PDS, LE CRÉPUSCULE D’UNE FORCE POLITIQUE
A la permanence du PDS, l'ambiance est morose. Militants et responsables sont abattus par la décision d'écarter Karim Wade de la course à la présidentielle. Entre colère et déception, chacun déplore cette "trahison"

Le Parti démocratique sénégalais est en train de vivre des moments sombres de son existence suite à l’élimination de Karim Wade de la course présidentielle. Mobilisés hier à leur quartier général, la permanence du parti, les Libéraux étaient frappés entre amertume et désespoir.
Ce lundi, au siège du Parti démocratique sénégalais (Pds), la foule de militants est débordante. Mine abattue, la plupart, malgré l’effervescence des lieux, sont toujours sous le choc après l’invalidation de la candidature de leur leader. Dans ce méli-mélo né de l’appel de l’état-major du parti, l’amertume est visible sur les traits d’un visage raidi par le poids de l’âge. Autour de Amy Sow, une inconditionnelle de Wade, trois de ses compagnonnes tentent de la maîtriser. La scène se joue au milieu de la foule massée au portail de l’imposant bâtiment de la permanence Oumar Lamine Badji. «C’est inadmissible ! Macky Sall nous a trahis juste pour tirer d’affaires son candidat. Or, nous avons été traités de tous les noms par nos anciens alliés parce qu’on avait jugé nécessaire de répondre à son appel au dialogue. Aujourd’hui, c’est ce qu’il nous paie», crache l’une des responsables de la 3ème fédération départementale du Pds. «Frère» politique de Wade depuis 1974, Alé Guèye, âgé de 70 ans, est aussi frappé par le désespoir. Des lendemains sombres qui planent sur l’existence de son parti de cœur, le vieillard, bonnet sur la tête, tout de blanc vêtu, convoque les départs massifs des jeunes. Il cite Mouhamadou Massaly, Khafor Touré, Aliou Sow… «L’avenir de notre parti reposait sur ce genre de jeunes pétris de talent et d’énergie. C’est grâce à des responsables comme ça que notre parti était craint. Aujourd’hui, si Karim est écarté par des magouilles et que rien n’a bougé dans ce pays, c’est parce que le Pds est devenu vieux. La jeunesse a quitté le parti», pleure Alé Gueye.
«Je suis tombée en syncope à l’annonce de l’invalidation»
Membre du secrétariat national du Pds, Ndèye Arame Niang, envahie par l’émotion, est bouche bée malgré la clameur. Assise loin derrière la rangée des responsables, la secrétaire adjointe en charge des émigrés est comme figée sur une chaise pendant qu’une de ses compagnonnes s’emploie à la consoler. «C’est une situation très lourde. Très dramatique. C’est un véritable coup de massue porté à notre parti. On venait de terminer, horizontalement comme verticalement, l’installation de toutes nos structures et comités électoraux. On s’apprêtait même à accueillir notre candidat Karim Wade et à commencer la précampagne. Voilà que toutes nos idées, plans et espoirs partent en fumée», se désole-t-elle. Drapée de son grand boubou getzner, la responsable politique hausse subitement le ton, en refusant de s’avouer vaincue. «Le Pds est la plus grande force politique de l’opposition. Notre parti est le plus structuré. Nous allons nous remobiliser très vite. Karim aura son mot à dire dans cette élection. S’ils voulaient nous enterrer définitivement, c’est peine perdue», jure Arame Niang, le visage crispé. 26 ans de militantisme dans le Pds, Sokhna Guèye, conseillère municipale à la ville de Pikine, traîne les séquelles du choc de l’invalidation de la candidature de Karim. «Ce jour-là, cette nouvelle, sortie du Conseil constitutionnel fut un coup de tonnerre chez moi. Je suis tombée en syncope à l’annonce de l’invalidation de sa candidature. Depuis lors, je ne peux sortir de mon domicile. Informée de ma situation, ma camarade Woré Sarr m’a appelée pour me réconforter. C’est grâce à elle d’ailleurs que je suis venue. Mais en réalité, je suis dégoûtée par la politique», confie-t-elle.