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17 mai 2024
par Fanny Pigeaud
FRANC CFA, LE SILENCE COMPLICE DES PROGRESSISTES FRANÇAIS
Le franc CFA est une seringue plantée dans les veines des pays africains qui vampirise leurs ressources. L’hypocrisie des tenants du système devrait faire réagir tous ceux qui se préoccupent de démocratie, d’équité, de justice
À quelques rares exceptions près, les progressistes français ne se sont pas intéressés aux récentes manœuvres du pouvoir macroniste qui visent à prolonger la durée de vie du franc CFA. Leur silence permet la poursuite de la logique coloniale de la France en Afrique.
Après l’avoir annoncée à grand renfort de publicité fin 2019, le pouvoir macroniste a soumis ces derniers mois aux députés et aux sénateurs une « réforme » du franc CFA d’Afrique de l’Ouest. Le débat était capital pour l’avenir de 14 pays africains, dont le destin reste orienté par cette monnaie coloniale. Il l’était d’autant plus que les changements proposés étaient mineurs.
Les progressistes français auraient pu saisir cette occasion pour soutenir concrètement ceux qui, en Afrique, aspirent à une indépendance complète et militent pour la fin de la domination monétaire de la France. À quelques rares exceptions près, ils ne l’ont pas fait.
Dans l’indifférence quasi générale, la « réforme » a été adoptée par l’Assemblée nationale le 9 décembre 2020, puis par le Sénat le 28 janvier.
Inertie de l’opinion publique et des médias
Souvenons-nous des observations de Mongo Beti formulées il y a plusieurs décennies : c’est parce que « l’opinion publique » française « et en premier lieu la presse » sont restées inertes que le pouvoir gaulliste a pu briser l’élan des progressistes camerounais et n’octroyer qu’un semblant d’indépendance au Cameroun en 1960 (Main basse sur le Cameroun, autopsie d’une indépendance, Maspero, 1972).
L’écrivain anti-colonialiste dénonçait la solidarité à géométrie variable des intellectuels français, lesquels ménageaient toujours les intérêts français en Afrique : alors qu’ils s’engageaient avec passion aux côtés des gauches d’Amérique latine ou d’Europe de l’Est pour dénoncer la dictature sévissant dans leurs pays, ils ne manifestaient aucune solidarité à l’égard des Camerounais en lutte contre un régime tyrannique installé et soutenu par Paris.
Le même phénomène est manifestement toujours à l’œuvre à propos du franc CFA, créé par un décret du général de Gaulle en 1945 et placé depuis sous la tutelle du Trésor français : ces dernières années, son caractère rétrograde et inique n’a suscité que peu d’intérêt et d’émoi en France.
Ainsi, les économistes hétérodoxes et les politistes français qui se sont emparé de la question se comptent sur les doigts d’une main. Les activistes, dont les militants de l’association Survie, sont eux aussi peu nombreux. Les quelques médias dits « de gauche » ont pour leur part assuré le service minimum. Certains d’entre eux ont même relayé en mai 2020 l’idée que la France « actait » officiellement la « fin du franc CFA », prenant pour argent comptant le récit officiel sur la réforme du président Emmanuel Macron.
La vérité est pourtant tout autre et n’est pas difficile à établir : le système CFA ne fait l’objet que de légères modifications de nature symbolique pour les huit États qui utilisent le franc CFA en Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo), et il demeure inchangé pour les six pays d’Afrique centrale qui l’ont en partage (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Tchad). Tout ceci apparaît clairement dans les rapports et compte-rendus des débats parlementaires de ces derniers mois.
Il n’y a guère que des élus communistes, à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui ont vraiment porté la contradiction à un gouvernement déterminé à préserver un dispositif décrié partout dans le monde, en mettant en exergue devant leurs collègues les limites et faux-semblants de la pseudo « réforme » du président Macron. Ils ont fait également des efforts de communication hors des hémicycles parlementaires. Mais ils n’ont pas réussi à briser le mur d’indifférence érigé autour du franc CFA depuis 75 ans et soutenu par toutes les couches de la société française – consciemment ou pas.
Un système appauvrissant
Or les enjeux sont cruciaux et les raisons de s’indigner sont nombreuses.
Le franc CFA est plus qu’une incongruité, c’est une seringue plantée dans les veines des pays africains qui vampirise leurs ressources. Il entretient un système colonial qui n’existe nulle part ailleurs, et sa persistance garantit celle de la pauvreté et de ses expressions multiples – dont l’émigration forcée vers la Méditerranée.
L’ancrage du franc CFA à l’euro, monnaie forte, pénalise en effet la compétitivité-prix des productions des pays qui l’utilisent, favorisant des économies rentières portées sur la consommation de marchandises importées, au détriment d’une politique axée sur l’augmentation des capacités de production nationales. À cause de la parité fixe avec l’euro, ces États ne peuvent pas se servir du taux de change en cas de crise économique et sont alors obligés de réduire leurs dépenses publiques.
Le mécanisme pousse par ailleurs les banques centrales de la zone franc à limiter les crédits bancaires qu’elles accordent aux ménages, aux entreprises et aux États. Conséquence, ces derniers voient leurs dynamiques productives paralysées et sont contraints d’emprunter sur les marchés financiers internationaux, à des taux élevés, pour financer leur développement. Quant au principe de libre transfert, l’un des piliers du fonctionnement du système CFA, il facilite des sorties colossales de capitaux.
Au bout du compte, les pays de la zone franc se trouvent enfermés dans un rôle de producteurs de matières premières et de consommateurs de produits importés. Le franc CFA contribue ainsi à l’augmentation du chômage, de la misère, de l’émigration dite « illégale »... Ce n’est sans doute pas un hasard si la plupart des personnes secourues en janvier 2021 par SOS Méditerranée étaient originaires de pays de la zone franc, dont le Mali (certes en guerre), la Côte d’Ivoire (qui n’est pas en guerre) et le Sénégal (pas en guerre non plus). Sur quatorze États membres de la zone franc, neuf sont aujourd’hui classés parmi les « pays les moins avancés » (PMA).
Pas de démocratie
L’hypocrisie des tenants du système CFA devrait aussi faire réagir tous ceux qui se préoccupent de démocratie, d’équité, de justice. Rendez-vous compte : la France garde son emprise sur le franc CFA sous le prétexte qu’elle joue un rôle de « garant », mais ce rôle est en réalité fictif !
Le président malien Modibo Keita l’a dit publiquement en 1962 (« La France ne garantit le franc CFA que parce qu’elle sait que cette garantie ne jouera pas effectivement »), le journaliste français Paul Fabra l’a écrit en 1972 dans Le Monde dans un article intitulé « Zone franc ou zone de pauvreté ? », et cette réalité a été rappelée à plusieurs reprises lors des derniers débats parlementaires. Au cours d’une séance de la commission des finances de l’Assemblée nationale en septembre 2020, un député a ainsi expliqué que la « garantie » française n’avait pas été activée depuis au moins 1994 et que tout était fait pour qu’elle ne le soit plus.
De plus, Paris gère le système dans l’opacité. Il suffit de lire le récent rapport de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale sur le projet de réforme, écrit par un député LREM, pour s’en rendre compte. « L’annonce du 21 décembre 2019 à Abidjan, par les présidents français Emmanuel Macron et ivoirien Alassane Ouattara, de la réforme monétaire a été une surprise pour tout le monde – élus, opérateurs économiques, banque centrale et population », note ce texte, parlant d’un « accord négocié dans le plus grand secret par une poignée de personnes à Paris et à Abidjan ».
Les dirigeants et citoyens des pays concernés par la réforme ont été ainsi mis devant le fait accompli par les présidents Macron et Ouattara. Ceux des États de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), dont ils font aussi partie, n’ont pu que constater la volonté de Paris de torpiller leur propre projet de monnaie commune (c’est l’un des trois objectifs non avoués de la réforme, les deux autres visant à réduire les critiques et à faire faire quelques économies au Trésor français).
