COMMENT LE GHANA A ÉCHAPPÉ AU PIÈGE DES COUPS D'ÉTAT EN AFRIQUE
Alors que de nombreux partisans des coups d'État citent souvent l'exemple du Ghana et de la réussite de John Jerry Rawlings, Ken Opalo soulève des points intéressants sur les véritables facteurs qui ont permis au Ghana de se débarrasser des putschs

Dans un article récemment publié, le professeur associé à Georgetown University, Ken Ochieng’ Opalo, spécialiste de politique comparée et d'origine kényane, a examiné de près le cas du Ghana pour comprendre comment le pays a réussi à échapper au piège des coups d'État en Afrique. Alors que de nombreux partisans des coups d'État citent souvent l'exemple du Ghana et de la réussite de John Jerry Rawlings, Ken Opalo soulève des points intéressants sur les véritables facteurs qui ont permis au Ghana de se débarrasser des coups d'État.
L'article souligne tout d'abord que le Ghana a une longue histoire de coups d'État, avec un total de 17 tentatives et complots entre 1961 et 1985. Lorsque John Jerry Rawlings est arrivé au pouvoir en 1981, il a dû faire face à trois tentatives de coup d'État et à quatre complots. Cependant, contrairement à d'autres pays d'Afrique de l'Ouest qui ont été confrontés à des cycles répétés de coups d'État, le Ghana semble avoir réussi à sortir de cette spirale.
Le premier défi auquel est confronté tout auteur d'un coup d'État est de ne pas se faire renverser à son tour. Dans le cas de Rawlings, il a consolidé son régime militaire par des moyens violents, exécutant plusieurs officiers supérieurs et condamnant d'autres à des peines capitales ou à de lourdes peines. Bien que cette approche expéditive ne puisse être recommandée, elle a contribué à maintenir Rawlings au pouvoir et à éviter un cycle de violences prolongées.
Ensuite, Ken Opalo souligne comment Rawlings a cherché à institutionnaliser la participation populaire pour régénérer la vie politique et dépolitiser l'armée. Entre 1984 et 1988, une Commission nationale pour la démocratie a été mise en place pour étudier les moyens d'introduire la participation électorale, ce qui a conduit à un rajeunissement des gouvernements locaux élus après 1988. Cette institutionnalisation de la mobilisation politique a permis au Ghana de consolider ses institutions démocratiques et de résister aux tentations des coups d'État.
De plus, le Ghana a su faire preuve de résilience face à une crise économique majeure en 1983, marquée par une sécheresse et l'expulsion massive de Ghanéens du Nigeria. Pour réintégrer ces rapatriés sans précipiter une catastrophe humanitaire, Rawlings a mis en place des escouades de mobilisation composées de jeunes, qui ont été chargées de les réinstaller dans leurs régions rurales d'origine. Cette approche pragmatique a permis de revitaliser les zones rurales et de réduire les tensions sociales qui pourraient conduire à des coups d'État.
Malgré les réussites du Ghana, Ken Opalo souligne que sortir du cycle des coups d'État reste extrêmement difficile pour les pays actuellement concernés en Afrique de l'Ouest, tels que le Mali, le Niger, le Burkina Faso, la Guinée et la Guinée-Bissau. Ces pays sont confrontés à des menaces graves liées à la sécurité, à des secteurs de la sécurité surdéveloppés, à un manque de ressources suffisantes pour mener des politiques clientélistes et à une exposition aux manipulations géopolitiques mondiales. Ces facteurs ne diminueront probablement pas de sitôt, ce qui signifie que la tâche de civiliser complètement la politique dans ces pays est ardue.
L'article conclut en soulignant l'importance de ne pas céder à la résignation face à ces défis. Bien que la situation puisse être difficile, il est essentiel de rester mobilisés et concernés pour promouvoir des institutions démocratiques solides et résister aux tentations des coups d'État. Le cas du Ghana montre qu'il est possible d'échapper au piège des coups d'État, mais cela nécessite des efforts continus et une volonté politique de consolider la démocratie.