CES AMAZONES QUI FONT RAYONNER LE SOLEIL
Journée internationale de la femme

Chaque année, à l'occasion de la journée internationale des femmes célébrée traditionnellement le 08 mars, depuis son institution en 1974, le quotidien national donnait la parole à des femmes qui se sont distinguées dans la vie économique, sociale et culturelle du Sénégal. Pour la présente édition, "Le Soleil" a décidé de rendre hommage aux femmes de l'entreprise qui participe avec professionnalisme et engagement à la parution quotidienne de l'astre de Hann, portant avec une forte conscience les valeurs et les contraintes du service public de l'information.
Mme Maïmouna Diouf Mbodj, monteuse du Bloc-Notes : "Beaucoup d'améliorations enregistrées"
Madame Maïmouna Diouf Mbodj fait maintenant partie des doyennes du Soleil. Elle est témoin de l'évolution du quotidien national. Quand elle dit que "beaucoup de choses ont changé et se sont améliorées", on peut la croire. Car elle est passée de la machine de sténo ordinaire au tout-puissant dieu Mac. Mais pas seulement, ajoute-t-elle : "il y a aussi les primes de logement, la prime d'astreinte, les fonds communs, les séminaires de le panier Ramadan, les bons-cadeaux du 8 mars, l'arbre de Noël, la colonie de vacances qui vient de reprendre, l'amicale et le GIE". Avec les Macintosh dernier cri, "le travail et la façon de travailler ont changé".
Le traitement de texte est devenu "moins pénible et plus rapide" que du temps de la sténotypie. Avec les collègues masculins, Mme Mbodj dit que les relations sont "respectueuses" et qu'ils sont "gentils".
Pendant quatre années, Mme Mbodj a quitté le Soleil car elle était allée rejoindre son époux aux États-Unis. "Pour ne pas perdre la main", elle s'était inscrite à New York où elle vivait dans une école de technicien du montage. Car, avant de partir, elle avait déjà été formée au montage par le chef de la conception et de la réalisation du service technique, M. Ibou Sène, à qui elle tient à rendre hommage, ainsi qu'au DG de l'époque, M. Ibrahima Gaye.
Maïmouna Gueye, journaliste, chef du service Éducation-Santé, au Soleil depuis 2001, Tata Sané, Maguette Gueye Diédhiou, Marame Coumba Seck, journalistes, au Soleil depuis 2008 et 2016 : "Une amélioration du statut et du salaire"
A la question de savoir comment elles se sentaient dans l'entreprise en tant que femmes, à l'unisson Maïmouna Guèye et Marame Coumba Seck réfutent être au Soleil en tant que femmes, elles y sont "parce qu'elles sont diplômées en journalisme".
Maguette Guèye Diédhiou pense, elle, qu'elle ne peut faire l'impasse sur le fait qu'elle est aussi une femme tout en étant une journaliste. Car elle est souvent obligée de rappeler au bureau qu'elle est une femme et, qu'à ce titre, d'autres devoirs l'attendent à la maison. Pour pouvoir rentrer à temps lorsque le chauffeur attend par exemple un retardataire.
Alors, pourquoi en tant que journaliste, avoir choisi la presse écrite et le Soleil particulièrement ? Elles disent que "la presse écrite, c'est formateur et que cela vous pousse à lire, à faire des recherches, à écrire des articles plus fouillés et à enquêter". Même pour Maïmouna, qui au départ voulait être une journaliste de radio et qui jusqu'à présent dort avec la radio allumée.
D'ailleurs depuis le lycée, elle s'était familiarisée avec le quotidien national en décortiquant en cours les articles et allait même le lire au bureau de l'Agence de presse sénégalaise (Aps) alors logée à la Gouvernance de Saint-Louis.
Maguette acquiesce et rajoute que la presse écrite, c'est moins stressant et moins expéditif que la télé, qu'elle vous laisse le temps de peaufiner votre reportage et qu'il y a moins de stress que la radio et la télé. Pour Tata Sané, femme de radio au départ, le déclic est venu de la fréquentation de sa collègue Maïmouna Guèye, qu'elle dit considérer comme "son modèle".
"C'est en raison de son perfectionnisme et de son professionnalisme que je suis venue au Soleil. Et aussi parce que le Soleil est le quotidien de référence au Sénégal".