Quant à la suite du processus d’adoption de cette « réforme » précipitée, elle est, elle aussi, stupéfiante, comme l’ont fait remarquer le sénateur communiste Pierre Laurent et le député communiste Jean-Paul Lecoq. Ce dernier a souligné devant ses collègues de l’Assemblée nationale combien il était aberrant et suspect que la France soit « le premier pays à ratifier cet accord, alors qu’en toute logique elle aurait dû attendre que les pays directement concernés l’aient fait d’abord ».
M. Lecoq a dû rappeler que la monnaie est une « institution politique et économique absolument fondamentale, puisque c’est elle qui permet à une zone de déterminer et de piloter son économie en se fixant des objectifs de développement ».
Toutes ces manœuvres du gouvernement pour prolonger la durée de vie du franc CFA (on peut ajouter que la « réforme » a été en partie appliquée avant même d’être soumise aux parlements français et africains) et la fiction organisée autour de la soi-disant « garantie » française n’intéressent donc pas les médias.
Sans gêne, la France officielle continue par conséquent d’imposer sa volonté aux autres (pour sauvegarder évidemment ses propres intérêts et ceux des entreprises françaises qui opèrent sur le continent et sont les premières bénéficiaires du système).
Les observateurs étrangers choqués
Ailleurs, les réactions sont très différentes : les journalistes, économistes et politistes des autres pays occidentaux sont choqués lorsqu’ils constatent que le franc CFA existe encore, soixante ans après les indépendances, et qu’il fonctionne sur la base des principes posés durant la période coloniale. En général, ils n’ont pas peur de le qualifier de « colonialiste », « impérialiste », « désastreux », « système d’exploitation », etc.
Dans un article publié en décembre 2020, le journaliste espagnol Jaume Portell Caño identifie le franc CFA comme l’une des cinq principales causes du phénomène migratoire partant du Sénégal vers l’Europe, une approche systémique que l’on trouve rarement dans la presse française.
Les Africains anglophones regardent eux aussi avec effarement cette domination monétaire française sur leurs voisins francophones. En 2018, la célèbre écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie déclarait : « Je vois beaucoup de différences entre les mondes anglophone et francophone, dans l’occupation de l'espace en Afrique. Le franc CFA rattaché au franc français (aujourd’hui l’euro, ndlr), par exemple, me paraît complètement rétrograde. »
Le changement ne viendra pas des dirigeants africains, soumis à la France
Le fait que les relations de la France avec les pays de la zone franc soient autant viciées et malsaines est l’autre raison qui devrait interpeler les progressistes français. Car le changement ne viendra pas des dirigeants africains : parce qu’ils sont pour la plupart redevables envers les autorités françaises (qui les ont bien souvent aidés à conquérir le pouvoir et à s’y maintenir durablement) ou craignent des représailles, ils ne prendront pas le risque de déplaire à Paris. Ils ne bougeront pas non plus parce qu’ils font généralement partie de la petite élite africaine qui tire quelques avantages du système CFA.
C’est pourquoi les activistes, économistes, politiques, journalistes et citoyens des pays africains qui réclament l’abolition du franc CFA depuis plusieurs décennies ont besoin que leurs collègues français et européens se mobilisent.
Le franc CFA n’est pas une question annexe ou exotique qui ne concernerait que les pays africains, qu’il faudrait laisser aux fonctionnaires de Bercy ou aux lobbies françafricains, et garder reléguée dans les bas-fonds de l’actualité. Il est la clé de voûte de la domination que la France continue d’exercer sur des États formellement indépendants.
Tant que l’ensemble des progressistes français s’en désintéresseront, ils conforteront par leur silence l’État français dans son choix de poursuivre sa logique coloniale en Afrique.
Pour en savoir plus sur le franc CFA : L’arme invisible de la Françafrique, une histoire du franc CFA, Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla (La Découverte, 2018). En anglais : Africa's Last Colonial Currency, The CFA Franc Story, Fanny Pigeaud & Ndongo Samba Sylla (Pluto Press, février 2021).
par Yoro Dia
POPULISME INTELLECTUEL ET CONFINEMENT UNIVERSITAIRE
Nos meilleurs étudiants doivent aller dans les meilleures universités du monde. Un pays se développe avec des élites et des idées, mais aussi avec l’enracinement et surtout l’ouverture
«Si vous estimez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance.» Ainsi parlait Abraham Lincoln. Le Sénégal, après avoir choisi l’éducation, ce qui fait de la ressource humaine notre avantage comparatif, a décidé d’essayer l’ignorance. Ce choix est devenu une lame de fond que l’affaire Diary Sow confirme. Le Sénégal et le lycée Louis-Le-Grand, c’est de Senghor à Diary Sow. Comment des universitaires et des enseignants peuvent-ils utiliser un cas singulier (Diary Sow) pour demander qu’on jette le bébé avec l’eau du bain ? Comment peut-on partir d’un cas particulier qui n’a malheureusement pas marché pour sombrer dans la généralisation abusive en invoquant un nationalisme universitaire anachronique et ridicule dans un monde interconnecté et mondialisé ? Aujourd’hui, le monde du savoir est devenu ce que Senghor appelait la civilisation de l’universel. Nos meilleurs étudiants doivent aller dans les meilleures universités du monde et refuser le confinement académique que prônent certains intellectuels populistes. Quand Felwine Sarr (dont le seul défaut est d’être Sérère) va hisser très haut les couleurs du Sénégal dans la compétition académique mondiale, en déconfinant la pensée, on lui fait un procès académique en oubliant que l’Ugb reste son port d’attache académique.
La qualité des ressources humaines a toujours été l’avantage comparatif du Sénégal et est le socle de l’exception sénégalaise, où le débat politique a été pendant très longtemps débat d’universitaires (Lamine Guèye, Senghor, Cheikh Anta Diop, Abdoulaye Wade, Abdoulaye Bathily, Assane Seck…) Aujourd’hui, qui ne se réjouit de la qualité des débats auxquels invitent le centralien Mamadou Lamine Diallo, de voir Tidiane Dème, pendant longtemps à la tête de Google Afrique, ou Kéba Keinde diriger l’une des plus grandes banques de Dubaï, en plus d’avoir eu Amadou Makhtar Mbow à la tête de l’Unesco ou Jacques Diouf à la Fao ? Dans un pays avec une telle histoire, le discours anti-élite et le populisme intellectuel ambiant ne sont rien d’autre qu’une invitation au sabordage.
Si le Sénégal, après avoir choisi l’éducation, (qui rapporte plus qu’elle ne coûte), «essaie l’ignorance» en cédant à la pression du populisme intellectuel et un communisme universitaire, il scie la branche sur laquelle il est assis. Le discours du nationalisme universitaire est non seulement anachronique, mais n’a aucun sens dans la mondialisation. Même si on avait les meilleures prépas, cela ne devrait pas nous empêcher d’envoyer nos étudiants à la conquête du savoir, à la conquête du monde.
Les Etats-Unis, qui ont pourtant de très grandes universités de référence, envoient leurs étudiants à l’étranger. Aussi bien dans ma promo à Sciences Po qu’à l’Ena, il y avait des Américains et des Allemands (le plus grand pays de la pensée après la Grèce). Un pays se développe avec des élites et des idées, mais aussi avec l’enracinement et surtout l’ouverture, comme le prouve l’exemple du Japon. La nature ayant horreur du vide, avec le populisme anti-élite ambiant, nos meilleures élites se sont confinées et ont peur de prendre la parole, et ont ainsi laissé la place à des ignorants avec de l’autorité, qui monopolisent le débat public où le refus de la lumière est devenu la loi. C’est pourquoi la Joconde vit une si grande solitude au Musée des civilisations, dans le pays de Senghor.
par Sidy Diop
VACCINONS-LES
Ne faut-il pas remettre à leur place tous ces faux sachants, ces pseudo-experts et ces docteurs soigne-tout qui inoculent aux populations le venin du doute ?
