ECHOS DE LA TANIERE - EL H. DAOUDA DIOP, SÉNÉGALAIS ÉVOLUANT EN CHINE - «Je rêve de l’équipe nationale»
El H. Daouda Diop est un joueur au parcours atypique. Ancien sociétaire de Niary Tally et du Port, le milieu défensif a évolué en Israël et au… Swaziland avant de déposer ses baluchons en Chine. Pensionnaire de Shenzhen, il devrait bientôt s’engager avec Shanghai, l’ancien club de Didier Drogba. Entretien
Dans quels clubs as-tu évolué au Sénégal ?
J’ai joué au Ndiambour de Louga entre 2005 et 2006. J’y ai disputé la Coupe de la CAF. L’année suivante, j’ai rejoint le Port autonome de Dakar avec lequel j’ai disputé la Ligue africaine des champions. Malick Daff était notre coach. En 2007-2008, je suis parti en Israël. Je suis parmi les premiers Sénégalais à évoluer dans le championnat israélien. Les gens ont une mauvaise image de ce pays. Ils pensent qu’il n’y a que la guerre et qu’un musulman ne pourrait pas vivre là-bas. Mais franchement, je n’ai eu aucun problème. La seule fois où j’ai été confronté à une alerte, c’est quand, lors d’un match, on a entendu des tirs. Par la suite, je suis rentré au Sénégal entre 2008 et 2009. Cela avait coïncidé avec la maladie de ma mère. Je suis revenu au pays pour l’assister. J’avais même reçu une invitation du club de Trabzonspor. J’avais le visa et tout, mais je ne pouvais pas partir en laissant ma mère malade. Elle est finalement décédée. C’était une période très difficile. J’avais même décidé de mettre un terme à ma carrière, car c’est pour ma mère que je jouais.
Mais vous avez apparemment repris le dessus et renoué avec le foot…
Entre 2009-2010, je n’ai quasiment pas joué. Après l’intervention de mes parents, je suis revenu dans le foot. J’ai rejoint le Port pour une année en 2010 avant de partir à Niary Tally. Par la suite, je suis parti au Swaziland entre 2012 et 2013. On a gagné le championnat et la Swazi Bank Cup. En tant que milieu défensif, j’ai marqué 3 buts. J’ai aussi donné 7 passes décisives. Un agent chinois m’a remarqué durant cette saison. Il m’a expliqué que je devais jouer à un niveau plus élevé où je pourrais gagner plus d’argent. Je suis allé à Shenzhen pour effectuer des tests qui ont été concluants.
Revenons sur votre départ en Israël. Comment avez-vous atterri là-bas ?
J’avais un copain du nom de Gora Tall qui m’y a devancé. C’est un de nos grands du nom d’Ousmane Dieng de Lusitana qui l’avait emmené. Son club, le FC Ashdod, avait besoin d’un milieu défensif. Comme Gora connaissait mes qualités, il m’a recommandé à ses dirigeants. C’est comme cela que je l’ai rejoint. Mes débuts ont été difficiles car je manquais d’expérience, mais le club m’a retenu après les tests et j’ai fait une bonne saison. L’adaptation était loin d’être facile. Je quittais le championnat du Sénégal qui n’était pas encore professionnel pour rejoindre l’Israël. Cela ne pouvait pas être facile. Je me tuais aux entraînements. Parfois même, Gora Tall qui joue actuellement dans le même club que Bouna Coundoul dans le championnat chypriote me disait de me reposer, mais je ne le faisais pas.
Goral Tall et vous devez être les premiers Sénégalais à évoluer en Israël...
Nous étions effectivement les précurseurs, Gora Tall et Moi. Avant, comme je le disais tantôt, les gens avaient des a priori sur Israël. Quand je m’apprêtais à partir, mes frères me disaient d’éviter d’aller dans un pays où il y avait la guerre. Surtout qu’il faisait la guerre à un pays musulman. Ma mère était aussi très inquiète. Mais je les ai rassurés en leur disant que j’avais un copain qui évoluait là-bas sans aucun problème. Quand j’étais en Israël, des parents m’appelaient pour s’enquérir de ma situation en me disant que ça chauffait dans le pays. Je leur répondais que je ne m’en étais même pas rendu compte. Il faut dire que j’ai connu des gens très bien en Israël. On recevait des invitations de toutes parts venant des supporteurs. C’est après notre passage que des joueurs comme Moussa Konaté sont venus en Israël. Après je suis rentré au Sénégal. J’aurais pu m’engager avec Trabzonspor, mais cela ne s’est pas fait. Cela a été un coup dur dans ma carrière.
Comment s’est passé votre retour au Sénégal ?
