c’est sûr que le service va aller en s’améliorant », dit-il.
A l’entrée du site des cuves à kérosène, une dizaine de camions-citernes sont alignés. Le sujet a fait couler beaucoup d’encre. Pourtant celles-ci étaient fonctionnelles depuis le 23 novembre, deux semaines avant l’ouverture de l’aéroport, assure-t-on du côté du Ministère des Transports aériens et de Smcady, gestionnaire de ces infrastructures.
Ces cuves ont été certifiées et chargées depuis cette date et il restait à terminer le système hydrant, à savoir le réseau souterrain qui relie les cuves aux aéronefs qui est opérationnel depuis deux semaines.
Du 7 au 31 décembre 2017, le nombre d’avitaillement d’avions par Smcady est estimé à 814 pour un volume total de 11.689.260 litres de kérosène Jet A-1 (un carburant de type kérosène convenant à la plupart des aéronefs à réacteurs obéissant à des exigences internationales rigoureuses). Quant à la boutique Duty free installée au Départ et à l’Arrivée de l’Aéroport International Blaise Diagne de Diass, elle a reçu, selon les informations fournies par la société d’exploitation de l’aéroport LAS, 27.000 clients et a vendu 67.947 articles.
Plus de 2.100 mouvements d’avions en moins d’un mois
Au 5 janvier, plus de 2100 mouvements d’avions ont été notés à l’Aibd pour plus de 200.000 passagers. Une cinquantaine de compagnies aériennes ont rejoint la plateforme alors que d’autres ne vont pas tarder.
Un motif de satisfaction pour la ministre des Transports aériens et du Développement des infrastructures aéroportuaires. « C’est une grosse performance en dépit de quelques désagréments notés durant la première semaine, désagréments consécutifs au déménagement de l’Aéroport international Léopold Sédar Senghor à l’Aibd », a réagi Maïmouna Ndoye Seck. Entre le 7 et le 31 décembre 2017, le gestionnaire de l’aéroport, Limak-Aibd-Summa (Las), dit avoir enregistré 517 départs d’avions et 412 arrivées pour 162.355 passagers, soit une hausse de 25.239 passagers par rapport à la même période de l’année 2016. Ce que confirme le commandant de permanence Meïssa Fall qui explique que le mois de décembre, du fait des vacances de Noël et de fin d’années, a enregistré un rush de passagers à Aibd. « Il y a eu une petite accalmie entre le 25 et le 26 décembre et entre le 31 décembre et le 1er janvier, sinon tous les jours ce fut un flot continu », explique-t-il. Bien en retrait de l’aérogare-passagers, la zone fret bouillonne d’activités.
C’est un ballet incessant de véhicules. Devant le bureau des Douanes, une vingtaine de personnes attendent de remplir les formalités d’usage. Non loin de là, les travaux du village cargo dont la gestion est confiée à un privé sénégalais, plus précisément Teylium, avancent à grands pas. Ici aussi, après des débuts difficiles, les choses semblent avoir retrouvé leur rythme normal.
« Beaucoup de contrevérités ont été distillées à propos de la zone fret. La réalité est qu’au moment de rejoindre Aibd, tout le personnel n’avait pas les réflexes nécessaires et l’organisation n’était pas totalement au point. Mais cela concernait plutôt les compagnies spécialisées dans le fret qui avaient besoin de faire auditer les installations. Les audits étaient programmés entre le 13 et 15 décembre et dès qu’ils ont été terminés, le 20 décembre, Lufthansa a commencé ses opérations », a expliqué le ministre sur les ondes d’une radio privée de la place. Ainsi, 2061 tonnes de fret ont été traitées dont plus de 990 tonnes au départ d’Aibd.
Une offre de transport diversifiée
Des taxis jaunes, des taxis aérocab, des limousines, des bus classiques et express sont affrétés par les sociétés de transports pour desservir l’Aéroport international Blaise Diagne avec des tarifs bien étudiés pour satisfaire tous les usagers. En ce mercredi matin, un vent poussiéreux balaie l’Aéroport international Blaise Diagne. Des accompagnants de passagers en partance pour le Ghana, la Mauritanie, l’Europe, l’Asie et d’autres contrées attendent dans le hall. Certains sont en train de se restaurer dans l’un des restaurants-bars.