Alors que ce satané virus prend ses aises et convertit des légions de malades à sa religion du manque d’air et du poumon défectueux, n’est-il pas temps de monter plusieurs marches sur l’échelle de la gravité ? Ne faut-il pas remettre à leur place tous ces faux sachants, ces pseudo-experts et ces docteurs soigne-tout qui inoculent aux populations le venin du doute ? Les risques de cette amère parenthèse ne doivent pas être sous-estimés.
En période d’épidémie, le prochain devient menace, l’ami devient danger : les valeurs s’inversent. Pour faire preuve de solidarité, il faut s’isoler. Pour aider les autres, il faut s’en éloigner. Pour rester en contact avec l’extérieur, il faut rester à l’intérieur. Pour survivre, il faut s’accrocher au bon sens (la chose la mieux partagée au monde, paraît-il), ne rien céder aux paniquards, certes, mais tout refuser à cette embrouillamini ascientifique qui se déverse dans les médias et sur les réseaux sociaux au nom de la liberté d’expression et d’opinion. Aux complotistes, aux sceptiques résolus et aux paranoïaques qui s’opposent à tout, il faut injecter le sérum de la retenue.
DECLARATION DE PATRIMOINE, GAGE DE TRANSPARENCE OU INSTRUMENT DE POUVOIR ?
Si les ‘’fuites’’ orchestrées à propos du patrimoine d'Idrissa Seck ont des visées politiciennes, elles ont aussi le mérite de mettre en lumière un anachronisme : l’exception devient la règle en matière de déclaration de patrimoine, au mépris de la loi
La déclaration de patrimoine a, à bien des égards, des allures de gageure pour nombre de personnalités sénégalaises assujetties. Les menaces et rappels à l’ordre du chef de l’Etat n’y font pas grand-chose. Les ‘’fuites’’ orchestrées sur le patrimoine du président du Conseil économique, social et environnemental, si, elles ont des visées politiciennes, elles ont aussi le mérite de mettre en lumière un anachronisme : l’exception devient la règle, en la matière, au mépris de la loi.
Idrissa Seck déshabillé. Macky Sall et ses proches toujours recouverts d’un grand voile de mystère. Pour le premier, les choses sont allées très vite. A peine a-t-il déposé, conformément à la loi 2014-17 du 2 avril 2014, sa situation patrimoniale, vendredi dernier, le voilà livré à la vindicte populaire. En sus du cyber campus et de sa maison du Point E que tout le monde connaissait déjà, le magazine ‘’Le Confidentiel’’ informe qu’il posséderait deux autres terrains et une maison où il logerait sa sœur à Thiès. Toujours dans la région, il détiendrait un domaine à Sindia. Pour les terrains, il aurait acquis l’un auprès d’un homme d’affaires ; l’autre lui aurait été offert par l’homme d’affaires Abbas Jaber pour y ériger, au nom d’une fondation de ressortissants thiessois, une école d’excellence.
Dans la région de Dakar, l’actuel président du Conseil économique, social et environnemental posséderait, en sus de sa maison du Point E, une autre maison à Toubab Dialaw et un terrain de deux hectares situé en bordure de mer, près de Mermoz.
Interpellé sur ces révélations, ce membre de son entourage, qui n’a pas voulu s’épancher sur le sujet, a tenu cependant à préciser : ‘’Pour moi, ce n’est ni plus ni moins que de la stigmatisation et une campagne de désinformation. Le président Idrissa Seck devait être félicité, parce qu’il n’a pas attendu que le débat de sa déclaration de patrimoine soit posé. De manière spontanée, il s’est acquitté de son obligation légale. Je pense qu’il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Ce dont il est question comme biens, même un ministre aurait pu l’avoir.’’
A propos des évaluations financières qui ont été faites sur lesdits biens, il estime que cela n’engage que leurs auteurs. ‘’Il est évident qu’il y a trop d’exagérations. Ce qui est important de relever, c’est que les mêmes qui disaient qu’Idrissa a rejoint Macky, parce qu’il serait fauché, ce sont les mêmes qui disent aujourd’hui qu’il est milliardaire. C’est ça qui devrait vous interpeller’’.
Régime juridique de la déclaration
Mais d’où provient la fuite ? Est-ce du camp d’Idrissa Seck qui a voulu jouer la carte de la transparence jusqu’au bout ? Est-ce de l’Ofnac ou de ses membres qui ont laissé fuiter l’information ? Dans le premier cas, ce serait tout à fait légal. Par contre, si c’est l’inverse, ce serait une faute lourde, passible de sanction, selon la loi de 2014.
En effet, aux termes de l’article 5 alinéa 2 dudit texte, ‘’les déclarations déposées et les observations formulées ne peuvent être communiquées qu'à la demande expresse du déclarant ou de ses ayants droit ou sur requête des autorités judiciaires’’. Dans la même veine, l’article 9, en ses alinéas 1er et 2, souligne : ‘’Le processus de la déclaration de patrimoine revêt un caractère confidentiel. Toute personne concourant à sa mise en œuvre est astreinte au secret professionnel. Tout manquement au caractère confidentiel de la déclaration de patrimoine, par divulgation ou publication quelconque, ou à la sincérité de son contenu, sera puni des peines prévues par les lois en vigueur.’’
Sur ce point, ils sont nombreux, les observateurs, à demander la levée du verrou, au nom du droit à l’information et de la transparence. D’autres invoquent, en revanche, le contexte social pour justifier la confidentialité. ‘’Dans notre société, même quand vous voyagez, on vous recommande de le garder secret, sinon vous risquez de ne pas arriver à destination. Même la mariée ; d’abord, elle rejoint le domicile conjugal la nuit. Ensuite, elle est voilée. C’est-à-dire qu’on la cache, contrairement en Occident. Donc, moi, je n’ai aucun problème à ce que la déclaration soit gardée secrète. L’essentiel est qu’elle puisse se faire. Autrement, certaines personnes qui peuvent être utiles à leurs pays peuvent ne pas accepter de servir à certaines fonctions. Je pense que nous avons une bonne loi. La seule chose à rectifier peut-être, c’est les lourdeurs’’.
Sur ce registre, des pays comme le Burkina Faso ont d’ailleurs fait des efforts considérables. Depuis août 2020, l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) a mis en place une plateforme numérique, pour faciliter la déclaration des biens des hautes personnalités. ‘’Désormais, informe le site du gouvernement burkinabé, plus besoin d’utiliser une importante quantité de papiers, à travers des formulaires, pour faire sa déclaration d’intérêts et de patrimoine…’’.
Mieux, au ‘’Pays des hommes intègres’’, sur le site de l’ASCE-LC, la liste de tous les membres de l’Exécutif ayant rempli leur obligation de déclaration est bien visible. Sur ledit portait, on y découvre une liste de 55 personnalités, dont le président de la République lui-même. Un autre tableau est prévu pour signaler les personnalités qui ne se sont pas acquittées de leurs obligations. Mais cette partie reste vierge, tous les concernés ayant fait leur déclaration.
Cela dit, en ce qui concerne la confidentialité, il convient de rappeler que dans l’exposé des motifs de la loi sénégalaise 2014-17, le législateur indique que le mécanisme de la déclaration de patrimoine ‘’vise, d'une part, à prévenir tout risque d'enrichissement illicite de titulaires de hautes fonctions et, d'autre part, à satisfaire au besoin légitime d'information des citoyens sur la situation et le comportement des dirigeants publics, dans un contexte de transparence’’.
Mais sous nos cieux, on a l’impression que la loi a tendance à se muer en un instrument entre les mains du président de la République, qui veut tenir en respect ses collaborateurs les moins disciplinés.
Pour rappel, à quelques semaines de son dernier remaniement, le président de la République avait intimé l’ordre à tous ses ministres de faire leur déclaration de patrimoine, après avoir toléré la violation de la loi pendant un bon bout de temps. Malgré les rappels de l’Ofnac. Déjà, certains y avaient vu un moyen d’avoir une idée sur l’arsenal de guerre de certains de ses proches collaborateurs, coupables du délit d’ambition.