Ce n’était pas difficile, même si cela faisait un bon bout de temps que je n’avais pas joué au Sénégal. Quand je suis arrivé à Niary Tally, j’ai trouvé de bonnes personnes comme Moustapha Seck, le coach. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup. Il m’a fait jouer des matchs et c’est par la suite que des portes se sont ouvertes. Quand j’arrivais au club, Niary Tally était déjà en première division. C’est par la suite que je suis parti au Swaziland, au Manzini Wonderers, avant de partir au Mbabane Swalls avec qui j’ai réalisé le doublé coupechampionnat. On avait quasiment raflé tous les trophées qui étaient en jeu.
Le championnat du Swaziland n’est pas trop réputé. Comment l’avez-vous trouvé ?
Quand je parlais du Swaziland, on me demandait où c’était. C’est un pays fermé, mais assez développé. Leurs joueurs n’ont même pas besoin de s’expatrier. Ils restent le plus souvent chez eux. Ce n’est pas loin de l’Afrique du Sud. À l’époque, j’avais même eu des contacts avec la formation sud-africaine de Supersport. Cela avait coïncidé avec l’expiration de mon passeport. Sans passeport, on ne peut pas jouer là-bas. C’est comme un permis de travail. Le Swaziland a un bon championnat. C’était un tremplin pour moi.
Après le Swaziland, comment s’est passée la découverte de la Chine ?
La Chine était un autre cap. Il faut dire que la Chine a attiré beaucoup de joueurs ces dernières années. Des joueurs comme Anelka, Drogba et Babacar Guèye sont arrivés là-bas. J’y ai même rencontré le frère de Ricardo Faty, Jacques Faty. J’ai joué contre son club et on a en profité pour beaucoup discuter. Je voulais prier et il m’a indiqué la direction de la Mecque. Nos camps d’entraînement n’étaient pas éloignés. Je lui ai dit que j’appréciais les matchs qu’il faisait avec l’équipe nationale du Sénégal. S’intégrer en Chine n’était pas facile, mais j’avais la chance de pouvoir m’exprimer en anglais. Au niveau du club, on avait un interprète car le coach ne parlait pas anglais. Les clubs chinois sont bien assis sur le plan financier, à part le Shenzhen où j’évoluais qui a eu des problèmes d’argent en un moment donné. Ils avaient recruté de grands joueurs, mais cela n’avait pas marché. C’est pour cela que, quand je suis arrivé à Shenzhen, Babacar Guèye qui y évoluait, était déjà parti. Récemment, j’ai fait des tests à Shanghai, l’ancien club de Didier Drogba. C’est par la suite que je suis rentré à Dakar. J’attends les résultats. Je garde le contact avec mon agent qui me demande de respecter mes entraînements pour ne pas perdre la forme.
Quelles sont vos ambitions actuelles ?
Je vais aller jouer en Chine, mais c’est juste un tremplin. J’ouvre ma porte à tous les agents. J’ai même récemment eu des contacts pour aller jouer en Ukraine. Cependant, la recrudescence des crashs d’avions et le conflit qui existe actuellement là-bas a même poussé des joueurs à fuir le pays. Je ne pouvais pas prendre le risque d’aller en Ukraine. J’ambitionne de trouver un club européen, car je sais que j’ai le niveau. L’équipe nationale est aussi un rêve et les joueurs qui y sont ne sont pas meilleurs que moi.
Avec la concurrence en équipe nationale, pensez-vous pouvoir y trouver votre place ?
On a une bonne équipe avec des jeunes qui ont de la qualité et de l’ambition. L’équipe nationale n’est pas quelque chose de facile, car il y a beaucoup de critiques, mais il faut les prendre positivement. Il faut accepter ces critiques car c’est cela qui vous permet d’avancer. Après la génération des Diouf, Fadiga et autre Pape Bouba Diop, il y a une nouvelle génération qui compte des joueurs de qualité comme Idrissa Gana Guèye et Demba Bâ. Je les encourage et les incite à persister sur la lancée dans laquelle ils étaient lors du barrage retour des éliminatoires de la Coupe du monde 2014 contre la Côte d’Ivoire. Nous avons tous été satisfaits de leur engagement. Quand on est en équipe nationale, il faut jouer en patriote et mouiller le maillot.
Quelles sont les chances du Sénégal contre l’Égypte et la Tunisie ?
Il faut seulement prendre les matchs au sérieux. Comme on le dit au Sénégal, quand c’est facile on se laisse aller. C’est souvent dans la difficulté que l’on réagit le mieux. Le Sénégal fait partie des pays qui ont le plus de professionnels. C’est parce qu’on a un vrai réservoir de talents. On a des joueurs qui jouent dans de grands clubs en Europe. Je pense qu’on a les capacités pour terminer premier devant l’Égypte et la Tunisie.