VIDEOLA VILLE DES MOBYLETTES
CARNET DE VOYAGE : OUAGADOUGOU
L’étranger qui débarque à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, est frappé par le nombre impressionnant de mobylettes et de vélos. Dans cette ville, la majorité des habitants se déplacent en "deux roues". Ce qui fait que ces engins dictent leur loi dans toutes les artères de la ville.
La capitale du Burkina Faso, pays des hommes intègres, est une ville qui a la particularité de compter un nombre impressionnant de mobylettes et de vélos.
En cet après-midi du mois d’octobre, dès notre descente d’avion et la sortie de l’aéroport de Ouagadougou, nous sommes frappé par l’atmosphère assez sèche et un peu poussiéreuse qui couvre cette ville qui compte près de 2 millions d’habitants. Les routes spacieuses de Ouagadougou n’ont rien à voir avec les routes exiguës de Dakar, qui sont toutefois mieux pavées et ont des traits de signalement plus visibles. A Ouaga, le visiteur est frappé aussi par la couleur rouge du sable.
Même si les routes sont bitumées, elles sont presque toutes envahies par le sable rouge qui est partout présent. Le thermomètre affiche les 39°C. Le temps est caniculaire, l’air chaud et humide et les visiteurs semblent souffrir de cette situation. D’aucuns se demandent s’ils pourront faire face à une telle température pendant leur séjour. Mais comme si Ouaga ne voulait pas décevoir ses hôtes, de fines gouttes de pluie arrosent la terre rougeâtre et font baisser la température.
A Ouaga, l’essentiel du trafic sur les routes est dominé par les "deux roues" : mobylettes, vélos ou "motos Jakarta". Quelques rares véhicules disputent la chaussée à ces engins. Cependant, la circulation se fait dans une discipline parfaite et sans grande difficulté. Souvent, en lieu et place des feux de signalisation, il y a des agents de la circulation. Ces derniers, vêtus de leur uniforme et de gilet fluorescent permettant leur identification, sont équipés de pancartes sur lesquelles on peut lire "Stop" pour imposer l’arrêt, ou une signalisation verte pour autoriser la circulation.
Munis seulement de leurs pancartes et de sifflets, ces agents parviennent à gérer la circulation. Le décor est le même au Grand boulevard menant vers le charmant quartier de Ouaga 2000 où se trouvent plusieurs hôtels de luxe dont le "Lybia-Hôtel" construit par le défunt Mouamar Khadafi. D’ailleurs, cet hôtel a servi de résidence aux chefs d’Etat et de gouvernement venus participer à la commémoration des vingt ans de l’Uemoa, dont le Président Macky Sall.
Un ouagalais, une mobylette
A Ouaga, dès le lever du jour, chacun sort sa mobylette. Jeunes, enfants, hommes âgés et même les femmes qui se rendent au marché circulent en mobylette, le panier confortablement installé à l’avant. Les visiteurs sont ainsi frappés par les milliers de motocyclettes qui défilent devant leurs yeux. Pour se déplacer, on est souvent obligé de recourir aux conducteurs de mobylettes. Seulement, au bord de la route, on peut passer beaucoup de temps sans qu’un "taxi-Jakarta" ne s’arrête.
En effet, dans l’énorme vacarme des mobylettes, il est difficile pour un étranger à Ouaga de reconnaître les engins destinés au trafic urbain et ceux qui sont utilisés pour la conduite personnelle. Contrairement à Dakar, il est difficile de trouver dans la capitale burkinabé un taxi-auto. Pour preuve, l’équipe avec laquelle nous étions est restée plus d’une demiheure devant le Grand boulevard de Ouaga sans voir l’ombre d’un taxi. Des taxis de couleur verte assurent le service. Et le prix du taxi est plus qu’abordable.