Régime juridique de la DP
Aux termes de l’article 1er de la loi 2014-17 du 2 avril 2014, les personnes assujetties ‘’doivent, dans les trois mois qui suivent leur nomination, formuler une déclaration certifiée sur l'honneur, exacte et sincère de leur situation patrimoniale, concernant notamment leurs biens propres ainsi que, éventuellement, ceux de la communauté ou les biens réputés indivis en application de l'article 380 du Code de la famille’’.
Ces biens, prévoit la loi, sont estimés à la date du fait générateur de la déclaration, comme en matière de droit de mutation à titre gratuit. La même obligation est applicable dans les trois mois qui suivent la cessation des fonctions, pour cause autre que le décès.
Par rapport au dépôt de la déclaration de patrimoine, l’article 3 prévoit : ‘’Les autorités ci-dessus mentionnées (mentionnés à l’article 2) déposent leur déclaration de situation patrimoniale auprès de l'Office national de lutte contre la fraude et la corruption contre décharge, ou l'adressent au président de ladite structure par courrier recommandé avec accusé de réception.’’
Et il ressort de l’article 4 que ‘’la déclaration doit comporter toutes les informations relatives aux biens et actifs détenus par la personne concernée, directement ou indirectement’’.
Parlant de biens, il peut s’agir et d’immeubles et de meubles. En ce qui concerne les biens meubles, ils englobent ‘’les comptes bancaires courants ou d'épargne, les valeurs en bourse, les actions dans les sociétés de commerce en général, les assurances-vie, les revenus annuels liés à la fonction occupée ou provenant de toute autre source, les véhicules à moteur, les fonds de commerce’’, entre autres. Pour ce qui est des immeubles, ils visent ‘’les propriétés bâties au Sénégal ou à l'étranger avec description en annexe ; les propriétés non bâties au Sénégal ou à l'étranger ; les immeubles par destination au Sénégal ou à l'étranger’’.
Concernant lesdites propriétés, ‘’le déclarant, informe la loi, communique les adresses et les copies certifiées des titres authentiques. Outre les éléments de l'actif cités, le déclarant mentionne le passif de son patrimoine incluant les dettes hypothécaires, les dettes personnelles et tous autres engagements qu'il juge nécessaire de signaler’’.
REGIME SPECIFIQUE DE LA DECLARATION DU PRESIDENT
L’article 37 prévoit la publicité
Si la loi 2014-17 prévoit la confidentialité de la déclaration auprès de l’Ofnac, l’article 37 alinéa 3 de la Constitution, qui traite de la situation patrimoniale du président de la République, en dispose autrement. Aux termes de cette disposition : ‘’Le président de la République nouvellement élu fait une déclaration écrite de patrimoine déposée au Conseil constitutionnel qui la rend publique.’’
Interprété par certains comme une avancée non-négligeable en matière de transparence dans la gouvernance des affaires publiques, ce texte est jugé ‘’très laconique’’ par plusieurs autres observateurs avertis.
Mais le mérite, à ce niveau, c’est surtout d’avoir prévu la possibilité et de permettre au peuple de s’informer sur le poids financier de celui qui a été élu comme chef de l’Etat.
Le hic, c’est que depuis sa réélection, il n’a nullement été rendu à la connaissance du public le patrimoine du président de la République Macky Sall. A ce jour, la seule déclaration qui a été rendue publique, c’est celle en date de 2012, qui avait suscité, à l’instar de la déclaration d’Idrissa Seck, un tollé
Par Me Cheikh FALL
UNE NECESSITE POUR VAINCRE LE CORONAVIRUS
Face à cette catastrophe sanitaire, comme certains aiment bien le nommer, il faut bien qu’il y ait une solution comme pour tout problème qui menace l’existence humaine, et la survie des hommes
La COVID-19, ou encore appelée Coronavirus, maladie provoquée par un virus qui secoue le monde depuis bientôt 2 ans, a fait son apparition en décembre 2019 dans la lointaine et reculée contrée de Wuhan, dans la province du Hubei en Chine, avant de se propager comme une trainée de poudre très rapidement, d’abord dans le reste de la Chine, puis dans le reste du monde, débouchant à une pandémie mondiale ; une crise sanitaire sans précédent, aux troubles socioéconomiques d’une rare violence, tellement le chamboulement a été soudain, profond et disproportionné.
Face à cette catastrophe sanitaire, comme certains aiment bien le nommer, il faut bien qu’il y ait une solution comme pour tout problème qui menace l’existence humaine, et la survie des hommes. S’est alors lancé une incroyable et extraordinaire course au vaccin contre la Covid19, une guerre des laboratoires et des experts. Face à cette pandémie, les chercheurs du monde entier rivalisent d’ardeur et de prouesse et ont exploré de nombreuses pistes pour trouver un médicament antiviral ou un vaccin, n’est-ce pas le Saint Graal en cette période où le monde dévasté ne veut qu’une chose, qu’une seule chose : guérir du Coronavirus, vite et rapidement ! La guerre des solutions aura donc bien lieu, l’occasion est immense, les enjeux gros comme le monde, les intérêts eux, rocambolesques. Faire breveter leur vaccin anti COVID-19, est certainement aux yeux de l’industrie pharmaceutique, quelle qu’en soit la marque d’ailleurs, la priorité la plus absolue.
Selon une ressente étude de L’organisation Mondiale de La Santé (OMS), environ 169 vaccins candidats contre la COVID-19 sont en cours de développement, dont 26 en phase d’essai chez l’homme. On a par exemple le vaccin des laboratoires Pfizer (Etats-Unis), BioNTech (Allemagne), Spoutnik VL en Russie qui se livrent tous une course acharnée pour une production mais aussi une distribution rapide à l’échelle mondiale avec l’adjonction de plusieurs cibles, continents et pays principalement ceux de l’Europe et de l’Amérique.
Et l’Afrique dans tout cela ?
Bien que touchée par La COVID-19 le berceau de l’humanité est quasiment absent de cette course médicale effrénée de recherches des vaccins et se trouve ainsi dans une situation délicate en vue de l’acquisition des vaccins anti COVID malgré le dispositif COVAX mis en œuvre par l’OMS. Dont, la majorité de ses pays en est membre, mais dont malheureusement le leadership est conservé par les pays du Nord, qui sont eux aussi en urgence d’acquérir les vaccins à juste titre contre une pandémie, particulièrement violente sous leurs cieux.
Nous sommes mêmes amenés à nous demander si l’OMS face à la difficile mise en œuvre de l’initiative COVAX, ne devrait-elle pas encourager les états sièges des laboratoires, titulaires des brevets d’inventions des vaccins contre la COVID 19 à imposer des licences obligatoires Me Cheikh FALL – Avocat à la Cour – Conseil en Propriété Industrielle – Mandataire agréé à l’Organisation Africaine de Propriété Industrielle (OAPI) pour permettre à tous pays, notamment africains, d’acquérir facilement et à moindre coût les vaccins ?
Il faut au préalable préciser que Le dispositif COVAX est une initiative mondiale sous la facilitation de l’OMS, visant à assurer l’accès rapide et équitable de tous les pays aux vaccins contre la COVID-19, quel que soit leur niveau de revenu.
Le COVAX devait permettre le financement de la recherche, le regroupement des achats et la distribution d’environ 2 milliards de doses de vaccin équitablement à tous pays touchés d’ici la fin 2021.
Malheureusement, notons-le, dès le moment où certains industriels se sont dits en capacité de fournir un vaccin, certains pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni ou encore l’Union européenne, ont commencé à passer des accords bilatéraux et ont ainsi très vite capté la plus grande partie des doses que les compagnies sont en capacité de produire. Alors que, certains pays vont être servis, le reste du monde notamment les pays africains devront patienter avant de recevoir des doses et de se lancer dans une campagne de vaccination. Face à l’inefficacité du dispositif COVAX, et compte tenu de l’urgence qu’impose la pandémie mondiale de COVID 19, l’option d’imposer des licences obligatoires aux titulaires du brevet d’invention des vaccins semble être la plus appropriée pour permettre une production massive des vaccins.