Et puis, comme dans toutes les entreprises, il y a toujours un macho sexiste qui sommeille en certains, qui sont toujours curieux de savoir si vous êtes mariée, et si c'est le cas, pourquoi vous ne portez pas le nom de votre époux, comme si c'est le genre de question qu'ils poseraient à un collègue. "Ma signature est une identité, ma vie privée est ma vie privée. Je dois du respect à mes lecteurs.
Sauraient-ils, le cas échéant, que Maïmouna Guèye Ndiaye est la même personne que Maïmouna Guèye ? Nous sommes là en tant que professionnelle, notre vie privée reste privée. Il y a une frontière entre vie privée et vie professionnelle", réplique le chef du service Éducation-Santé.
Comme tous les travailleurs de l'entreprise, Maguette Guèye Diédhiou note que les journalistes du Soleil ont profité ces dernières années d'"une amélioration de leur statut et de leur salaire, qui ont augmenté presque du simple au double".
Mais cette amélioration salariale et statutaire ne fait pas oublier à Maïmouna Guèye les bons souvenirs du temps de la rédaction du Soleil, lorsque le rédacteur en chef, feu Ibrahima Mansour Mboup, "motivait même les stagiaires, tout le monde travaillait et signait des articles".
C'était son cas à elle, et elle dit qu'"on se sentait alors impliquée, motivée et on était enthousiaste à proposer des initiatives". Les salaires, dit-elle, c'est bien mais c'est encore mieux de se sentir épanoui dans son travail.
Marame Coumba Seck voudrait que les femmes journalistes effectuent plus de travail de terrain, plus de reportages, pour que plus de femmes encore osent aller à la conquête du Soleil. "Je veux être une femme de terrain. J'aime ce métier. Je gagnais plus sur le site où je mettais du contenu, mais le Soleil est une école de formation", confie-t-elle.
Et être la maman de deux enfants, comme elle, relève d'une question d'organisation, à son avis. "Cela ne doit pas me dispenser de me donner au travail comme mes autres collègues. Le 8 mars, cela ne me dit rien car toute l'année est un 8 mars pour les femmes. 8 mars ou 8 avril, considérons-nous comme des professionnelles. Nous ne devons pas nous complaire dans le genre, mais plutôt nous imposer", affirme avec bravache la jeune femme de moins de 27 ans. Tata Sané conclut sur un regret et un espoir. "Ce qui ce qui nous manque, c'est de valoriser les papiers des reporters, car ce ne sont pas les initiatives qui manquent".
Mme Adama Nafi Seck, assistante de direction à la rédaction : "Les femmes ont été de tous les combats pour porter le flambeau du journal"
Embauchée en avril 1984 comme secrétaire au bureau régional de Ziguinchor, Mme Adama Nafi Seck a ensuite été mutée à la Direction générale à Dakar. Comme Mme Maïmouna Diouf Mbodj, elle est un exemple du plan de carrière abouti et de l'évolution de l'entreprise, dont elle a participé à l'essor et à l'envol.
En effet, rappelle-t-elle, "je suis arrivée dans l'entreprise comme simple secrétaire et, aujourd'hui, je suis assistante de direction à la rédaction. En venant de Ziguinchor, j'avais trouvé ici des aînées qui ne se sont pas ménagées pour me mettre les pieds à l'étrier, pour faire primer l'entente et surtout pour me mettre à l'aise. Je me suis sentie intégrée dans une grande famille et j'en remercie très sincèrement les anciennes qui sont à la retraite".
Au quotidien Le Soleil, les femmes ne comptent pas pour du beurre, selon Mme Adama Nafi Seck. Car, affirme-t-elle, les femmes ont été de tous les combats pour le droit des travailleurs, et elles sont connues pour être des femmes de conciliation et de rassemblement, en temps de crise."Et qui dit évolution, dit changement. Le Soleil a beaucoup rajeuni avec l'arrivée de ceux que j'appelle la troisième génération, qui, je l'espère, porteront encore plus haut le flambeau du journal", assure-t-elle.
Pour la journée du 8 mars, les femmes sont à l'honneur certes, mais Mme Adama Nafi Seck "en appelle à la conscience des unes et des autres, pour faire notre introspection et mettre un terme au gaspillage lors les cérémonies".
