ALY NGOUILLE NDIAYE, MAME BOYE DIAO, BOUN ABDALLAH DIONNE PEUVENT-ILS CONVAINCRE ?
Ils ont tous promis de diriger le pays autrement s’ils sont élus le 25 février prochain. Ne serait-ce pas alors vouloir faire du neuf avec du vieux ?

Le ballet se poursuit à la Direction Générale des Élections(DGE) pour le retrait des fiches de parrainage des candidats à la candidature de la présidentielle de 2024. Plus de 200 candidats auraient déjà retiré ces fiches parle biais de leurs mandataires. Et parmi eux, il y a trois pontes de la mouvance présidentielle qui continuent à faire polémique quant à leurs motivations. Il s’agit de Mame Boye Diao, Aly Ngouille Ndiaye et de l’ancien Premier ministre Boun Abdallah Dionne.
A cinq mois de la présidentielle, le Sénégal enregistre d’ores et déjà un nombre record de candidats à la candidature pour la présidentielle de février prochain. Un chiffre astronomique comparé à la taille de notre population. Toujours est-il qu’aujourd’hui, dans un contexte inédit où, pour la première fois, un président sortant ne va pas participer à la mère des élections, les ambitions se multiplient aussi bien dans l’opposition qu’au sein de la mouvance présidentielle. Toutefois, ce qui frappe surtout, ce sont les candidatures de pontes du régime en place à savoir Aly Ngouille Ndiaye, Mahammad Boun Abdallah Dionne et Mame Boye Diao.
Comme ils avaient promis de le faire au cas où le président Macky Sall ne serait pas candidat, Aly Ngouille Ndiaye, Mame Boye Diao et Boun Abdallah Dionne ont finalement décidé d’être candidats à la présidentielle 2024. Ces trois personnalités, qui ont cheminé avec l’actuel le président Macky Sall depuis son accession au pouvoir soit plus de onze ans — plus pour Mahammad Dionne qui était déjà directeur de cabinet de l’actuel Président lorsqu’il était Premier ministre—, ont senti le besoin de rompre ce compagnonnage pour prendre leurs destins en main. Ce malgré les tentatives menées pour les convaincre de revenir sur leurs décisions.
Pourtant, on avait pensé qu’après avoir défendu et soutenu le référentiel des politiques publiques du Macky Sall qu’est le PSE (Plan Sénégal émergent), ils allaient en toute responsabilité poursuivre cet élan de solidarité par respect à leurs convictions. Ce, dès l’instant qu’ils ont toujours laissé croire que ledit Pse est le meilleur programme pour aller vers l’émergence. Et voilà qu’à l’arrivée, ils disent qu’ils peuvent faire plus et mieux que ce qu’a réalisé en 12 ans leur mentor et auquel ils ont participé. Deux lectures peuvent être faites de leurs attitudes. La première c’est de dire que ces trois ex-aperistes étaient atteints d’une cécité dont la gravité ne leur permettait pas de voir les failles du régime auquel ils appartenaient. Une cécité dont ils ont brusquement guéri le jour de l’annonce parle Président de sa décision de ne pas briguer un troisième mandat. Ou, plutôt, le jour où il a dit que c’est Amadou Ba son candidat à la présidentielle. La seconde consiste à faire un aveu qui leur aurait donné plus de crédibilité. C’est à dire reconnaître que, dans le souci de préserver leurs intérêts personnels, ils ne comptaient pas s’attaquer aux failles qui ont caractérisé la gouvernance de l’actuel régime. A part ces deux déclarations toute autre posture relèverait d’une tentative maladroite de vouloir leurrer les populations qui, en définitive, sont les seules détentrices de la légitimité.
Ces trois candidats ont tous promis de diriger le pays autrement s’ils sont élus le 25 février prochain. Ne serait-ce pas alors vouloir faire du neuf avec du vieux ? Dans ce cas, la cohérence aurait voulu qu’ils prennent leur courage à deux mains et quittent le navire marron-beige à temps pour s’affirmer et se positionner comme des alternatives crédibles au président Macky Sall. Mais voilà qu’à cinq mois seulement de l’échéance électorale, ils promettent d’être les hommes providentiels capables de faire sortir les populations de leurs difficultés. Peut-être que, durant la campagne électorale, ils parviendront à se faire écouter d’abord par les Sénégalais avant de trouver les moyens de les convaincre.
Quels discours pour convaincre ?
Même s’ils sont restés droits dans leurs bottes s’agissant de leurs candidatures et de leur volonté de rompre définitivement avec la mouvance présidentielle, certains observateurs continuent de soutenir que toutes ces candidatures bénéficient de l’onction du président Macky Sall. Pour eux, cette pluralité de candidatures issues de son camp s’inscrit dans la même logique de reconduire la stratégie politique mise en œuvre lors des dernières élections. Ce pour que, dans l’éventualité d’un second tour, il puisse récupérer ces voix issues de sa famille politique. Autrement, il serait difficile de comprendre la pertinence de voir aussi bien Boun Abdallah Dionne, Aly Ngouille Ndiaye et Mame Boye Diao défier l’autorité de leur mentor après avoir défendu bec et ongles sa politique. Si l’actuel maire de Linguère a occupé les postes de ministre des Mines, de l’Intérieur et de l’Agriculture, celui de Kolda s’est vu confier les fonctions de Directeur des Domaines puis de directeur de la Caisse des Dépôts et Consignations alors que Mahammad Boun Abdallah Dionne a été celui qui aura le plus duré à la Primature sous Macky Sall soit cinq ans. Durant toute cette période, il avait en charge, en tant que Premier ministre, la mise en œuvre de la politique du chef de l’État. Et durant tout le temps passé au pouvoir pas une seule fois ces trois candidats n’ont critiqué la gouvernance du Président Macky Sall pourtant entachée de nombreux scandales! De quoi installer le doute dans certains esprits à moins de cinq mois de la présidentielle. Des accusations de connivence et de cécité que les trois «gros» dissidents de la mouvance présidentielle rejettent en bloc même s’ils revendiquent être comptables en partie du bilan de Macky Sall. Pour eux, cela n’empêche nullement qu’ils nourrissent l’ambition de vouloir s’inscrire dans une dynamique de proposer des offres programmatiques alternatives pour sortir le Sénégal de ses difficultés. Mais si telle était leur volonté pourquoi alors ne pas l’afficher bien avant que le président Macky Sall ne se prononce dès l’instant que la politique de son candidat s’inscrit dans la continuité ?Ou alors doit-on croire que c’est le choix porté sur la personne de Amadou Ba qui a guidé leur décision de maintenir leur candidature et non la politique mise en œuvre 12 ans durant ? Dernière hypothèse : cherchent-ils à marchander leurs voix avec le candidat qui serait en pole position entre les deux tours en échange de postes dans son gouvernement ? Sous tous ces angles, il serait très difficile à Aly Ngouille Ndiaye, à Mahammad Dionne et à Mame Boye Diao, surtout durant la campagne électorale, de convaincre des populations devenues de plus en plus éveillées et très conscientes des enjeux de l’heure. Toujours est-il que, même si nul ne conteste leurs souhaits légitimes de devenir président, il serait tout de même intéressant, par souci de clarté, qu’ils se prononcent sur celui qu’ils vont soutenir en cas de deuxième tour entre le candidat de la majorité et celui qui serait issu de l’opposition. Cette clarification permettrait de mieux édifier l’opinion publique et lever toutes les suspicions autour de leurs candidatures aux contours toujours alambiqués en tout cas pour certains.