En effet le laboratoire titulaire d’un brevet d’inventions sur un vaccin bénéficie pendant la période de protection (20 ans dans l’espace OAPI), d’un droit exclusif d’empêcher toute exploitation commerciale par des tiers (ce qui implique la fabrication, l’utilisation, l’offre à la vente, la vente ou l’importation) de l’invention brevetée sans son autorisation dans le pays ou la région où le brevet produit ses effets.
Tout titulaire d’un brevet a également le droit d’attribuer et de conclure des contrats de licence portant sur son invention. Ces licences concédées par le titulaire du brevet sont réputées être “volontaires”.
Toutefois, lorsque certains brevets d’invention présentent un intérêt vital pour l’économie du pays, la santé publique ou la défense nationale, dans certaines circonstances et sous certaines conditions une licence “obligatoire” ou “non volontaire” peut être concédée à un tiers par une autorité compétente nationale, ce qui l’autorise à exploiter l’invention brevetée pendant la période de protection sans l’autorisation du titulaire du brevet.
Les licences « non volontaires » ou « licences d’offices » ont également été consacrées par Les Articles 46 à 56 de l’annexe I de l’Accord portant révision de l’Accord de Bangui du 2 mars 1977 instituant une Organisation africaine de la propriété intellectuelle révisé le 24 février1999 dont le Sénégal est membre.
L’article 31 de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (l’Accord sur les ADPIC) adopté à Marrakech le 15 avril 1994, dont sont signataires la majorité des pays du monde en tant que membres de l’Organisation Mondiale du Commerce dispose également que « dans des situations d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence ou en cas d’utilisation publique à des fins non commerciales » l’administration nationale peut octroyer des licences obligatoires portant sur des brevets d’inventions de « médicaments ».
En 2001, La Déclaration sur l’Accord sur les ADPIC et la santé publique est venue préciser cette notion d‘urgence en indiquant notamment que « Chaque Membre a le droit de déterminer ce qui constitue une situation d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence, étant entendu que les crises dans le domaine de la santé publique, y compris celles qui sont liées au VIH/SIDA, à la tuberculose, au paludisme et à d’autres épidémies, peuvent représenter une situation d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence » Cette disposition permet ainsi, à l’administration nationale compétente, d’autoriser des laboratoires autres que ceux ayant inventés le vaccin à le produire pour faciliter la fabrication rapide et en grande quantité des vaccins.
Dans une étude publiée en 2019, l’OMPI recensait 156 pays ou territoires reconnaissant l’exception relative aux licences obligatoires qui permet l’utilisation d’un brevet sans autorisation du titulaire. La COVID-19 constitue sans nul doute une « circonstance d’extrême urgence », et certains pays comme la France, l’Etat d’Israël, le Canada et l’Allemagne ont commencé à adopter des mesures extraordinaires pour assouplir les conditions du recours à la licence d’office ou obligatoire.
Les limites de ces dispositions sur la licence obligatoire c’est qu’elle ne peut se décider et s’appliquer en principe qu’au niveau national. Comment doit-on étendre ses effets afin qu’elle s’applique à l’ensemble des pays du monde touchés par l’épidémie de COVID 19 et ne pouvant bénéficier des doses suffisantes de vaccin ?
La réponse à cette question peut venir également d’une nouvelle disposition de l’Accord sur les ADPIC”, introduite lors de la modification du 23 janvier 2017 qui étend les effets de la licence obligatoire en dehors du territoire national ou la mesure peut être prise.
Il ressort ainsi de l’article 31 bis inscrite lors de la modification de l’“Accord sur les ADPIC” que par exemple une licence obligatoire spéciale peut permettre l’exportation de produits pharmaceutiques brevetés fabriqués sous une telle licence vers des pays dont la capacité de fabrication est insuffisante dans le domaine pharmaceutique. Cette disposition de l’“Accord sur les ADPIC” est un bon prétexte que l’OMS peut évoquer pour convaincre les Etats membres à imposer des licences obligatoires aux laboratoires fabriquant de vaccin anti COVID afin de permettre leur production en grande quantité et faciliter leur exportation à moindre coût vers les pays ayant une capacité de fabrication insuffisante ou des moyens financiers limités.
Un accès libre ou une licence à des conditions raisonnables
D’ailleurs le Directeur Général de l’OMS s’est déjà déclaré favorable à la mise en place d’un accès libre ou une licence à des conditions raisonnables pour tous les pays sur les médicaments, vaccins et produits de diagnostic utilisés contre la COVID-19. Il faut maintenant espérer que les états qui ont déjà exploré l’option des licences obligatoires s’assurent de leur effectivité et que les autres pays où se trouvent des laboratoires fabriquant de vaccin anti COVID 19 emboîtent le pas, pour le grand bien de la santé en Afrique et surtout dans le monde. En conclusion, la nécessité pour les états d’octroyer des licences obligatoires spéciales à tous laboratoires disposants de moyens de production des vaccins anti COVID-19 s’impose en ce moment et cela va permettre la fabrication et la distribution à moindre coût des vaccins dans tous les pays africains en particulier et du monde en général.
Par Pape Ndiaye
KHASSIM, POURQUOI NOUS AS-TU DONC LÂCHÉS ?
Finalement, devant le clavier de mon ordinateur, j’ai pris mon courage à deux mains pour plaider, à mon tour, pour celui qui fut mon éternel avocat-défenseur
Contrairement à avant-hier lorsque la triste nouvelle a bouleversé totalement ma journée et impacté mon enthousiasme de vivre, aujourd’hui, je m’efforce de ne pas pleurer pour pouvoir rendre hommage à un ami, un frère, un avocat, un « marabout » et un confident disparu : Me Serigne Khassim Touré Madamel.
Finalement, devant le clavier de mon ordinateur, j’ai pris mon courage à deux mains pour plaider, à mon tour, pour celui qui fut mon éternel avocat-défenseur : Me Khassim Touré. Avant de démarrer ce texte, j’avais juré de ne pas pleurer. Malheureusement, le moindre souvenir de « Khass » a fait couler mes larmes. Des larmes que je me suis pourtant efforcé de retenir en me disant intérieurement ceci : « non, tu es un homme et tu ne dois pas pleurer ». Mais mes glandes lacrymales refusaient de m’obéir ! C’est parce que Me Khassim Touré et moi, nous étions trop proches, trop liés l’un à l’autre.
La dernière fois que je l’ai eu au téléphone, c’était le samedi 09 janvier 2021. Je l’avais appelé pour le mettre en rapport avec un ami, voire un père, du nom de Sidibé, un ancien cadre d’Air Afrique. Il était confronté à un sérieux problème : depuis un an, il peinait à faire expulser des locataires mauvais payeurs.
Ce samedi-là, donc, Me Khassim Touré m’avait parlé en ces termes : « Paco-Rabanne (il m’appelait ainsi), je suis malade ! Dis à ton ami que mon cabinet va s’occuper de son dossier. Et dès lundi, qu’il aille voir Me Sadio, un de mes collaborateurs… » m’avaitil rassuré. J’en avais profité pour lui lancer une pique : « Dommage, je voulais te rentre visite comme d’habitude. Mais tu es hors de Dakar, donc tu fais du tapaalé ! Khassim bayil tapaalé et cesse de faire la « justice » buissonnière…».
Malgré sa voix qui était à peine audible, Khass avait répliqué tout de go : « Dégage, baal nalaa (je te pardonne) ! Je n’ai jamais vu un « beuk nek » (chambellan) aussi insolent que toi à l’endroit de son marabout que je suis. Mais le jour de votre procès (Ndlr : Le Témoin contre Alioune Ndoye), Mamadou Oumar Ndiaye saura que je suis malade. Car c’est mon jeune collaborateur Me Guèye qui va plaider à ma place…». En l’entendant parler ce jour-là, je m’étais dit qu’il se payait ma tête comme à son habitude. Hélas, je ne me doutais pas que ce serait là notre dernière conversation téléphonique.