Mme Maty Thiom Diallo, assistante de direction aux Ressources Humaines : "Aucun ressenti de discrimination"
Mme Maty Thiam capitalise donc dix années d'expérience au département des Ressources humaines, en qualité d'assistante de direction. Une décennie précédée d'une période en tant que stagiaire. "Je ne sens aucune discrimination en tant que femme. Je fais mon travail convenablement. Et en tant que femme, nous sommes respectées.J'ai moi-même été encadrée par des "mamans" (Ndlr : anciennes employées du Soleil) dès mon arrivée dans l'entreprise, et elles m'ont coachée et encadrée. Car à l'origine, ma formation de base n'était pas le secrétariat proprement dit", a-t-elle dit.
Si elle ne note aucune discrimination dans le travail, Mme Maty Thiom regrette cependant le ratio des femmes, aussi bien à l'administration qu'à la rédaction. "Il est trop bas", dit-elle. Dans l'entreprise, ajoute-t-elle, le nombre de postes de responsabilité des femmes n'est pas élevé, comparativement au passé où il y en avait 4 ou 5.
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A la cantine de l'entreprise, elles ont choisi une tablée rien qu'à elles, leur coin où elles mangent, rigolent et passent du bon temps toujours ensemble. Telle une nuée de collégiennes, elles se déplacent ensemble en chahutant, quand elles ne sont pas scotchées à l'écran de leur smartphone. Elles sont jeunes, jolies, dynamiques et habillées à la dernière mode de leur âge. Sauf le vendredi, où elles sont vêtues en vêtements plus amples et en mouchoir de tête.
Elles, ce sont les jeunes du Soleil, dans les années 80 on aurait dit les disquettes de l'entreprise. Le stress et elles, cela fait deux, affirment-elles. Elles disent qu'elles sont une famille, mais qu'elles ne se disputent jamais entre elles. "Nous travaillons sans stress, avec beaucoup d'harmonie. Nous avons aussi la chance d'être très bien encadrées par nos anciennes". Une famille idéale.
Alors pour elles, les bons-cadeaux du 8 mars, c'est "un encouragement, une motivation de plus à bien travailler", surtout, précisent-elles, qu'ils sont distribués à toutes sans distinction de statut ni de montant. "C'est le même montant pour tout le monde", se réjouissent-elles en chœur. Non, elles ne se voient pas spécialement en dehors du travail, mais se retrouvent lors des cérémonies sociales, cotisent à une tontine et sont également membres du GIE et de l'Amicale des femmes du Soleil.
En revanche, regrettent-elles, les femmes sont minoritaires dans l'entreprise, car il y a en effet plus d'hommes et des postes de responsabilité occupés par des hommes auraient pu l'être par des femmes. "Presque toutes les femmes sont reléguées à des postes de responsabilité en tant qu'adjointe".
Pourtant, remarquent-elles, les femmes du Soleil ont leur place et là ou elles sont responsabilisées, elles l'occupent bien. "Mais nous voulons davantage de postes de responsabilité". D'ailleurs, protestent-elles, "s'il y avait au moins une femme au conseil d'administration du Soleil, elle pourrait défendre notre cause".
Ici comme chez les anciennes, le Directeur général du Soleil a la cote auprès de ses employées. En chœur, là encore, elles disent "ne pas avoir de problème avec le DG". Le patron du Soleil "est accessible et disponible. Dès qu'il nous voit tourner autour de son bureau, il nous demande immédiatement si nous voulons le rencontrer et il nous fait entrer. Il est en phase avec les femmes et il essaie d'améliorer ce qu'il faut".
Par conséquent, rajoutent-elles, il reste aux femmes de prouver qu'elles sont à la hauteur, en respectant leur travail, en venant à l'heure et en partant à l'heure. "Cela dépend de nous maintenant de lui faciliter la tâche pour qu'il puisse nous confier plus de responsabilités", s'engagent-elles.
Mme Khady Khoussa Mbaye, Chef-Comptable : "Déjà, pas mal de femmes occupent des postes de responsabilité"
Madame Khady Khoussa Mbaye est également la présidente de l'amicale des femmes du Soleil depuis mars 2007 avec un renouvellement de mandat en 2013, où elle a remplacé Mme Awa Tounkara. Dans l'ensemble, dit-elle, "nous avons de bonnes relations nous les femmes, vu que nous partageons une amicale et un GIE.
Cette année, l'amicale a décidé d'observer une pause pour faire un bilan de parcours et définir nos nouvelles orientations. Nous voulons, au sortir de cette introspection, donner un nouvel élan à l'amicale. Je constate qu'au Soleil, nous avons déjà pas mal de femmes qui occupent des postes de responsabilité : la chef du service comptabilité, la chef du service recouvrement, la chef du service contentieux.