Une Burkinabé du nom de Kadi Dia, venant juste d’atterrir à l’aéroport de Ouaga en provenance de Dakar où elle participait à un séminaire, a tenu à faire la comparaison entre le tarif à Dakar et celui de Ouaga. "Tout est cher à Dakar. Ici le prix du taxi commence à 300 francs Cfa. Pour la même distance à Dakar, on me demandait de payer plus de 1000 francs. Dakar c’est plus moderne et il y a tout, mais la vie est chère. On dépense moins à Ouaga", indique la dame de teint noir, emmitouflée dans une combinaison chemise et jupe noire. Elle ajoute que d’une manière générale, que ce soit la location, le transport ou la nourriture c’est plus accessible à Ouaga qu’à Dakar.
Ouaga et ses "maquis"
Côté nourriture, les "maquis" sont devenus incontournables pour les bonnes soirées à Ouagadougou. Sur le Grand boulevard on en compte plusieurs parmi lesquels le "Citron Vert" etc. Un tour lors d’une soirée dans ce "Citron Vert" et on est envahi par l’odeur de l’alcool qui titille terriblement les narines. Dans le restaurant le "Citron Vert", la musique est mise à fond, chacun tenant sa bouteille de bière. D’autres tiennent à peine éveillés sur leur chaise, sous l’effet de la bière.
A l’intérieur, plusieurs tables sont positionnées et les chaises sont toutes occupées par des noctambules Ouagalais. Dans cette partie du restaurant, nous n’avons pas fini de nous installer qu’une serveuse nous demande ce que nous voulons boire, nous déclinons et on demande à manger. "Pour manger, c’est dehors", répond-elle dans un français débrouillé. Dehors, sur un vaste espace en face du restaurant, des centaines de tables et chaises sont aussi placées. La serveuse nous apprend aussi que l’intérieur du restaurant est réservé pour la boisson... et à la danse.
En face du "Citron Vert", des mobylettes se garent à chaque instant, débarquant des gens venus prendre une bière ou une "sucrerie" comme on appelle ici les boissons sans alcool. Pour s’alimenter, le client se déplace aussi à une dizaine de mètres, dans un espace où se tiennent les "cuisines", pour faire sa commande. Ces "cuisines" sont de gros fours où se fait la grillade de poisson, de la viande rouge ou du poulet. Au Burkina, comme dans tout pays qui n’a pas accès à la mer, le poisson est très prisé et souvent plus cher que la viande.
Le "poulet-bicyclette", nom donné aux poulets chétifs d’origine africaine (différent des poulets de chair) et à la chair assez dure mais au goût succulent est aussi prisé, surtout par les visiteurs. "C’est le poulet-bicyclette, il n’est pas trop gros comme le poulet de chair mais il est très délicieux", confie un des chargés de la grillade des poulets. Dans ces "maquis", les gens discutent et passent beaucoup de temps dans la bonne ambiance, jusque tard dans le nuit.
Tensions politiques
Par ailleurs, dans les taxis, les hôtels, les maquis et même dans la rue ouagalaise, s’il y a un sujet de conversation c’est bien l’intention de Blaise Compaoré, au pouvoir au nom depuis 1987, de se représenter à la prochaine présidentielle. Le président Burkinabé a décidé d’organiser un référendum dans son pays pour modifier l’article 37 de la Constitution afin d’avoir le droit de se représenter. Au même moment, les opposants se sont retrouvés dans une vaste coalition pour faire bloc contre ce qu’ils qualifient de volonté de s’éterniser au pouvoir.
Un taximan Burkinabé confie sous le couvert de l’anonymat qu’il est clair que Blaise a fait de bonnes réalisations ces dernières années, mais la réaction à sa tentative de modifier l’article 37 pourrait susciter le désordre dans le pays. D’autres quant à eux demandent à leur Président de se retirer après 27 ans de pouvoir. En tout cas la situation paraît tendue et l’opposition appelle la semaine prochaine à une campagne de désobéissance civile. L’avenir n’est guère rassurant.