Dans les tribunaux, lorsque le prévenu ou son avocat sont absents, le juge peut décider soit de reporter le procès ou de statuer par défaut. Dieu sait que durant toutes ces longues années de compagnonnage et avec Me Khassim Touré, « Le Témoin » n’a jamais été condamné par défaut ! Ce, grâce à un Maître Touré très sérieux, méthodique et assidu. Un conseil qui veillait méticuleusement sur les dates d’audience et suivait les renvois à n’en plus finir dont il ne manquait pas de nous tenir informés. Il a été absent d’un procès du « Témoin » une seule fois et c’était le jeudi 21 janvier 2021, cela fait donc deux semaines, lors de l’examen de l’affaire « Alioune Ndoye/Le Témoin ». C’est le seul jour où Me Khassim Touré nous a « lâchés ». Et encore, puisqu’il avait envoyé son jeune collaborateur Me Guèye pour nous défendre aux côtés du vétéran Me Cheikh Koureyssi Ba !
De par son éloquence, sa technicité — donc sa parfaite connaissance du droit — et ses effets de manches, Me Khassim Touré était l’absent le plus présent. Au sortir de la salle, notre dirpub MON n’avait pas manqué d’exprimer son inquiétude en ces termes : « Maintenant, je dois me rendre à l’évidence que notre ami Khassim est vraiment malade. Car, seule la maladie pouvait l’empêcher de venir me défendre… » se désolait-il à propos d’un homme si vivace, si taquin, si jovial, si ouvert, si généreux, si serviable, si mobile…
Et Me Kouressy Ba, l’un de nos avocats, de renchérir : « Vous voyez les vicissitudes de la vie ! Ndeyssan, Khassim avait tellement bien préparé ce procès et voilà qu’il n’a pas pu y prendre part... » regrettait-il. Deux semaines après c’est-à-dire lundi 1e février 2021, l’annonce de sa mort est venue nous confirmer que seul un motif impérieux avait pu empêcher Me Serigne Khassim Touré de venir défendre « Le Témoin » !
Au nom du père, Me Touré se constitue…
De son vivant, El Hadj Cheikh Touré, père de feu Me Khassim Touré, fut un richissime opérateur économique à Guinguinéo. Malgré sa richesse et sa notoriété, il fut pourtant un modeste talibé mouride très proche de tous les Khalifes généraux d’alors. Pour symboliser cette affection et rapprocher les deux familles (Mbacké et Touré), Serigne Abdoul Lakh Mbacké et Serigne Bassirou Mbacké ont chacun donné la main de sa fille à Serigne Cheikh Touré. Ces relations d’allégeance sur fond d’alliance familiale, El Hadj Cheikh Touré les a léguées à son fils ainé Serigne Fallou Touré. Mais aussi à Me Serigne Khassim Touré qui, en sa qualité d’avocat, s’était très tôt autoproclamé détenteur et défenseur de l’honneur et la dignité des Touré.
A preuve par l’affaire Khalifa Sall dans le cadre de laquelle son frère Mbaye Touré avait été emprisonné. Me Touré avait tout sacrifié pour laver l’affront et l’honneur familial mais aussi défendre son frère, quitte à mettre une croix sur son amitié avec le président Macky Sall. Et aux privilèges que ce dernier, qui lui portait une grande estime, pouvait lui octroyer. Certains disaient même qu’il pouvait faire son entrée dans le gouvernement. Mais qu’importe, « la famille avant le gouvernement » s’était étranglé l’avocat-écrivain. D’où sa constitution au nom de son défunt père El Hadj Cheikh Touré et de la famille.
Sans langue de bois, le digne fils de Guinguinèo avait fait une plaidoirie remarquable pour tenter d’extirper son frère des mains de ses bourreaux « parce que Mbaye Touré et les autres sont des otages politiques dans un procès éminemment politique » avait-il martelé lors du procès Khalifa Sall et consorts. Pendant deux heures d’horloge, Me Khassim Touré avait plongé la salle dans l’émotion et la tristesse au point que beaucoup de larmes avaient coulé ce jour-là. Me Khassim Touré était un avocat de principes et de convictions. Un défenseur acharné des libertés. Il l’a démontré dans plusieurs affaires politico-judiciaires et sociétales qui ont eu à secouer la République ou la société sénégalaise.
Les dossiers de ses clients, il les défendait sans tricher et avec une passion mais aussi une verve telles que l’on aurait cru qu’il était concerné personnellement. Entier, il lui est arrivé de refuser des dossiers qui auraient pu lui rapporter des honoraires de plusieurs millions de francs par amitié pour des gens qu’on lui demandait de traîner devant les tribunaux.
Dix invités pour un…poulet
Khassim Touré était un homme aux qualités sociales et humaines multidimensionnelles. Un seul « défaut » qu’on lui connaissait durant toute sa courte vie, c’est qu’il aimait trop inviter, trop partager avec ses amis, trop se retrouver dans une ambiance familiale et conviviale. Ne vous aventurez surtout pas à appeler Khassim le week-end pour avoir de ses nouvelles. Car, dès que vous l’aviez au téléphone, il s’empressait toujours de vous inviter à venir manger. « « De grâce, viens dîner ce soir à la maison » ne manquait-il pas de dire spontanément. Au finish, il arrivait des soirs où près de dix (10) invités de « fortune » se retrouvaient autour d’un seul et unique petit poulet. Trop d’invités, peu de « gourmandise », ces diners anecdotiques ont toujours plongé ses épouses dans une situation inconfortable. Parce que Monsieur Touré ou le maitre des lieux les mettait toujours devant le fait accompli. Mais l’essentiel pour Khassim, c’était l’ambiance de retrouvailles. Il tenait à ce que chaque weekend, il y ait un « berndé » chez lui ! Khassim aimait recevoir et régaler. D’ailleurs, à chaque grand magal de Touba, sa maison dans la capitale du mouridisme constituait un lieu de convergence de nombreux magistrats, avocats, journalistes, diplomates et autres amis venus commémorer le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba. Un événement annuel au cours duquel le fervent talibé mouride Khassim Touré étalait son immense générosité en dépensant sans compter pour le copieux « berndé ». Grand farceur devant l’éternel, Khassim profitait de ce rendez-vous annuel pour s’autoproclamer « marabout » de ses propres amis. « Depuis ce matin, j’ai constaté que mes deux « beuk nek » Ousmane Chimère Diouf (magistrat) et Momar Diongue (journaliste) ne sont venus à Touba que pour manger, « sauce » rék !
Non seulement ils ont débarqué sans « adiya », mais encore ils ne jouent plus leur rôle c’est-à-dire organiser la ziarra de mes talibés et se mettre au service de ces derniers, je serai donc obligé de les rapatrier à Dakar…» chambrait-il. Juste pour montrer ô combien l’illustre disparu était humble, taquin et cordial. Un homme d’exception à la vie tout entière consacrée à Serigne Touba et au travail. Toutefois, sa grande particularité était qu’en dépit de son appartenance connue et reconnue à la confrérie mouride, Khassim entretenait aussi des relations empreintes de cordialité avec tous les foyers religieux du pays. Eclectique, il avait des amis dans tous les partis politiques. Un vrai homme du monde !
On retient aussi de Khassim Touré cette autre facette : celle du précieux régulateur social qu’il a toujours été. C’est ainsi grâce à ses bons offices qu’il avait réussi à faire libérer l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall. De même que son frère Mbaye Touré. C’est cette immense figure du Barreau ayant inlassablement porté les valeurs d’humanisme sur terre qui vient de tirer sa révérence. Le cœur lourd, je prie pour le repos éternel de cet homme exceptionnel, unique : Serigne Khassim Touré Madamel ! L’ensemble de la rédaction du « Témoin » se joint à moi pour exprimer sa reconnaissance à l’endroit de celui qui fut notre avocat attitré. A sa famille éplorée, ses confrères, ses amis ainsi que toute communauté mouride, nous présentons nos sincères condoléances. Que la terre de Touba, une ville qu’il a toujours chérie, lui soit légère…
MORT SUBITE AU VOLANT À THIÉNABA
Chauffeur d’un car ’’Ndiaga Ndiaye’’ faisant un circuit horaire, Djiby Tine, a succombé, victime d’une mort subite, au volant.