Mais je crois qu'on peut leur donner davantage de responsabilités parce qu'elles le méritent. Elles ont en effet été de tous les combats de l'entreprise et elles le méritent aussi en raison de leur conscience professionnelle et de leur abnégation au travail".
Les années précédentes, rappelle Mme Mbaye, les femmes du Soleil organisaient, pour la journée du 8 mars, des panels sur le thème retenu par le ministère de la Femme. "Cependant, en 2009, l'entreprise avait traversé une crise très grave et cette année-là, nous avions célébré la journée du 8 mars dans la sobriété et l'austérité, vu la situation. A présent, les conditions sont redevenues meilleures et nous comptons célébrer ce 8 mars dans l'allégresse".
Au fil des ans, beaucoup de choses se sont améliorées et il y a "des avancées significatives", constate Mme Mbaye. En plus des bons-cadeaux et de la subvention du 8 mars, des paniers du Ramadan et de l'arbre de Noël annuel, Mme Mbaye cite également la colonie de vacances "qui a repris cette année à Saly au grand bonheur des enfants du personnel". A ces acquis, dit-elle, il faut ajouter les formations en renforcement des capacités du personnel féminin, dans tous les domaines, précise-t-elle.
Depuis vingt ans qu'elle travaille au Soleil, qu'est-ce qui a changé, selon elle, pour les femmes ? "Avec les départs à la retraite, le personnel féminin a rajeuni et on trouve des femmes dans toutes les sphères de l'entreprise. Nous n'oublions pas non plus les anciennes du Soleil et nous les associons chaque année à la célébration du 8 mars. Nous les invitons et les fêtons car nous connaissons le rôle qu'elles ont joué dans l'entreprise et nous les apprécions à leur juste valeur, même si elles ne sont plus actives".
Par ailleurs, souligne Mme Mbaye, "la Direction générale de l'entreprise a toujours été à nos côtés, elle s'est montrée disponible, prêtant une oreille attentive chaque fois que nous la sollicitons, et faisant tout pour nous satisfaire. Le Directeur général du Soleil nous adresse toujours ses félicitations, en raison de notre rôle de stabilisateur et de régulateur social.
Et nous aussi, nous sentons son accompagnement et son soutien dans toutes nos actions". L'amicale des femmes du Soleil, par la voix de sa présidente, souhaite à toutes les femmes du Sénégal et du monde entier une bonne fête. Et charité bien ordonnée commençant par soi-même, Mme Mbaye fait le vœu que "Dieu fasse briller des milles feux les rayons de notre Soleil". Mme Mbaye a déjà annoncé qu'elle ne se représentait pas cette année à la tête de l'amicale. Il y aura donc en perspective une nouvelle élection et des candidatures.
Mme Maryam Oury Barry Diawara, responsable Service Contentieux : "Le traitement des femmes a positivement évolué dans l'entreprise"
Mme Diawara paraît réservée de prime abord. Mais une fois que l'on s'entretient avec elle, elle brise la glace. Dans l'administration du Soleil, Mme Diawara est la femme qui a le poste le plus élevé. Toutefois, son statut ne l'isole pas heureusement.
Car, dit-elle, "le relationnel est très développé entre nous. Le statut ne transparaît pas dans nos échanges. Je suis membre de toutes les associations féminines du Soleil, nous partageons les mêmes activités à l'unisson. Nous prenons nos repas ensemble à la cantine de l'entreprise, nous participons ensemble aux cérémonies familiales et religieuses. Nous prenons des nouvelles les unes des autres et lorsqu'on ne voit pas une collègue pendant quelques jours, nous nous rendons chez elle. Honnêtement, il m'est arrivé que des collègues viennent me rendre visite alors que j'étais alitée chez moi".
Depuis dix-sept ans qu'elle travaille au Soleil, qu'est-ce qui a changé, selon elle, pour les femmes ? "Objectivement, le traitement des femmes a évolué positivement, depuis l'avènement de M. Cheikh Thiam. Nous avons droit, pour la célébration de la journée du 8 mars, à des bons-cadeaux et à une subvention de nos activités, ainsi qu'à des paniers-cadeaux lors du mois du Ramadan".
Mme Diawara souhaite cependant qu'il y ait davantage de femmes à des postes de responsabilité. "Pour pouvoir responsabiliser plus de femmes, il faudrait les mettre à l'épreuve, les nommer afin de pouvoir apprécier ce dont elles sont capables. Elles restent trop souvent à la périphérie", plaide-t-elle.