CONFUSION À BAMAKO APRÈS UNE MUTINERIE
DERNIÈRE MINUTE - Le président Keïta et le Premier ministre Cissé arrêtés - Alors que le pays traverse une grave crise politique, des coups de feu ont retenti dans le camp militaire de Kati, d'où était parti le coup d'État de 2012

Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta et son Premier ministre, Boubou Cissé, ont été "arrêtés" mardi en fin d’après-midi à Bamako par des militaires en révolte, a affirmé l'un des chefs de la mutinerie.
"Ils sont en route pour Kati"
"Nous pouvons vous dire que le président et le Premier ministres sont sous notre contrôle. Nous les avons arrêtés chez lui" (au domicile du chef de l’État), a déclaré ce militaire ayant requis l’anonymat. "IBK (le président Keïta) et son Premier ministre sont dans un blindé en route pour Kati", le camp militaire de la banlieue de Bamako où la mutinerie a débuté dans la matinée, a affirmé une autre source militaire dans le camp des mutins.
L'Élysée a fait savoir que le président Macron venait de s'entretenir avec les présidents des pays voisins et que la France soutient la médiation de la Cedeao, la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest. Il s'est notamment entretenu avec avec le président malien Ibrahim Boubacar Keïta et ses homologues nigérien Mahamadou Issoufou, ivoirien Alassane Ouattara et sénégalais Macky Sall.
Le chef de l’État "suit attentivement la situation et condamne la tentative de mutinerie en cours", a souligné la présidence. Emmanuel Macron a exprimé "son plein soutien aux efforts de médiation en cours de la Cedeao".
Cette dernière, médiatrice au Mali, a dit dans un communiqué suivre "avec une grande préoccupation" la situation, "avec une mutinerie déclenchée dans un contexte sociopolitique déjà très complexe".
Contestation sans précédent depuis deux mois
Les mutins avaient annoncé plus tôt la prise de contrôle d’une garnison proche de Bamako, suscitant l’inquiétude de Washington et des voisins du Mali quant à un éventuel renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta, déjà confronté depuis deux mois à une contestation sans précédent depuis le coup d’État de 2012.
L’organisation régionale appelle "les militaires à regagner sans délai leurs casernes" et "rappelle sa ferme opposition à tout changement politique anticonstitutionnel", invitant les "militaires à demeurer dans une posture républicaine".
La communauté des États d’Afrique de l’Ouest "condamne vigoureusement la tentative en cours et prendra toutes les mesures et actions nécessaires à la restauration de l’ordre constitutionnel".
Inquiets également, les États-Unis ont souligné, par la voix de leur émissaire pour le Sahel, Peter Pham, qu’ils "s’opposent" à tout changement de gouvernement en dehors du cadre légal, "que ce soit par ceux qui sont dans la rue ou par les forces de défense et de sécurité".
Situation confuse
En milieu d’après-midi, la situation restait confuse dans la capitale malienne et dans sa banlieue. Une chose est sûre : des militaires ont pris le contrôle dans la matinée du camp Soundiata Keïta, situé à Kati, à une quinzaine de kilomètres de Bamako.
"Des militaires en colère ont pris les armes au camp de Kati et ont tiré en l’air. Ils étaient nombreux et très nerveux", a expliqué un médecin de l’hôpital de la ville.
Situation "volatile"
Les raisons de ce coup de colère n’étaient pas immédiatement claires. Ces militaires ont ensuite bouclé les accès de la garnison.
Un militaire faisant partie de ceux ayant pris le contrôle du camp a affirmé qu’ils détenaient "plusieurs hauts gradés de l’armée, arrêtés par les frondeurs".
En fin d'après-midi, le gouvernement malien appelle à un dialogue avec les militaires pour lever "tous les malentendus".
Plusieurs chancelleries occidentales ont fait état de l’arrestation de personnalités politiques, dont des ministres, mais elles n’ont pas pu être confirmées de source officielles, pas plus que celles concernant les hauts gradés.
La situation est "toujours volatile à Bamako", a twitté l’ambassade de France, en répétant ses consignes de prudence.
"La France a pris connaissance avec inquiétude de la mutinerie qui s’est engagée aujourd’hui à Kati au Mali. Elle condamne avec la plus grande fermeté cet événement grave", a réagi le ministre des Affaires étrangères français Jean-Yves Le Drian. "La France réaffirme avec force son plein attachement à la souveraineté et à la démocratie maliennes. Les autorités françaises au plus haut niveau restent très attentives à l’évolution de la situation au Mali", ajoute le communiqué du Quai d'Orsay.