Chauffeur d’un car ’’Ndiaga Ndiaye’’ faisant un circuit horaire, Djiby Tine, a succombé, victime d’une mort subite, au volant. D’après les témoins de cette tragédie, repris par Vox populi, cela a causé un dérapage du car de transport en commun qui est allé heurter un arbuste.
Les blessés ainsi que le corps sans vie ont été évacués à l’hôpital régional Amadou Sakhir Ndiéguène de Thiès par les sapeurs-pompiers.
Le drame s’est produit vers 17 heures hier à Keur Ibra, dans la commune de Thiénaba.
La victime aurait fait une crise d’asthme.
IDY SERAIT-IL VICTIME DES MANŒUVRES «MACKYAVELIQUES» DE MBOUROU ?
Quelques jours après avoir déclaré son patrimoine à l’Ofnac, le nouveau président du CESE voit ses biens étalés sur la place publique. Et si le camp de son nouvel allié Macky Sall était derrière cette manœuvre ?
Quelques jours après avoir déclaré son patrimoine à l’Ofnac, le nouveau président du Conseil économique, social et environnemental (CESE) voit ses biens étalés sur la place publique. Une divulgation qui a même l’institution dirigée par Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté à voler au secours de M. Idrissa Seck. Et si le camp de son nouvel allié Macky Sall était derrière cette manœuvre… Mackyavélique ?
« La politique est un sport de combat, une guerre sans pitié. Ce n’est pas l’amour du prochain mais la haine de l’autre, du rival, du « frère » qui guide l’homme politique. Pour avancer et triompher, il doit combattre, détester et au final, « tuer » le rival qui lui est le plus proche », écrivaient Renault Dély et Henry Vernet dans leur ouvrage « Tous les coups sont permis ».
Vendredi 29 janvier dernier, le président du Conseil Economique, Social et Environnemental déclarait son patrimoine auprès de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC). A travers cet exercice, il entendait se conformer aux exigences de la loi numéro 2014-17 du 02 Avril 2014 relative à la déclaration de patrimoine et de son décret d’application en date du 12 novembre 2014.
Hélas pour M. Idrissa Seck, il a juste fallu trois jours pour que son (fabuleux) patrimoine soit mis sur la place publique. Un patrimoine estimé à des dizaines de milliards de francs constitués notamment du lieudit « Cyber campus » à Thiès d’une valeur de 2 millions de dollars — un milliard de francs CFA, excusez du peu ! —d’un terrain de plus de 2000 m2 situé en face du même cyber campus, d’un autre titre foncier de 1700 m2, d’une maison au quartier Mbour 2, d’une autre propriété en bordure de mer, d’un domaine d’au moins 100 hectares à Bandia, d’une maison au Point E, d’un terrain de près de 2 ha en bordure de mer non loin de Mermoz, etc. Une information qui a fait les choux gras de la presse mais également des réseaux sociaux poussant l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption à réagir. « Plusieurs journaux ont publié récemment des informations sur des biens qui seraient contenues dans la déclaration de patrimoine de monsieur Idrissa Seck, président du Conseil économique, social et environnemental », écrit la cellule chargée de la communication de l’Ofnac.
Avant de rappeler que « les déclarations de patrimoine sont traitées dans le respect de la stricte confidentialité ». Le communiqué ajoute que « les personnes préposées à la réception et à la conservation de ces documents sont toutes assermentées ».
Dès lors, argue l’Ofnac, « les procédures (…) ne permettent aucune violation des données personnelles des assujettis », c’est-à-dire les personnes qui ont fait leur déclaration de patrimoine auprès de l’organe public anticorruption. En conséquence, l’Ofnac tient à préciser que les informations dont il est fait état dans lesdits articles n’engagent que leurs auteurs et ne sauraient émaner de ses services.
Seul Macky a intérêt à faire fuiter cette info…
En jetant le patrimoine du président de Rewmi sur la place publique, l’effet immédiat est sans doute de pousser le grand public à davantage diaboliser Idrissa Seck et de le conduire au bûcher. Mais, qui a donc intérêt à le faire dans ce contexte précis ? Même si on ne peut pas pour le moment citer de nom, on peut néanmoins suspecter le camp de son propre allié du moment Macky Sall. Car, des partisans du président, déçus de ce rapprochement qui, à bien des égards s’est fait à leur détriment, pourraient bien avoir intérêt à le saborder quel que soit le moyen utilisé. Le général de Gaulle avait théorisé cela en ces termes : en politique, la trahison est une question de temps ! En tout cas, de nombreux observateurs sont convaincus que cette fuite ne peut provenir que du camp présidentiel. « Vous savez, on est en politique et ce n’est pas un jeu d’enfants. Si le patrimoine de Idrissa Seck s’est retrouvé en moins de 72 heures sur la place publique, le responsable n’est personne d’autre que personne d’autre que Macky Sall. Il est un vrai tacticien politique. Il va achever politiquement Idrissa Seck après avoir réussi à le faire rallier à son camp », analyse une haute personnalité qui a voulu garder l’anonymat.
Pour un autre interlocuteur, Macky Sall ne veut pas vivre une deuxième « trahison » de Idrissa Seck. « Comme vous le savez, Macky a connu le départ prématuré de Idrissa Seck juste après son élection en 2012. Un départ suivi d’attaques sanglantes de la part du leader de Rewmi qui est arrivé deuxième lors de la présidentielle du 24 février 2019. Donc, si ce même Idrissa Seck retourne à la case de départ, Macky Sall va saisir l’occasion pour l’envoyer enfin à la retraite politique. Il va davantage le déshabiller politiquement jusqu’à ce qu’il ne vaille plus rien devant l’opinion », soutient notre deuxième interlocuteur. Lequel croit dur comme fer que le président de la République « et sa clique » seraient derrière la divulgation du patrimoine de l’actuel président du Conseil Economique, Social et Environnemental sue la place publique avec une précision qui frise le coup monté.
De toutes les façons « Soow » est perdant dans son alliance avec « Mbourou ». Car, jour après jour, son capital sympathie diminue tandis que certains de ses responsables et militants continuent à quitter son navire Orange…
Par Mamadou Oumar NDIAYE
JUSTE UNE ANECDOTE SUR L’HOMME GENEREUX QU’ETAIT AMADOU SAÏD BA
Ancien cadre à la multinationale pétrolière Mobil qu’il a servie dans des pays africains — après avoir travaillé aux ICS avant d’aller poursuivre ses études au Canada —, cet enfant de Pikine était revenu pour se mettre au service du Sénégal sur insistance
Comme un météorite, il a traversé cette vie fugace mais Dieu ce qu’il l’a bien remplie ! Amadou Saïdou Bâ, je ne l’ai pas connu depuis très longtemps, à peine une décennie. Cela m’a suffi toutefois pour apprécier le cadre compétent et l’homme généreux qu’il était. Nous nous sommes connus à Shanghai, en Chine, lors de l’Exposition universelle que cette métropole accueillit en 2010. Je m’y étais rendu en compagnie de l’alors ministre du Commerce du président Wade, Amadou Niang. Le hasard a fait que nous avons dîné ensemble dans un grand restaurant dont on dit que c’est l’un des meilleurs de cette ville. Il y avait là Khalifa Sall, maire de Dakar et aussi Mansour Cama, défunt président de la CNES.
Le courant est passé tout de suite entre nous si bien que jusqu’à la fin du séjour, nous étions tout le temps ensemble. A notre retour à Dakar, nous avons gardé le contact et au fil de nos rencontres nous avons fini par devenir des amis.
Régulièrement, nous nous retrouvions au restaurant pour échanger sur bien des sujets et il éclairait ma lanterne sur les questions économiques en particulier. Il avait une grande estime pour ma modeste personne et ne manquait pas de me le manifester. Nous sommes devenus plus proches encore l’un de l’autre lorsque nous avons découvert que nous avions une connaissance commune en la personne de Mamadou Diop « Diaranguel », originaire du même village que lui et qui travaillait comme animateur dans ma radio.