Dehors, les véhicules attendent les clients. L’Aéroport international Blaise Diagne (Aibd) se caractérise par une offre de transport diversifiée. Plusieurs sociétés de transport publiques que privées sont présentes à la plateforme aéroportuaire. Si certains opérateurs proposent un paquet de services, d’autres ont une cible bien déterminée avec un tarif bien étudié qui prend en compte plusieurs facteurs dont le péage sur l’autoroute.
La société publique de transport Dakar Dem Dikk propose en plus des lignes classiques, des navettes express. Les tarifs qui varient entre 3000 et 6000 FCfa. Un agent hésitant dans un premier temps vante les avantages de l’offre de la société publique de transport. « Nos lignes sont régulières et ponctuelles. Nos bus n’attendent pas d’être pleins. A l’heure, ils prennent le départ », confie-t-il, sous le couvert de l’anonymat. Justine, une passagère, confirme. « Notre bus a pris le départ à l’indiquée indiquée », affirme-t-elle, satisfaite par le service. En plus de l’offre vers la capitale, la société publique de transport Dakar Dem Dikk a pensé aux populations de l’intérieur du Sénégal. Des bus sont positionnés à Thiès et à Mbour. Les passagers qui viennent de l’axe Nord du pays peuvent emprunter les bus de Dakar Dem Dikk à Thiès alors que ceux qui viennent de l’axe Sud peuvent prendre les bus à Mbour pour rallier l’aéroport international Blaise Diagne.
A côté, de nouvelles compagnies proposent leurs services. Il s’agit, entre autres, de Senecartours, Dakar-Limousine, des chauffeurs de taxis jaunes qui étaient présents à l’aéroport Léopold S. Senghor. La société Senecartours qui gère le parking propose des bus de 25 à 35 places avec climatisation (aérobus). Elle met également à disposition des clients des taxis « aérocab ». Une présence qui n’est pas du goût des chauffeurs de taxis jaunes. Ils estiment que ces nouvelles compagnies sont favorisées par rapport à eux. « Comment peuvent-elles (les autorités) nous expliquer la différence des tarifs entre les taxis « aérocab » et les nôtres ? », se demande Serigne Ngom. Il assure que leurs véhicules ont tous les commodités. « En fait, l’Aéroport international Blaise Diagne, c’est pour Mbaye Sarr alors que ces véhicules sont des clandos », raille Lamine Touré. Un agent de Senecartours qui a requis l’anonymat en rit. Il prend la remarque avec philosophie. « On ne peut pas empêcher les gens d’avoir leur opinion et même de jaser. Mais nous avons un parc de véhicules neufs et nous assurons un service de qualité », se défend-il. Notre interlocuteur, en bon agent marketing, vend bien l’offre de service de Senecartours. « Nous avons souscrits à une assurance tous risques. De plus, quand un de nos véhicules tombent en panne en cours de route, un autre chauffeur est dépêché aussitôt sur les lieux pour le ramener jusqu’à destination. Ce service peu d’opérateurs le propose », déclare-t-il.
Quant à la compagnie «Dakar Limousine », elle est spécialisée dans le transport haut de gamme de voyageurs et de personnalités avec « des véhicules confortables, spacieux, élégants et adaptés ». « Nous avons des chauffeurs professionnels, expérimentés qui ont une parfaite connaissance des routes et chemins du Sénégal », confiait Alexandre Sène, le directeur général de Dakar Limousine au lancement de ladite compagnie. Il souligne que leurs véhicules sont équipés de « climatisation, wifi, de tablettes connectées, de chargeurs de téléphones, de journaux, de friandises, de rafraichissement ». Cette offre diversifiée fait le bonheur des usagers. Ceux qui atterrissent à l’Aéroport international Blaise Diagne ne sont plus abordés par des chauffeurs qui proposent leurs services avec insistance.