PLUIE DE LACRYMOGENES ET UNE DIZAINE D’ARRESTATIONS
MBAO - VIOLENTES MANIFESTATIONS DES POPULATIONS CONTRE LES ICS
Les populations de Petit Mbao Peul en ont assez des fuites de gaz chimique provenant des installations des Industries chimiques du Sénégal (ICS). Après leur manifestation dans les rues de samedi dernier, elles ont remis ça hier, mardi 23 août. Il s’en est suivi des accrochages avec la gendarmerie qui intervenue à coup de grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants. Plusieurs personnes ont été interpellées.
De violentes manifestations ont éclaté hier, mardi matin 23 août à Petit Mbao. A l’origine, les populations de Petit Mbao Peul qui, après le sit-in de samedi dernier, sont encore sorties dans les rues pour manifester leur courroux et dénoncer leur difficile cohabitation avec l’usine des Industries chimiques du Sénégal (ICS). Ces populations disent non aux émanations toxiques de l’usine qui est la principale source de maladie dans la localité.
Elles ont arboré des brassards rouges en direction des ICS à quelques encablures du quartier Petit-Mbao Peul, mais leur marche a été vite stoppée par les forces de l’ordre, à bord de plusieurs pick-up. Après les sommations de dispersion non suivie par les populations, les forces de l’ordre ont usé de leurs grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants. Des résistants ont été interpelés dont l’Imam de la grande mosquée. Finalement les manifestants interpelés ont été libérés et les jeunes se sont retranchés dans leur village pour une assemblée générale en vue de statuer sur la suite à donner à leur mouvement d’humeur.
Le porte-parole du collectif pour la défense des intérêts de Mbao de déclarer: «les force de l’ordre nous ont jetés des grenades parce qu’elles ignorent que ce que nous vivons est pire que leur gaz car les odeurs que nous inhalons à Mbao sont plus dangereuses que le gaz lacrymogène», s’est offusqué Amary Seck. Selon lui les fuites de gaz notées de temps à autres ont causé d’énormes dégâts sur plan sanitaires. «Les impacts sont visibles, les maladies pulmonaires, les diarrhées et des problèmes de croissance sont fréquents dans la localité. Tout Mbao est malade à cause des gaz ammoniacs. Les ICS nous ont privés d’un environnement sain», s’indigne Amary Seck qui pousse le bouchon. «Les Industries Chimiques du Sénégal ont pourri notre vie, nous les avons rebaptisé Industrie Criminelle du Sénégal armé jusqu’aux dents pour agresser notre environnement», a lancé le coordonnateur du collectif.
Pour rappel les populations ont effectué leur première marche spontanée le samedi matin en direction de l’usine. Des enfants et femmes vulnérables du village ont été évacués dans d’autres zones pour ne pas courir le risque de les exposer à la fuite d’ammoniac.
RISQUE LIE A LA MAINTENANCE DE L’AMMONIAC
Pour Dr Aminata Gueye, chercheuse en sciences de l’environnement, sp écialiste de la qualité de l’air, interrogée par iGFM, le danger émanant de ces émissions de gaz chimiques concerne autant les populations que l’environnement. «Il y a un risque lié à la maintenance de l’ammoniac, encore plus s’il y a des habitations dans l’atmosphère environnant. On se rappelle, il y a quelques années, l’explosion d’un camion d’ammoniac de la Sonacos. Les rejets se ressentent sur des distances assez importantes. Le danger concerne autant les populations que l’environnement. Il faudra des études pour déterminer à quel niveau l’activité impacte la zone».
Et la spécialiste de la qualité de l’air de relever que relever que «des exercices de modélisation utilisant la direction des vents, la hauteur de la cheminée, les quantités de gaz rejetées, la présence ou non de la pluie, vont déterminer la distance exacte de la zone d’influence. Ensuite, on pourra agir sur l’industrie elle-même. Voir si les filtres doivent être re-calibrés, pour émettre moins de rejets dangereux ou encore si ces industries respectent les normes en vigueur. Ce sont des études spécialisées entre différentes disciplines qui permettront d’avoir des données exactes pour prendre les mesures idoines».
Dr Aminata Gueye de rappeler que «quand on crée une ville, on prévoit des espaces avec des fonctionnalités précises. Il y a des quartiers administratifs, des zones industrielles, des zones résidentielles, des espaces scolaires, des sites commerciaux etc. Dans les conditions idéales, il aurait fallu que chaque espace soit délimité, de façon que les populations soient protégées. Si la planification n’est pas respectée, chaque espace grignote sur les autres. C’est ce qui fait qu’une industrie vienne s’implanter dans une zone initialement prévue pour des habitations.»