Amadou Saïdou Ba fut son grand mécène et ami à tel point qu’il m’a dit un jour ceci : « Ecoute, pour ne pas alourdir ta masse salariale, laisse-moi prendre en charge le salaire de Diop ! » J’avais refusé bien sûr tout en sachant que ce que je versais à mon animateur, c’étaient des clopinettes par rapport à ce que lui donnait Amadou Saïdou Ba tous les mois !
Ancien cadre à la multinationale pétrolière Mobil qu’il a servie dans des pays africains — après avoir travaillé aux ICS avant d’aller poursuivre ses études au Canada —, cet enfant de Pikine était revenu pour se mettre au service du Sénégal sur insistance de Mme Aminata Niane. A l’Apix d’abord où il a occupé les fonctions de directeur général adjoint, puis au Cetud en tant que président du conseil d’orientation ou d’administration avant d’atterrir au Cos-Pétrogaz.
Chaleureux, disponible, humble — je me rappelle que lorsque Diop avait perdu son épouse, il avait passé toute la journée à Guédiawaye puis y était revenu le lendemain alors qu’il aurait pu se contenter d’expédier une enveloppe —, Amadou Saïdou Ba était la générosité même. Il réglait en toute discrétion factures d’eau, d’électricité ou de téléphone, achetait des ordonnances, prenait en charge des frais d’hospitalisation. Une anecdote, une seule pour renseigner sur son infinie générosité. Tard un soir, au sortir d’un salon de thé, il avait remarqué une vieille dame qui tendait la main.
Emu et révolté, il s’était enquis de la situation de la dame et lui avait demandé quelle somme il lui fallait pour qu’elle cesse de faire la manche surtout à des heures aussi tardives pour une mère de famille. Il me semble que la dame, après un rapide calcul, lui avait répondu « 200.000 francs ». Il s’était engagé à la lui verser chaque mois et, effectivement, il avait tenu parole. Hélas, au bout de trois mois, il a retrouvé la même dame au même endroit où il l’avait rencontrée, en train de mendier ! Furieux, il l’avait interpelée et s’était vu servir une réponse qui l’avait scié : « Vous êtes un homme très généreux, je le reconnais, mais nak, franchement, la mendicité me rapporte plus que ce que vous me donnez ! » Comme quoi…
C’est de ce jour qu’Amadou Saïdou Ba avait arrêté de prendre en charge cette vieille dame. Juste pour donner une idée de la générosité de ce grand Monsieur ravi à l’attention des siens samedi dernier !
Mes sincères condoléances à toute sa famille et que Dieu l’accueille dans Son Paradis !
COUP DE PROJECTEUR SUR LA DNR
L’article 1er de ce décret dit qu’ « Il est créé à la Présidence de la République un service dénommé « Délégation générale au Renseignement national », placé sous l’autorité directe du Président de la République. L’article 2 définit ses attributions
Dans notre édition de jeudi dernier, nous annoncions en exclusivité la nomination du général de gendarmerie Cheikh Sène comme patron de la Délégation au renseignement national (DNR) dont nous disions que c’est la structure qui chapeaute tous les services de renseignements de notre pays. Pour, justement, donner à nos lecteurs une idée des attributions et du fonctionnement de cette Délégation, nous publions de larges extraits du décret N° 2014-940 / PR déjà paru dans nos colonnes une semaine après le lancement de notre quotidien.
L’article 1er de ce décret dit qu’ « Il est créé à la Présidence de la République un service dénommé « Délégation générale au Renseignement national », placé sous l’autorité directe du Président de la République. L’article 2 définit ses attributions en ces termes : « La Délégation générale au Renseignement national, en abrégé la DRN, est un service spécial de renseignement qui a pour mission de collecter, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du territoire national, d’analyser et de diffuser auprès du Président de la République et des autorités de décision concernées, les renseignements relatifs aux menaces contre la sécurité et les intérêts fondamentaux de la Nation.
Elle est également chargée de centraliser, de recouper, d’analyser et de transmettre au Président de la République les productions qui lui sont adressées par les autres services de renseignement... ». A noter que la création de la DNR a entraîné la dissolution des services qui l’ont précédée comme le Centre d’Orientation stratégique (COS) l’Agence nationale de Sécurité (ANS) tous deux créés sous le régime du président Abdoulaye Wade. Ils avaient eux-mêmes été constitués sur les cendres du CENCAT (Centre national de Coordination et d’animation du Renseignement) créé à l’époque du président socialiste Abdou Diouf et dirigé par l’alors colonel Pape Khalil Fall, rattaché à la Primature pour ne pas faire de l’ombre au BSPR ou Rondon (aujourd’hui dissous) et placé sous la supervision du regretté général Boubacar Wane. De même, la DNR a aussi entraîné la dissolution de la Direction de la Documentation et de la Sécurité extérieure (DDSE) dépendant de l’Armée et qui existait depuis l’époque du président Senghor.
Le même décret dit que la DRN « est dirigée par une autorité civile, militaire ou paramilitaire de l’Etat, nommée par décret, qui porte le titre de « Délégué général au Renseignement national », en abrégé le DRN.
Il précise que le DRN a le rang et les avantages d’un ministre. En outre, il est membre de droit du Conseil supérieur de la Défense nationale ainsi que du Conseil national de Sécurité et de ses comités spécialisés. L’article 5 du titre 2 dispose que le DRN est l’assistant direct et le principal conseiller du Président de la République en matière de renseignement. Il assiste le Premier ministre et les .ministres responsables des services de renseignement devant l’Assemblée nationale sur les questions relatives au renseignement.
La DRN est composée de trois directions générales que sont la Direction générale du Renseignement intérieur (DGRI), la Direction générale du Renseignement extérieur (DGRE) et les Services techniques.
La Direction générale du Renseignement intérieur est chargée de collecter, sur l’étendue du territoire national, et d’analyser les renseignements relatifs aux menaces contre la sécurité et les intérêts fondamentaux de la Nation. Elle comprend trois départements que sont le département «Administration », le département « Protection économique et contre la Subversion» et’ le département « Contre-terrorisme ».
Quant à la Direction générale du Renseignement extérieur (DGRE), elle est chargée de collecter, en dehors du territoire national, et d’analyser les renseignements sur toutes les menaces contre la sécurité et les intérêts fondamentaux de la Nation. Elle est la seule administration habilitée à déployer à l’étranger des personnels de renseignement. La DGRE comprend .trois départements : le département « Administration », le département « Recherches » et le Département « « Analyse/ Exploitation ». Enfin, le Service technique est placé sous l’autorité directe du DRN. Il est chargé de mettre en œuvre les moyens appropriés pour la satisfaction des besoins en renseignement technique exprimés aussi bien par les autres entités de la DRN que par tous les autres services nationaux de recherche. Il assure en outre la sécurisation et la maintenance de leurs systèmes informatiques et réseaux de communication.
A noter enfin que l’article 22 du décret dispose que les directeurs généraux, les directeurs généraux-adjoints, les chefs de département et les chefs de division de la DRN bénéficient des indemnités ainsi que des avantages en nature accordés respectivement aux directeurs généraux ou directeurs d’agence de catégorie 4, aux conseillers spéciaux du Président de la République, aux conseillers techniques du Président de la République et aux directeurs de service national.
Autant dire que ce sont des fonctionnaires relativement choyés que le président de la République a tenu à mettre à l’aise afin qu’ils puissent s’acquitter en toute quiétude de leur mission de nous surveiller, de nous écouter, de nous filer éventuellement mais aussi d’ouvrir leurs yeux et leurs grandes oreilles pour capter toutes les menaces qui peuvent peser sur le Sénégal et ses habitants. Et en premier lieu sur le président de la République ! Voilà donc la structure stratégique que le général Cheikh Sène est appelé à gérer. Avec rang et avantages d’un ministre de la République.